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Le sac du palais d'ete

Le sac du palais d'ete

Titel: Le sac du palais d'ete Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jose Frèches
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n’a que trop duré, monsieur Vuibert. Si vous ne vous engagez pas, dans quelques jours je me verrai obligé de mettre ce terrain aux enchères. Sachez que je suis déjà harcelé par des Hollandais et par des Espagnols qui souhaitent s’en porter acquéreurs !
    —  Comment dois-je faire pour bloquer ce terrain au profit de la France   ? s’était enquis l’apprenti diplomate, partagé entre l’envie de pouvoir annoncer la bonne nouvelle à M. de Montigny et la crainte de se voir reprocher une initiative intempestive.
    Aussitôt, le jésuite, qui avait préparé son coup, lui avait présenté un feuillet à l’en-tête de la Compagnie de Jésus.
    —  Il vous suffit de signer ces documents… L’un est pour vous, l’autre est pour moi.
    —  J’espère que je ne signe pas mon arrêt de mort… avait, plaisantant à moitié, murmuré le Dauphinois au moment d’apposer sa signature au bas de la promesse d’acquisition du terrain moyennant la somme de trois cents écus d’or.
    —  À présent, il nous restera à aller trouver les services de l’administration foncière afin qu’ils établissent le dossier de propriété. La vente s’effectuera devant le mandarin Wong auquel il faudra remettre un petit cadeau si nous voulons éviter que la procédure ne s’enlise.
    La coque du Puissant n’était plus qu’à quelques mètres du quai et Antoine, qui était allé voir Wong à six reprises, se voyait déjà annoncer fièrement à Charles de Montigny que la France disposait d’un superbe emplacement à Zikkawei.
    Le navire en question était un beau trois-mâts aux formes fuselées et élégantes, bien plus fluides que les coques pansues des jonques de guerre entre lesquelles il avait dû se frayer un passage pour arriver jusqu’à l’embarcadère. Avec ses deux ponts et sa coque en bois doublée de cuivre qui mesurait près de quarante-cinq mètres de long, il jaugeait près de deux cent quarante tonneaux. Antoine n’avait jamais vu de steamer aussi moderne. Le grand vaisseau méritait bien son patronyme car c’était une vraie machinerie flottante. Fort à propos et comme si elles avaient souhaité entonner un hymne à la force motrice de la vapeur, ses deux cheminées se mirent à cracher fièrement leur jet de suie et de vapeur au moment où, dans un ultime effort, sa coque se collait doucement aux pierres taillées du quai que la pluie faisait luire. À peine le bruit provoqué par la paire de gros tuyaux pointés vers le ciel avait-il cessé que l’équipage, à grands coups de gueule, envoya les amarres à terre. Quelques instants plus tard, deux matelots détachèrent la passerelle accrochée au flanc du navire puis la firent pivoter avant de l’incliner vers le sol. Le commandant, le capitaine Gault des Étages, un vieux routier de la longue traversée qui permettait d’atteindre la Chine par le cap de Bonne-Espérance, vint s’assurer que les cordages étaient bien arrimés avant d’autoriser ses passagers à descendre. Antoine, qui s’était posté au pied de la passerelle et dont la main agitait un petit drapeau tricolore, avait pleinement conscience qu’une page de sa vie déjà fort remplie était en train de se tourner.
    Dès qu’il aperçut le consul de France dans la file des passagers descendant du Puissant , il se précipita à sa rencontre. En grand uniforme diplomatique dont le plastron était brodé de feuilles de chêne, Montigny ne passait pas inaperçu, sous son bicorne noir orné d’une plume d’autruche blanche. Il discutait de façon animée avec un homme de type occidental. Les deux compères riaient aux éclats.
    —  Monsieur de Montigny   ? s’enquit Antoine lorsqu’il se trouva à moins d’un mètre du diplomate.
    —  Exact. Je suppose que vous êtes Antoine Vuibert… répondit, plutôt étonné, le nouveau consul de France en Chine en ôtant poliment son bicorne.
    —  Pour vous servir, monsieur le consul…
    —  Votre présence ici m’épate, mon cher Vuibert. Comment diable avez-vous su que j’arrivais aujourd’hui   ? Je ne m’attendais pas à vous voir ici !
    Conformément au souhait du père Freitas, Antoine s’abstint de divulguer sa source.
    —  En l’absence de nouvelles du ministère, je m’efforce d’assister au débarquement des navires qui assurent les liaisons avec l’Europe, fit-il crânement.
    Il était étonné par sa capacité à improviser des histoires.
    Charles de Montigny, qui n’avait aucune espèce de

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