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Le sang des Borgia

Le sang des Borgia

Titel: Le sang des Borgia Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Mario Puzo
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les faveurs leur seraient nécessaires.
    Celui qui marchait derrière eux les éclipsa pourtant sans peine. L’allure hautaine et solennelle, Piero de Médicis était vêtu d’un pourpoint vert émeraude brodé de soleils d’or, qui jetaient sur son visage des reflets de lumière. Il était accompagné de sept de ses parents, dont son frère Gio, l’ami de César. Piero était désormais le maître de Florence, bien qu’on murmurât que, depuis la mort de son père Laurent le Magnifique, les Médicis n’avaient plus le contrôle de la cité et que bientôt ils seraient renversés.
    Les Orsini et les Colonna avaient quitté leurs palais romains. Ennemis mortels depuis des générations, ils étaient pour l’heure en paix. Ils prirent soin, toutefois, de s’asseoir très loin les uns des autres : lors de l’ordination d’un autre cardinal, ils s’étaient livrés à une rixe sanglante.
    Le duc Guido Feltra, maître d’Urbino, était assis au premier rang et discutait à voix basse avec le plus redoutable ennemi d’Alexandre, le cardinal Giuliano Della Rovere, neveu du feu pape Sixte IV et désormais ambassadeur pontifical en France.
    — J’ai l’impression que notre César est plus un soldat qu’un érudit, chuchota Feltra. Ce garçon pourrait faire un grand général, s’il n’était destiné à devenir pape.
    — Un vrai libertin, comme son père ! siffla le cardinal. Un matamore qui combat des taureaux, affronte des paysans à la lutte… C’est indigne !
    — Son cheval vient de remporter le Palio de Sienne.
    — Par la ruse ! Il a ordonné à son cavalier de sauter à bas de sa monture juste avant la fin, pour que l’animal soit plus rapide. Ses adversaires ont protesté, en vain. Guido Feltra, écoutez bien ce que je dis : ce fils de l’Église est un produit du diable.
    Giuliano Della Rovere était désormais l’implacable ennemi des Borgia. Il était furieux, non seulement de ne pas avoir été élu pape, mais aussi de voir qu’Alexandre nommait des cardinaux qui lui seraient tout dévoués. Ne pas assister à la cérémonie qui faisait de César un cardinal demeurait toutefois impensable : Della Rovere pensait trop à son propre avenir.
    La haute silhouette du pape Alexandre VI se dressait devant l’autel, vêtue de blanc. Ses yeux rayonnaient de fierté et de confiance en soi. L’orgue entama un Te Deum triomphant : il s’avança, leva très haut le chapeau de cardinal et, entonnant d’une voix forte une bénédiction en latin, le déposa sur la tête de son fils, agenouillé devant lui.
    César garda les yeux baissés, puis se releva tandis que deux autres cardinaux déposaient la cape pourpre, symbole de sa dignité, sur ses larges épaules. Après quoi, il vint se placer près de son père ; les deux hommes firent face à l’assistance.
    Encore plus grand que son géniteur, César était puissamment bâti, et d’une grande beauté : son long nez aquilin avait la perfection d’une statue, ses grands yeux bruns rayonnaient d’intelligence. Un silence tomba sur la foule.
    Tout au fond de la basilique, un homme très gras, élégamment vêtu de blanc et d’argent était assis au dernier rang. Gaspare Malatesta, le Lion de Rimini, fulminait intérieurement contre ce pape espagnol, qui lui avait envoyé le cadavre d’un jeune homme attaché à un âne. Les menaces papales le laissaient de marbre. Malatesta ne croyait ni à Dieu ni à diable. Alexandre VI n’était qu’un homme, et les hommes meurent. Le Lion se souvint avoir fait verser de l’encre dans les fonds baptismaux, pendant la période de l’Avent, pour que le cardinal tache ses vêtements et se voie un peu rabaissé. Mais lui-même avait désormais plus urgent à faire. Il sourit.
    Derrière lui, Don Michelotto, perdu dans l’ombre, l’observait. Tandis que le Te Deum prenait fin par un crescendo assourdissant, il se glissa sans bruit derrière Malatesta, lui glissa un garrot autour du cou et, d’un mouvement fluide, resserra le nœud.
    Le Lion de Rimini hoqueta, souffle coupé. Il tenta de se débattre mais, privé d’air, ne put que tressauter en vain. Avant que l’obscurité ne l’engloutisse, il eut le temps d’entendre quelques mots chuchotés à son oreille : « Un message du Père éternel.  »
    Puis l’exécuteur se perdit dans la foule aussi vite qu’il avait agi.
    César Borgia suivit son père dans la travée, accompagné de sa mère Vanozza, de sa sœur et de ses deux frères, ainsi que

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