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Le sac du palais d'ete

Le sac du palais d'ete

Titel: Le sac du palais d'ete Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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incita Mrs Greenwich à se signer à trois reprises et à se lancer dans la récitation d’un Pater Noster. Le pasteur plaça un récipient sous le bras déjà inondé de sang du malade avant de lancer à Janie :
    —  Mrs Greenwich, il ne me semble pas vous avoir vue verser votre obole ce mois-ci, dans le tronc de notre église…
    —  C’est exact mon Révérend. Depuis la fin de l’année dernière, j’ai plus de mal à louer mes chambres… répondit, en piquant du nez, la Galloise avant d’ajouter, l’air pincé : Les Britanniques n’hésitent plus à aller loger chez l’habitant ! Ils n’ont pas peur de la crasse !
    Le pasteur ouvrit de gros yeux et fronça les sourcils.
    —  Une baptiste sincère se doit de ne jamais oublier son obole, Mrs Greenwich… Nos missions ne vivent que de la générosité des fidèles. Nous ne sommes pas comme les catholiques, qui reçoivent chaque mois d’énormes subsides du Vatican !
    —  Je sais, mon Révérend ! Je sais ! Il y a trois mois, j’ai logé gratuitement deux de vos collègues, les révérends Stevenson et March… et lorsque mes locataires sont trop pauvres pour me payer, je ne leur demande rien ! Et si un papiste venait toquer à ma porte, je refuserais de lui louer la moindre chambre ! s’empressa de préciser Janie.
    —  Cette jeune femme, Laura Clearstone, dont je suis en train de soigner le frère, vous paie-t-elle correctement au moins   ?
    —  Depuis qu’elle est pensionnaire ici, elle a toujours payé sa semaine en temps et en heure.
    —  J’aime mieux ça ! Elle n’est pas sur la paille.
    —  Comment le savez-vous   ?
    —  Mon estimé collègue le révérend Roberts a trouvé une coquette somme d’argent dans les affaires de sa mère. Elle est morte chez lui, alors qu’il l’hébergeait avec cette jeune femme et son frère. Il y en avait pour cent vingt-cinq livres… gloussa l’Écossais comme une vieille concierge faisant son boniment à sa collègue de l’immeuble d’en face.
    —  Si j’en avais la moitié, je serais déjà à Londres ! soupira Janie.
    Appuyée contre le chambranle, Laura Clearstone, qui était restée là afin de guetter la réaction de son frère au traitement barbare que lui infligeait MacTaylor, n’avait pas perdu une miette de l’ahurissante mesquinerie de la conversation. N’y tenant plus, elle s’engouffra, fulminante, dans la pièce, prête à dire leur fait à MacTaylor et Mrs Greenwich, mais le spectacle de son frère à moitié assis, les yeux mi-clos et la tête d’une pâleur cadavérique penchée sur le côté, dont le sang tombait goutte à goutte dans le bassin de saignée stoppa tout net son élan vengeur.
    —  Il faut le laisser se reposer jusqu’à demain matin, déclara MacTaylor qui avait commencé à ranger ses instruments.
    En d’autres circonstances, Laura lui eût sauté à la gorge.
    —  Ce garçon me paraît respirer plus calmement. Je suis sûr que son état va s’améliorer de façon spectaculaire. Si mon pauvre Jay était là, il le dirait mieux que moi… ajouta Mrs Greenwich.
    Le pasteur s’approcha de la jeune Anglaise et lui tendit son immense main mais la jeune femme, incapable de la serrer, fit celle qui ne l’avait pas vue. Face à une telle fureur, l’Ecossais, plutôt gêné, ne put que battre en retraite. Il s’éclipsa, suivi de Mrs Greeenwich, éplorée.
    Le soir venu, après avoir couché son fils et être allée embrasser son frère toujours aussi immobile et blanchâtre, la jeune femme ouvrit tout grand les volets de sa fenêtre. Tels ces condamnés à mort que les autorités exposaient aux carrefours et dont les poumons étaient comprimés par la gangue qui les obligeait à se tenir pendant des heures sur la pointe des pieds pour éviter la pendaison, elle éprouvait un irrépressible besoin de respirer. Malgré la lueur des lanternes et des braseros que les gens des quartiers voisins avaient allumés, le ciel rempli d’étoiles lui faisait penser à un immense chaudron piqué de milliers de trous qu’un géant eût brandi au-dessus des flammes.
    Après avoir inhalé le plus d’air possible, une fatigue inexplicable l’envahit soudain, irrépressible comme l’ivresse de l’alcoolique. Hébétée et à bout de nerfs, elle ferma les yeux. Lorsqu’elle crut les rouvrir, quelques instants plus tard, elle se mit à rêver qu’elle était un oiseau capable de voler si haut qu’il pouvait parcourir le firmament de cette

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