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Le sang de grâce

Le sang de grâce

Titel: Le sang de grâce Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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ton méfiant et peu amène :
    — Pourquoi souhaitiez-vous
cette entrevue ?
    Le troublant regard ambre pâle la
scruta. Puis, la voix si grave pour une très jeune fille de courte stature
expliqua :
    — Le temps nous presse. Elle
est arrivée plus vite que je ne le redoutais. Sa première décision sera de
lever l’interdiction de sortie puisque c’est la raison de la mort de madame de
Beaufort.
    — Qui… ? balbutia
l’apothicaire.
    — Qui suis-je ? Esquive.
Un maillon, comme vous. Il vous faut me croire. Quels détails vous offrir afin
de vous convaincre bien vite que je suis votre alliée ? La seule en ce
lieu. Francesco de Leone est venu visiter sa tante, ignorant qu’elle avait
trépassé. Vous l’avez fait pénétrer dans la bibliothèque secrète dont l’entrée
est dissimulée sous la tapisserie du bureau de l’abbesse.
    La jeune fille se pencha, récupéra
une clef sous sa robe.
    — Voici le double qui me fut
remis lorsque l’on me communiqua ma mission : rejoindre les Clairets afin
de vous aider et d’éviter que l’enherbeuse ne tourne ses talents contre vous
deux. Malheureusement, j’ai failli. Éleusie de Beaufort a péri.
    — Ainsi vous nous… épiez
depuis…
    — Je suis arrivée quelques
jours à peine avant son décès. De surcroît, je ne vous épie pas, je vous
protège.
    — Qui vous a confié cette
clef ?
    — Oh, un messager. Quant à savoir
qui l’a fait réaliser, je n’en ai point d’idée, et peu m’importe. J’obéis.
J’obéis à la gloire. Je sais ce que je dois savoir. Rien d’autre… et je ne m’en
inquiète pas.
    Étrangement, ce furent ces derniers
mots qui convainquirent Annelette. Quelle importance en effet ? Seule
comptait la réussite de leur Quête.
    — Je vous crois.
    — Avez-vous formé de solides
soupçons concernant l’identité de la diablesse empoisonneuse ? s’enquit
Esquive.
    — Jeanne. Jeanne d’Amblin, la
tourière. Je n’ai encore nulle preuve, mais les événements la désignent, si
l’on admet qu’elle eut au moins une fois recours à une complice, le jour où
l’on me subtilisa la poudre d’if alors qu’elle se trouvait à l’extérieur de nos
murs.
    — Qui ? La complice,
qui ?
    — J’ai songé à Sylvine Taulier,
la fournière. J’avoue, cependant, que seul un raisonnement m’y conduit. Qui
mieux qu’elle pouvait préparer le pain à l’ergot de seigle qui intoxiqua
fatalement plusieurs des émissaires de Benoît ?
    — L’ergot de seigle ?
    Annelette reprit pied dans l’univers
qu’elle connaissait le mieux, et entreprit de résumer les effroyables
propriétés toxiques de ces petits amas noirâtres qui contaminaient souvent les
céréales, le seigle surtout, l’aspect de cuir carbonisé qu’il donnait aux
membres, cette espèce de gangrène qui détachait les phalanges, les délires qui
précédaient l’agonie. Esquive l’interrompit d’un geste doux de la main :
    — Nous ne disposons que de peu
de temps, ma sœur. Sylvine Taulier, sa complice, disiez-vous ?
    Annelette serra les lèvres avant
d’admettre :
    — Il est vrai que je n’éprouve
guère de chaleur envers elle, ce qui m’encourage à la vigilance concernant mes
soupçons.
    — Vigilance à votre honneur. Et
pour Jeanne ?
    — Oh, c’est que je me laissais
aller à une sorte d’amitié à son égard. Elle est si habile à se faire aimer, si
dévouée, si attentionnée qu’on lui offrirait le paradis sans confession.
    — Ces caractéristiques font les
tueurs les plus déliés.
    — Certes, d’autant que Jeanne
est rusée. C’était un coup de maître que de s’absenter en chargeant sa sbire de
dérober un poison dans mon armoire. J’ai résisté à l’envie de me jeter sur
elle, décidant que le plus intelligent était de la laisser libre de ses
mouvements afin qu’elle me conduise à la cachette des manuscrits dérobés.
    — Voilà qui était judicieux,
approuva Esquive.
    — Ah mon Dieu, se plaignit
l’apothicaire. Je me suis égarée. J’ai perdu du temps et notre mère a été
occise.
    — Ne vous malmenez point de la
sorte. Vous n’êtes coupable en rien. Il n’y a eu nulle négligence de votre
part. Juste trop de confiance. Dans quel monde vivons-nous qu’elle soit si mal
récompensée ?
    — Ce monde va changer, n’est-ce
pas ? demanda Annelette d’une voix presque enfantine.
    — C’est notre lutte de chaque
instant.
    — Mais le croyez-vous ?
    — Sur ma vie, sur mon

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