Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Sang d’Aphrodite

Le Sang d’Aphrodite

Titel: Le Sang d’Aphrodite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elena Arseneva
Vom Netzwerk:
dame Vesna : pourquoi ton mari se trouvait-il dans cette partie de la maison, au beau milieu de la nuit, complètement habillé ? Peut-être attendait-il quelqu’un sans t’en avoir informée ?
    — Mon époux n’avait pas de secrets pour moi, répliqua Vesna avec dignité. Il ne devait recevoir personne la nuit dernière. En revanche, il lui arrivait souvent de travailler tard et de s’endormir comme ça, installé dans son fauteuil. Le lendemain, je le trouvais dans la grande pièce ou dans l’officine, et je le renvoyais alors dans sa chambre.
    La jeune femme marqua une pause avant de s’adresser à Artem.
    — J’aimerais te poser une question, moi aussi. Tu as examiné mon malheureux mari. Comment est-il mort ? J’ai vu qu’on lui avait porté plusieurs coups de poignard. Pourquoi tant de fureur ? Que s’est-il passé exactement ici ?
    Le droujinnik haussa les épaules.
    — Klim a sûrement entendu du bruit ou aperçu de la lumière. Il est donc venu ici. En découvrant l’intrus, il a été stupéfait mais non effrayé ; il ne s’attendait absolument pas à être assailli par lui. Mais il faudrait en savoir plus sur leurs relations ! Cet homme a dû accumuler beaucoup de haine envers Klim. Il dépendait de lui de plusieurs façons : il craignait pour sa sécurité, et surtout, il ne voulait pas que l’apothicaire révèle les détails les plus intimes de sa vie privée. Klim connaissait ses goûts pervers et lui fournissait les moyens de les satisfaire en lui procurant l’élixir, mais aussi les flacons, une autre de ses lubies. Qui sait combien de « services » de ce genre ton mari lui avait rendus depuis le temps ?
    Artem s’interrompit, conscient que ses paroles ne pouvaient qu’augmenter la douleur de la jeune veuve, mais il était trop furieux, d’abord contre Klim qui avait payé son obstination de sa vie, et surtout contre lui-même, car il n’avait pas réussi à sauver l’apothicaire malgré lui. Il leva les yeux vers Vesna et croisa son regard. Soudain, elle fondit en larmes ; elle s’était contenue trop longtemps. Elle pleurait sans bruit, en tremblant de tout son corps, comme pleurent les femmes dans les chagrins les plus poignants. De petits sanglots se formaient dans sa gorge et elle suffoquait, sans arriver à libérer vraiment son cœur. Artem se précipita vers elle, lui prit les mains et les serra entre les siennes. Ils se mirent à parler tous deux à la fois, mais leurs paroles étaient inintelligibles, les larmes coupaient la voix de la jeune femme et l’émotion nouait la gorge au droujinnik. Enfin, Vesna se libéra doucement et articula :
    — Mon bien-aimé époux… Je lui devais tout ! C’était le seul homme qui me comprenait, qui m’aimait en dépit de mon terrible passé. J’aurais dû me rendre compte à quel point le jeu qu’il menait était dangeureux ! J’aurais sûrement pu l’en empêcher… N’importe quelle épouse aimante l’aurait fait ! J’ai failli à mon devoir…
    — Cesse de te torturer en vain, dame Vesna ! répliqua Artem avec compassion. Personne n’aurait pu le sauver. C’est moi qui te le dis, moi qui suis responsable devant le prince de la sécurité de tous ses sujets !
    Il continua de parler avec toute la force de persuasion dont il était capable. Petit à petit, Vesna parvint à se calmer. Les traits creusés par le chagrin mais le ton ferme, elle demanda :
    — Que puis-je faire pour t’aider à démasquer le meurtrier ? Peut-être pourrais-je l’attirer dans un piège ? Pour peu qu’il me trouve à son goût…
    — Tu ne penses pas à ce que tu dis ! C’est de la folie ! s’écria le droujinnik en saisissant de nouveau les petites mains aux paumes calleuses.
    La jeune veuve baissa la tête d’un air buté et resta silencieuse un instant.
    — Je sais à quoi on peut le reconnaître. Il doit avoir une vilaine cicatrice au niveau de la poitrine. Le jour du meurtre d’Anna, quelqu’un est venu voir mon mari pour se faire soigner. Je ne me rappelle plus le détail qui m’a mis la puce à l’oreille, mais je suis persuadée que c’était l’assassin ! Savais-tu qu’Anna portait au cou une petite dague dont la lame était enduite de poison ? Et ce n’était pas le genre de fille à se laisser égorger comme un agneau ! Elle a sûrement réussi à blesser ce monstre.
    — J’ai dû renoncer à cette piste, répliqua Artem. Autant chercher une aiguille dans une botte de foin.

Weitere Kostenlose Bücher