Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Sang d’Aphrodite

Le Sang d’Aphrodite

Titel: Le Sang d’Aphrodite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elena Arseneva
Vom Netzwerk:
entendu. Et voilà comment je vois notre homme : cultivé, féru d’histoire et d’antiquité grecque, aimant le luxe, porté sur les plaisirs des sens… Pas nécessairement beau, mais séduisant et séducteur qui sait y faire avec les femmes…
    Soudain, l’apothicaire s’interrompit : il venait de s’apercevoir que Philippos l’observait avec une expression d’incrédulité mêlée de frayeur.
    — Pourquoi me regardes-tu ainsi, mon enfant ? s’enquit Klim, avant de se tourner vers Artem : Boyard, ton fils me dévisage comme s’il me savait coupable de quelque mauvaise action !
    — Allons donc ! lança le droujinnik en remplissant sa coupe qu’il venait de vider. À propos, je doute que notre suborneur soit doué d’un charme irrésistible. Tout son pouvoir de séduction réside dans l’usage immodéré du Sang d’Aphrodite ! Certaines de ses victimes étaient sûrement capables de briser l’enchantement… mais aucune ne l’a fait, conclut-il d’un ton sombre.
    Il commençait à avoir très chaud et se dit qu’il devrait faire attention à l’excellente eau-de-vie au miel de l’apothicaire.
    — Non, aucune n’a voulu ou n’a pu arrêter ce jeu dangereux avec l’élixir, soupira le bossu. Cela s’explique en partie par le fait que les femmes raffolent de toutes sortes d’artifices. Elles ne peuvent se passer de parfums, de lotions, de fards…
    — De fards ? répéta Artem avec effroi. Voilà le moyen le plus sûr de s’enlaidir au lieu de s’embellir !
    — C’est l’évidence même, ricana Klim. Mais ce n’est pas ce que pense la gent féminine ! Un mien ami prétend que les femmes ont une attirance naturelle pour tout ce qui relève des apparences. Selon lui, ce penchant va de pair avec la répugnance instinctive des femmes envers toute vérité qui leur déplaît !
    À cet instant, la porte s’ouvrit et Vesna entra dans la pièce. Ses yeux bleus paraissaient noirs, ils jetaient des éclairs, et son visage avait rougi sous l’effet de la colère.
    — C’est une vile calomnie, et tu ne penses pas un mot de ce que tu dis ! s’écria-t-elle en foudroyant Klim du regard. Je connais l’auteur de ce mot grotesque ; tu es peut-être tenu de le ménager en tant que client, mais rien ne t’oblige à rapporter ses propos dégradants !
    — Ton époux ne pensait pas à toutes les femmes, dit Artem avec une mine penaude. Nous ne parlions, euh… que de femmes indignes.
    Vesna, qui s’était ressaisie, lança au droujinnik un coup d’œil malicieux.
    — Et qu’est-ce qu’une femme digne, pour toi ? lui demanda-t-elle en souriant.
    — C’est d’abord une femme digne de ce nom, répondit Artem s’efforçant de rassembler ses idées.
    — Exact. Elle cherche à cultiver son esprit, tout en prenant soin de son apparence. C’est aussi naturel qu’un militaire qui cherche à mettre en valeur sa carrure et son aspect redoutable.
    — Mais pour qu’elle soit digne de respect, spécifia Artem, il faut qu’elle sache rehausser sa beauté avec des moyens discrets. C’est ça : elle use de tout avec modération… Y compris de son droit à la parole !
    — Cela vous regarde tous autant que vous êtes, intervint Philippos. Alors, trêve de bavardage !
    Il commençait à en avoir assez d’entendre Artem s’enliser dans ce badinage qui seyait si peu à un guerrier. En guise de réponse, le droujinnik, Klim et sa femme éclatèrent de rire. Puis le bossu prit un air mélancolique et déclara :
    — Tout ça est bien beau, mais l’homme peut-il se fier à ce monde trompeur ? Car les yeux et tous nos sens abusent notre raison par de fausses apparences ! Ils ne sont que messagers d’erreurs et courriers de mensonges. Ils nous leurrent plus qu’ils ne nous instruisent !
    Artem l’interrompit d’un geste de la main : au lieu de laisser pérorer l’apothicaire, il avait envie de plaisanter avec Vesna ! Il se leva de son fauteuil pour s’approcher d’elle et scruta le ravissant visage aux hautes pommettes piquées de rousseur et aux iris d’un bleu profond.
    — Pour l’heure, je suis heureux de me fier à mes yeux, murmura-t-il, luttant contre le désir de rajuster la mèche folle qui s’était détachée de la coiffure de la jeune femme. Ta grande beauté, dame Vesna, réjouit le cœur ; elle n’a nul besoin de fards ni de pommades.
    — Je suis mieux placée que toi, boyard, pour savoir si j’ai besoin de mes petits secrets, riposta

Weitere Kostenlose Bücher