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Le sang de grâce

Le sang de grâce

Titel: Le sang de grâce Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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Philippe le Bel*.
    Le roi de France, grandement secondé
par Nogaret, recherchait un prélat dont il était prêt à financer l’élection au
Saint-Siège en échange d’une neutralité de bon aloi dans les affaires
politiques françaises. Toutefois, Viancourt, tout comme Guillaume de Villaret,
grand maître de leur ordre depuis 1296, se doutait depuis longtemps que la
reconnaissance que devrait le nouveau souverain pontife au roi de France ne
s’arrêterait pas là. Philippe voulait à toute force se débarrasser des ordres
soldats – principalement du Temple – véritable meute de garde de la
papauté. La stratégie adoptée par le roi, et sans doute imaginée par son plus
fidèle conseiller Nogaret, forçait l’admiration de Viancourt. Plutôt que
d’exiger l’élimination pure et simple de tous les ordres de chevaliers du
Christ et d’encourir ainsi la rancœur du Vatican, sans oublier celle de la
jeunesse noble ou bourgeoise très attachée à ces ordres de pureté et
d’héroïsme, Philippe souhaitait leur réunion sous une seule bannière, celle de
l’un de ses fils. Probablement le jeune Philippe, le seul qui put se prévaloir
d’une intelligence digne de ce nom. Philippe le Bel muselait ainsi les
moines-soldats, les contraignant à l’obéissance à peu de risques politiques.
     
    Bien cher cousin,
    Oserai-je vous avouer que mes
recherches d’angélologie piétinent. J’imagine votre déception qui me remplit de
tristesse. Le deuxième ordre [47] des Dominations, des Vertus et des Puissances résiste à mes efforts.
Une nouvelle devrait, cependant, alléger votre contrariété, du moins ai-je la
faiblesse de le souhaiter. Le troisième ordre des Principautés, des Archanges
et des Anges commence de s’organiser dans mon esprit et je suis maintenant
certain que ce tempus discretum que
je traque dans la documentation à laquelle j’ai accès concerne surtout les
Principautés. Il me faut un peu plus de temps pour parvenir à une conclusion
fiable. Je ne doute pas que ce nouveau délai vous occasionne quelque embarras
et en suis fort contrit.
    Vous assurant de mon acharnement à
poursuivre cette épineuse étude et en espérant que ma prochaine missive vous annoncera
des avancées significatives.
    Votre humble et reconnaissant
Guillaume.
     
    Francesco de Leone lui annonçait que
quatre noms de prélats français restaient en lice pour le trône papal, un
progrès depuis sa première missive puisque deux des cardinaux pressentis
semblaient d’ores et déjà avoir été éliminés par Philippe le Bel. Les fameux
Archanges et Anges… distrayante métaphore ! En revanche, il ne faisait
plus référence à « la cité de Dieu » d’Augustin comme source
bibliographique, signifiant qu’il avait décidé d’abandonner le côté de monsieur
de Nogaret pour poursuivre sa mission ailleurs.
    L’homme fluet relut une dernière
fois avec attention la lettre posée sur sa table de travail.
     
    Je ne doute pas que ce nouveau délai
vous occasionne quelque embarras et en suis fort contrit.
     
    Un sourire amusé éclaira le visage
émacié du grand commandeur. Certes, Leone traînait en France, mais n’était-ce
pas la raison pour laquelle Viancourt l’y avait envoyé, sans que le chevalier
le soupçonne un instant ?
    Le prieur se leva et se dirigea vers
le coffre enfoui dans le mur qui faisait face à son bureau et y récupéra le
rouleau reçu plusieurs semaines auparavant, signé d’un simple « G ».
Clair Gresson, secrétaire personnel de Guillaume de Plaisians [48] , lui-même ancien élève de Nogaret à Montpellier puis juge mage de
Beaucaire avant de rejoindre son ancien maître l’année précédente au service
direct du roi de France. Plaisians y exerçait depuis ses remarquables talents
de légiste. Il ajoutait l’aisance oratoire à une vaste intelligence aidée d’une
solide culture. Ainsi qu’il se murmurait dans les couloirs et les antichambres
du Louvre, il était devenu « la deuxième tête plantée sur les épaules de
monsieur de Nogaret » et semblait animé de la même animosité vis-à-vis de
la mémoire de feu le pape Boniface VIII. Placer Gresson, l’un des informateurs
les plus zélés et les plus subtils que se connût le prieur, aux côtés de
Plaisians s’était avéré une tactique efficace dont Arnaud de Viancourt se
félicitait. Clair Gresson avait écrit :
     
    Mon bien aimé parrain,
    J’espère que vous vous portez au
mieux. Notre commun cousin

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