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Le Roi de l'hiver

Le Roi de l'hiver

Titel: Le Roi de l'hiver Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Bernard Cornwell
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plus le
guerrier est vieux, plus il lui faut de courage. Les jeunes troupes chargeront
et mourront, mais les plus vieux savent à quel point peut être redoutable un
rempart de boucliers. Je n’avais point de bouclier, mais j’étais protégé par
ceux de mes voisins, serrés les uns contre les autres, si bien qu’un homme
donnant la charge se heurterait à un mur de bois couvert de cuir et hérissé de
lances affilées comme des rasoirs.
    Les Siluriens
se mirent à battre leurs boucliers avec la hampe de leurs lances. Le raffut
était censé nous troubler, ce qu’il fit, même si personne de notre côté ne
laissa paraître la peur. Serrés les uns contre les autres, nous attendions la
charge. « Ils vont commencer par de fausses charges, mon gars »,
m’avertit mon voisin, et à peine avait-il prononcé ces mots qu’un groupe de
Siluriens fonça en hurlant et en jetant leurs longues lances au centre de notre
défense. Nos hommes s’accroupirent et les longues lances se fichèrent dans nos
boucliers et, soudain, ce fut toute la ligne des Siluriens qui s’avança, mais
Owain donna aussitôt l’ordre à nos troupes de se relever et d’avancer à leur tour.
Et ce mouvement délibéré arrêta l’ennemi qui menaçait d’attaquer. Ceux d’entre
nous qui avaient une lance ennemie plongée dans leur bouclier s’en
débarrassèrent, puis le mur se reforma.
    « Repliez-vous ! »
ordonna Owain.
    Il essayait de
reculer lentement, pour parcourir à pas traînants le demi-mille de prairie qui
nous séparait de Caer Cadarn, espérant que les Siluriens ne trouveraient pas le
courage de charger avant que nous ayons achevé ce voyage pitoyablement lent.
Pour nous donner plus de temps, Owain s’avança devant nos lignes et, d’une voix
tonitruante, mit Gundleus au défi de l’affronter, d’homme à homme.
    « Tu es
une femme, Gundleus ? lança le champion de notre roi. Tu as perdu
courage ? Tu n’as pas assez d’hydromel ? Pourquoi ne pas retourner à
ton métier à tisser, femme ? Retourne à tes broderies ! Va retrouver
ta quenouille ! »
    Nous
continuions à reculer à pas traînants, lentement mais sûrement, lorsque la
charge de l’ennemi nous fit nous arrêter et nous accroupir derrière nos
boucliers tandis que les lances volaient. L’une d’elles siffla au-dessus de ma
tête comme un coup de vent, mais une fois de plus, c’était une feinte destinée
à semer la panique dans nos rangs. Ligessac tirait des flèches, mais il devait
être ivre car ses projectiles partaient dans tous les sens. Owain fut la cible
d’une douzaine de lances, mais la plupart passèrent à côté et il écarta les
autres avec mépris d’un mouvement de sa lance ou de son bouclier avant de
railler les lanceurs.
    « Qui
vous a appris le métier ? C’est vos mères ? fit-il en crachant en
direction de l’ennemi. Viens, Gundleus ! Affronte-moi ! Montre à tes
marmitons que tu es un roi, pas une mauviette ! »
    Les Siluriens
donnaient des coups de lance sur leurs boucliers afin de couvrir les sarcasmes
d’Owain. Il leur tourna le dos pour bien leur montrer son mépris et rejoignit
d’un pas lent notre ligne de boucliers.
    « Reculez,
reculez ! » dit-il à voix basse.
    C’est alors
que deux Siluriens jetèrent leurs boucliers et leurs armes et déchirèrent leurs
vêtements pour combattre nus. Mon voisin cracha.
    « Il va y
avoir du grabuge, maintenant », me prévint-il d’une voix lugubre.
    Les hommes nus
étaient probablement ivres, ou grisés par les Dieux au point de croire
qu’aucune lame ennemie ne pouvait les blesser. J’avais entendu parler de ces
hommes et je savais que leur exemple suicidaire était habituellement le signal
d’une véritable attaque. J’empoignai mon épée et tâchai de faire le vœu de
mourir bien, mais en vérité j’eusse volontiers versé des larmes de pitié sur
tout cela. Ce jour même, j’étais devenu un homme, et voilà que je devais
mourir. Je rejoindrais Uther et Hywel dans l’Au-Delà et j’attendrais là-bas, au
fil des ans ombragés, que mon âme trouvât un autre corps pour retourner vers ce
monde verdoyant.
    Les deux
hommes défirent leur chevelure, se saisirent de leurs lances et de leurs épées,
puis se mirent à danser devant les lignes siluriennes. Ils beuglaient comme en
pleine mêlée, dans cet état d’hébétude extatique qui poussera un homme à tenter
n’importe quelle prouesse. A cheval sous son étendard, Gundleus souriait aux
deux

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