Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le Sang d’Aphrodite

Le Sang d’Aphrodite

Titel: Le Sang d’Aphrodite Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Elena Arseneva
Vom Netzwerk:
quitter la ville.
    Philippos quitta la résidence et s’engagea dans la grand-rue d’un pas pressé. En débouchant sur la place du Marché, il sentit la faim le tenailler. Il décida de faire un détour par une galerie bordée d’estaminets qui répandaient des effluves appétissants. Il acheta une tourte à la viande toute chaude, s’écarta de l’éventaire et se mit à la dévorer à belles dents. Quelques instants après, la grosse voix de la marchande voisine le tira de ses pensées.
    — Et comment que j’ai entendu ! disait-elle à une matrone plantée devant le comptoir, panier au bras. Depuis ce matin, on ne parle que de ça. Ah, le scandale ! Ah, la honte !
    Elle leva les yeux au ciel et se signa pieusement. L’autre commère imita son geste avant d’ajouter :
    — Ce n’est pas la première fois que ce diable de Kassian fait des siennes ! Il a déjà déshonoré plus d’une noble jouvencelle.
    La marchande fit claquer ses lèvres en esquissant une moue de mépris.
    — Cette fille n’est pas plus noble que toi ou moi, petite mère ! déclara-t-elle avec aigreur. Avant de réussir, son père n’était qu’un petit commis sans scrupules, c’est moi qui te le dis ! Maintenant qu’il jouit de son bien mal acquis, il ne se mouche pas du pied ! Il a élevé sa fille comme une princesse, et elle n’en fait qu’à sa tête. Alors, pour ce qui lui est arrivé, ça lui pendait au nez depuis longtemps !
    Tandis que la matrone approuvait avec enthousiasme, Philippos tourna les talons et quitta le marché aussi vite qu’il le pouvait. Il était écœuré. Nadia avait agi sans réfléchir, mais cela ne permettait pas à ces vieilles toupies de la traîner dans la boue ! Tout cela était la faute de Kassian. Comment Nadia, pourtant si fine, n’avait-elle pas compris à qui elle avait affaire ? Quelques minutes plus tard, il se tenait devant la demeure de Grom. Au lieu de frapper, il poussa le portail, dont l’un des battants s’ouvrit sans bruit. Il se glissa à l’intérieur de la propriété. Aucun domestique n’était en vue, et Philippos en profita pour filer droit vers la maison. Il alla se poster sous la fenêtre de Nadia et émit un sifflement discret. Aussitôt, la jeune fille vint se pencher au-dehors.
    — Bravo, tu peux être fière de toi ! lança le garçon en guise de salutation. Toute la ville est déjà informée de ton escapade nocturne !
    Nadia haussa les épaules avec dédain.
    — Qu’importe ! Kassian et moi allons nous marier.
    Elle portait une robe d’intérieur blanche aux broderies multicolores qui mettait en valeur son teint mat et ses yeux noirs. Elle parut si belle à Philippos que son cœur se serra douloureusement.
    — Si tu veux le savoir, je l’ai fait exprès, poursuivit Nadia d’un air hautain. J’en ai assez d’attendre que mon père me trouve un fiancé selon son goût. Un de ces jours, il va m’amener un vieillard avec une grosse bedaine qui lui permettra de doubler sa fortune d’un seul coup… Non, merci ! J’ai envie d’épouser un homme jeune, beau et noble. Kassian est tout cela !
    — Comment peux-tu songer à te marier sans amour ? s’exclama Philippos. L’autre jour, tu m’as juré que tu ne l’aimais pas. C’était donc un mensonge ?
    — Pas vraiment, répondit la jeune fille d’une voix langoureuse. Je suis si changeante… Je ne me connais pas moi-même.
    — Moi, je te connais ! s’échauffa Philippos. Une vraie girouette ! Et en plus, voleuse comme une pie. Pourquoi m’as-tu dérobé ce flacon ?
    — Quel flacon ? fit Nadia en haussant les sourcils.
    — Ne fais pas l’innocente ! s’écria-t-il, furieux. J’avais posé mon caftan sur un banc, près de la table. Pendant que nous étions… sous la tonnelle, ta nounou t’a appelée et tu t’es absentée. C’est sûrement à ce moment-là que tu m’as fait les poches. Il faut que tu me rendes ce flacon ! C’est un indice capital dans notre enquête.
    Nadia leva les bras au ciel comme pour prendre Dieu à témoin.
    — Ah non, c’est trop fort ! Il est venu me parler d’amour, et voilà qu’il me harcèle à cause d’une malheureuse fiole ! Je me soucie comme d’une guigne de votre enquête. Tu prétends m’aimer, mais tu n’es qu’un menteur et un goujat.
    Détournant la tête, elle renifla bruyamment.
    — Nadia, ma douce… balbutia Philippos. Je sais que tu ne pensais pas à mal. Tu as voulu me jouer un tour et te moquer de

Weitere Kostenlose Bücher