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Le Sang d’Aphrodite

Le Sang d’Aphrodite

Titel: Le Sang d’Aphrodite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elena Arseneva
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peine, l’interrompit le droujinnik. Je veux lui présenter mon fils, le boyard Philippos. D’ailleurs, nous ne resterons pas longtemps.
    Le jeune Nestor hocha la tête et reprit sa place près de la porte. Artem et Philippos s’avancèrent à travers la vaste pièce aux murs couverts de rayonnages qui montaient jusqu’au plafond, supportant des centaines de manuscrits à reliure ouvragée. D’autres livres, des rouleaux de papyrus et d’écorce de bouleau s’empilaient dans de gros coffres cerclés de fer. Le droujinnik regarda Philippos à la dérobée : sa mine butée avait fait place à une expression béate. Il respirait avec délices cette odeur si particulière qui évoquait à la fois le cuir, le bois et l’encre fraîche, et à laquelle se mêlait la senteur des herbes de la steppe qui protégeaient les manuscrits des vers et des larves.
    Artem sourit dans sa moustache. En fait, il avait amené le garçon ici dans l’espoir de le distraire de sa tocade pour Nadia. Sachant à quel point son fils prisait la lecture, il pensait que c’était le moyen le plus sûr de l’éloigner de la petite coquette.
    Ils contournèrent une dizaine de lutrins où scribes et copistes travaillaient, penchés sur des ouvrages aux pages ornées de lettrines et d’enluminures. Artem conduisit Philippos au fond de la salle. Installée dans un coin, une silhouette filiforme et voûtée se profilait devant un pupitre où s’étalait un large parchemin. Absorbé dans son travail, Pimène n’aperçut les visiteurs que lorsqu’ils s’immobilisèrent près de lui. Il voulut se lever, redressant avec peine son maigre corps raidi. Artem lui fit signe de se rasseoir et ils échangèrent des formules de courtoisie. Vêtu d’une tunique de lin blanc, Pimène devait compter une cinquantaine d’étés, mais sa figure émaciée à la peau jaunâtre paraissait sans âge. Sa barbe et ses cheveux clairsemés étaient striés de gris. Il avait des yeux bleu pâle et il clignait fréquemment des paupières à la manière des myopes.
    — Ainsi ton fils s’intéresse aux chroniques historiques ? s’enquit-il avec un sourire aimable.
    — Il se passionne surtout pour les grands auteurs grecs.
    — Ah ! Tu aimes la philosophie et la poésie de l’Antiquité païenne, ponctua Pimène. Je suppose que tu lis couramment le grec et le latin, mon garçon ?
    — Euh… Je ne suis pas très fort en latin, avoua Philippos.
    — Peu importe. Ce qui compte, c’est que tu goûtes la description des temps jadis. Rares sont les chroniqueurs qui maîtrisent le récit historique, genre noble par excellence ! Il faut se limiter aux événements marquants, sans oublier d’exposer la leçon qu’on peut en tirer…
    Artem l’interrompit d’un geste.
    — En ce moment, vénérable Pimène, mon fils a besoin de lectures plus distrayantes. J’ai pensé aux grandes épopées byzantines.
    — Oh, ça me revient maintenant ! Tu voulais quelque chose qui puisse lui faire oublier les peines de cœur qui consument ses jeunes forces.
    — C’est donc ça ! chuchota Philippos, furieux. Tu veux user de la ruse pour me séparer de Nadia !
    — Je crois qu’un beau récit historique conviendrait parfaitement à notre jeune homme, poursuivit Pimène sans écouter. Je pense à ma Chronique de Tchernigov . En fait, je l’ai commencée du temps d’Oleg, mais l’avènement de Vladimir m’a obligé à remanier certains passages. J’ai déjà évoqué le début glorieux du règne de notre prince, ce qui est de bon augure pour les temps à venir…
    — De grâce ! gémit Philippos à mi-voix.
    — Un récit d’aventures ferait notre affaire, dit Artem d’un ton ferme.
    Pimène prit un air pincé, puis proposa à contrecœur :
    — Dans ce cas, je peux recommander les célèbres aventures de Digénis Akritas, héros byzantin. Demandez donc à Nestor de vous sortir ce codex !
    À cet instant, la porte au fond de la salle s’ouvrit, livrant passage à Mitko suivi de Vassili. Ils poussèrent une exclamation joyeuse en apercevant le droujinnik et son fils.
    — Par le Diable, que faites-vous ici ? brailla le colosse blond.
    — Et vous autres ? rétorqua Philippos, ravi de cette distraction.
    — Nous avons passé la matinée dans la salle voisine, à fouiller dans des documents poussiéreux et à reconstituer des histoires de meurtres vieux de plusieurs années, répondit Mitko.
    Artem, qui se sentait un peu coupable, se hâta

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