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Le Roi de l'hiver

Le Roi de l'hiver

Titel: Le Roi de l'hiver Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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survécu à cette terrible journée, c’est elle
qui avait enduré la pire épreuve et cela l’avait entraînée dans un lieu où je
ne pouvais la suivre ni la comprendre.
    « Je
t’aime, dis-je, essayant de toucher son âme par la tendresse.
    — Moi ?
Pas Lunete ? » répondit-elle fâchée. Ce n’est pas moi qu’elle
regardait, mais la forteresse, tandis que, me retournant, je vis les cavaliers
avancer en file indienne, comme des hommes qui voudraient égailler le gibier,
leur manteau jeté sur la croupe de leur cheval, leur fourreau suspendu à côté
de leurs bottes pendillantes. Le soleil miroitait sur la pointe des lances et
éclairait l’étendard au renard. Gundleus chevauchait sous l’étendard, coiffé de
son casque de fer avec sa crête en queue de renard. Ladwys était à côté de lui,
une épée à la main, tandis que Tanaburs, avec sa longue robe qui tombait
lourdement, montait un cheval gris tout près de celui de son roi. J’allais
mourir, me dis-je, le jour même où j’étais devenu un homme. Ce constat semblait
fort cruel.
    « Courez,
cria soudain Morgane, courez ! » Je crus qu’elle paniquait et je ne
voulus pas lui obéir car je trouvais plus noble de rester et de mourir en homme
que de me faire abattre de dos comme un fugitif. Puis je vis qu’elle ne
paniquait pas et que, tout compte fait, Caer Cadarn n’était pas désert :
les portes étaient grandes ouvertes et un flot d’hommes descendaient le chemin
au pas de course. Les cavaliers étaient habillés comme ceux de Gundleus, à ceci
près que ces hommes portaient au bras le bouclier au dragon de Mordred.
    Nous courûmes.
Je tirai Nimue par le bras tandis que la poignée de cavaliers dumnoniens
jouaient de leurs éperons. Ils étaient une douzaine, ce qui n’était pas
beaucoup mais suffisait pour freiner l’avance des hommes de Gundleus. Derrière
eux, suivait une bande de lanciers.
    « Cinquante
lances », commenta Gwlyddyn.
    Il avait
compté les renforts.
    « Avec
cinquante, nous ne pouvons les battre », ajouta-t-il d’un ton lugubre,
mais on pourrait se mettre en sécurité.
    Gundleus
faisait la même déduction et, à la tête de ses cavaliers, effectuait maintenant
une grande boucle qui les conduirait derrière les lanciers dumnoniens qui
approchaient. Il voulait nous couper notre retraite, car sitôt qu’il aurait
rassemblé ses ennemis en un seul endroit, il pourrait nous tuer tous les uns
après les autres, que nous fussions sept ou soixante-dix. Gundleus avait
l’avantage du nombre et, en quittant leur forteresse, les Dumnoniens avaient
sacrifié leur unique avantage : la hauteur.
    Les cavaliers
dumnoniens passèrent en trombe devant nous, leurs chevaux arrachant sous leurs
sabots de gros morceaux de terre. Ce n’étaient pas les cavaliers légendaires
d’Arthur, ces hommes revêtus d’une armure qui s’abattaient sur leurs victimes
comme la foudre, mais des éclaireurs légèrement armés qui, d’ordinaire,
mettaient le pied à terre avant de se lancer dans la bataille, mais ils
formaient un écran de protection entre nous et les lanciers dumnoniens. Un
instant plus tard arrivèrent nos propres lanciers qui firent un mur de
boucliers. Cela nous rendit un peu d’assurance, une assurance qui se mua en
témérité lorsque nous vîmes qui conduisait les secours. C’était Owain, le
puissant Owain, le champion du roi et le plus grand combattant de toute la
Bretagne. Nous l’avions cru beaucoup plus au nord, bataillant aux côtés des
hommes du Gwent dans les montagnes du Powys ; or il était ici, à Caer
Cadarn.
    Pourtant, à
dire vrai, Gundleus avait tout de même l’avantage. Nous étions douze cavaliers,
cinquante lanciers et trente fugitifs épuisés, dans un lieu exposé où Gundleus
avait réuni près de deux fois plus de cavaliers et le double de lanciers.
    Le soleil
était encore vif. Il y avait encore deux heures avant la brune et quatre avant
qu’il ne fît nuit noire, et cela donnait à Gundleus plus qu’assez de temps pour
achever son carnage, même s’il commença par essayer de nous persuader par des
paroles. Il s’avança, splendide sur son cheval tout écumant de sueur, son
bouclier renversé en signe de trêve.
    « Hommes de
Dumnonie, lança-t-il, donnez-moi l’enfant et je m’en irai ! »
    Personne ne
répondit. Owain s’était caché au centre de notre mur de boucliers, si bien que
Gundleus, ne voyant point de chef, s’adressait à nous tous.
    « C’est
un

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