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Le sac du palais d'ete

Le sac du palais d'ete

Titel: Le sac du palais d'ete Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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couvertures du lit de son enfant parce qu’elles étaient infestées par ces parasites, baissa la tête en pleurant.
    —  Comment détecte-t-on qu’une personne est empestée   ?
    —  Elle tousse, son corps se couvre de taches brunes puis de vilains boutons purulents et puis la mort survient, à l’issue de terribles fièvres pendant lesquelles la personne est affectée de visions infernales. À Lisbonne, dans mon pays, la peste a tué des dizaines de milliers de personnes à la fin du Moyen Âge, dit le jésuite sur un ton lugubre tandis que Châtaigne d’Eau écarquillait les yeux d’horreur.
    —  J’ai si peur que ma Rose Éminente ne guérisse pas, qu’elle perde ses souffles ! avoua-t-elle en posant un regard éperdu sur sa fille qui ne cessait de gémir.
    —  Demain, je dirai trois messes pour que la santé de notre petite Marie Flore soit remise entre les mains de Notre-Seigneur.
    —  J’avais compris que le baptême empêchait les miasmes de s’installer dans le corps, gémit Châtaigne d’Eau.
    —  Le baptême s’adresse à l’âme… pas au corps ! soupira le prêtre qui ne se voyait pas se lancer dans un cours de théologie alors que l’attendait l’importante réunion de direction mensuelle à laquelle s’astreignaient les jésuites de la communauté de Shanghai.
    —  Et si l’état de Rose Éminente empire, que devrai-je faire   ? lui lança Châtaigne d’Eau.
    —  Si elle devait mourir, elle irait directement au paradis… auprès de Dieu ! lui rétorqua Diogo, croyant la rassurer.
    À ces mots, Châtaigne d’Eau, qui avait éclaté en sanglots, perdit ses nerfs.
    —  Je ne veux pas que Rose Éminente nous quitte… Je me fiche de ton paradis de Dieu !
    La mort dans l’âme, Freitas constatait une fois de plus que sa maîtresse n’était pas prête à se convertir. Ce n’était pourtant pas faute d’avoir essayé. Mais chaque fois qu’il parlait de Dieu ou du Christ, il ne trouvait aucun répondant en elle. La jeune femme semblait totalement imperméable aux idées du monothéisme, ce qui en disait long sur la sincérité des Chinois qui se convertissaient au catholicisme…
    —  Demain matin à la première heure, je serai auprès de toi. Promis, ma douce ! souffla-t-il, accablé, en lui frôlant le front avec ses lèvres.
    En regagnant le presbytère et alors qu’il enjambait dans la rue à moitié déserte des corps plus nombreux qu’à l’habitude, le père jésuite avait l’impression de monter à l’échafaud. C’était toujours ainsi : il allait voir Châtaigne d’Eau le cœur léger mais, après l’avoir quittée, il broyait des idées noires et marchait avec des semelles de plomb. Conscient de s’être fourré dans un inextricable guêpier, il s’en voulait terriblement d’avoir succombé aux charmes de cette petite brodeuse et maudissait ce jour funeste où il lui avait fait l’amour pour la première fois. Mais il était bien trop tard pour faire machine arrière.
    Les calices se buvaient toujours jusqu’à la lie et, pour se consoler, Diogo de Freitas Branco se disait que cela avait été aussi le cas de Notre-Seigneur Jésus-Christ lorsqu’il avait entamé sa montée au calvaire qui s’était achevée par sa crucifixion et par sa mort sous les yeux éplorés de ses apôtres et de ses proches… Il avançait d’un pas lourd, en se persuadant que son itinéraire était d’ordre christique et que, malgré tout, il se taillait tant bien que mal un chemin vers le paradis, même si c’était un sentier parsemé de cailloux coupants comme des couteaux et de ronces dont les épines étaient aussi acérées que des pointes de clous…
    La maison des jésuites se dressa brusquement devant lui, austère et imposante sentinelle au milieu du fouillis des maisonnettes chamboulées par les démolitions en cours. Il était si obnubilé par ses réflexions sur son état hybride de pécheur et de martyr qu’il n’avait pas vu venir la caserne des soldats de Dieu !
    Au moment où il en sortait la clé de sa poche, il entendit quelqu’un chuchoter son nom. Il tourna la tête, inquiet. Après le coucher du soleil, il valait mieux être sur ses gardes car les malandrins rôdaient dans les rues, prêts à détrousser les passants. Surgie de la pénombre grise où elle était cachée, une silhouette apparut, dont il reconnut immédiatement le visage.
    —  Zhong le Discret ! Si tu es venu jusqu’ici, c’est que tu as des choses

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