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Le salut du corbeau

Le salut du corbeau

Titel: Le salut du corbeau Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marie Bourassa
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s’accroupit et lui offrit un sourire radieux. Son haleine était alourdie par le vin domestique pris au cellier du manoir, où l’on avait mis un vauplate* en perce.
    — Mon cheval, balbutia Louis.
    — T’en fais donc pas pour lui, il est mort, mon vieux.
    Sam lui donna quelques tapes sur l’épaule et but une rasade de vin à même le cruchon que vint lui remettre un homme dont la vaste poitrine était protégée par un jaseran* de mailles mal entretenu.
    L’Escot* s’essuya la bouche du revers de la main.
    — Mais toi, par contre, bourrel*, tu es bien vivant, si tu vois ce que je veux dire.
    — Non, je ne vois pas.
    — Allons, allons, tu ne vas quand même pas me faire ce coup-là, pas toi. Tu sais très bien de quoi je veux parler.
    Louis se redressa et parvint à ouvrir à demi son autre œil.
    — Ce n’est pas comme ça qu’on doit questionner un homme.
    Un petit rire sec s’échappa d’entre les lèvres de Sam. Il baissa la tête et écouta ses compères ricaner avec lui.
    — Ah, je vois, je crois que je comprends.
    Il prit son élan et lui enfonça son poing dans le ventre. Privé de souffle, Louis glissa contre le mur sans être en mesure de se mettre en position fœtale à cause de son bras menotté.
    — Est-ce comme ça ? demanda Sam.
    De nouveaux rires venus de l’entrée crépitèrent. Péniblement, Louis se redressa et répondit :
    — Non plus. Tu comprends vraiment tout de travers, toi…
    — C’est vrai ?
    Le poing de Sam s’abattit encore et lui fendit une pommette. La viscosité du sang frais se mit à luire à travers la mèche de cheveux emprisonnée sans toutefois la libérer. À demi assommé une nouvelle fois et pris de nausée, Louis tâchait de reprendre haleine.
    — C’est loin d’être agréable, n’est-ce pas ? dit Sam en pétrissant une rangée de phalanges meurtries. Maintenant que je suis enfin parvenu à te mettre le grappin dessus, songe à tout ce que tu as fait subir aux autres. Songes-y.
    — Il y a longtemps que c’est fait. Tu n’étais même pas au monde que j’y songeais.
    — Et alors ? Ça ne t’a pas empêché de le faire ?
    — Pas plus que ça ne t’empêche, toi, de faire pareil.
    Les hommes lâchèrent des « oh » à la fois admiratifs et inquiets. Sam serra les mâchoires.
    — Il en a du cran, ce Lewis Rewett, dit quelque part la voix d’Iain.
    Louis ferma les yeux. Lewis Rewett. Il concentra toute son attention sur cette broutille et sur le fait que d’entendre prononcer son nom correctement allait désormais être un compliment pour lui.
    — Cran ou pas, regarde-moi bien lui faire la nique.
    Sam empoigna les cheveux du bourreau et le força à rouvrir les yeux en lui rejetant la tête en arrière. Il dit :
    — Trêve de bavardages. Où sont-ils ?
    — Où sont qui ?
    Sam grogna et le secoua si rudement qu’une poignée de cheveux lui resta dans les mains.
    — Tu n’arriveras jamais à rien avec tes questions imprécises, dit Louis, dont les deux prunelles sombres étaient maintenant visibles. Va dessaouler et reviens plus tard.
    Ce congédiement nonchalant ne fit qu’attiser la colère de Sam, qui se pencha davantage au-dessus de son captif et demanda, avec un calme qui sonnait faux :
    — Où sont Jehanne et mon fils ?
    — Ils ne sont pas ici.
    Les acclamations des hommes ne firent qu’attiser la hargne de Sam, qui se mit à larder Louis de coups de poing et de pied. Il ne s’arrêta que lorsqu’il fut à bout de souffle, suant sous son heaume et son colletin* d’armure dont l’aspect dénonçait lui aussi le pillage. Sam grogna, tout en continuant de frapper des pieds et d’un gourdin qu’il venait de ramasser :
    — Tu es un coriace, bourrel*. Quelle admirable impassibilité. On serait presque porté à prendre cela pour du courage. J’aurais dû m’en douter. Tu n’as pas plus de cœur pour toi-même que pour les autres. Or çà ! Dis-moi donc à quoi cette impassibilité peut-elle bien te servir maintenant, hein ?
    Louis suffoquait. Tassé contre lui-même, il encaissait tout presque sans une plainte et affichait une froideur inattaquable. Lorsque Sam dut à nouveau s’accorder un répit, le bourreau remua avec précaution et dit :
    — Désolé de te décevoir… mais je ne suis pas impassible. La douleur, je la ressens… comme tout le monde. La différence c’est que… j’ai appris à la tolérer.
    Tout était contre lui et pourtant il triomphait. C’était là

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