Le secret d'Eleusis
ce que vous me demandez ?
— Vous voulez refaire un petit tour de sous-marin ?
— C’est ça ! Restons ici jusqu’à ce que la police arrive ! À moins que vous n’ayez l’intention d’emmener votre banc et votre seau dans la voiture...
Mikhaïl hésita. Knox n’avait pas tort.
— Je n’arrive pas à joindre votre père, intervint Boris. Il ne répond pas à son numéro de portable.
— Essayez le fixe, dit Mikhaïl.
— C’est ce que j’ai fait, mais il n’y a pas de tonalité.
Zaal jeta un gros paquet de literie par-dessus la mezzanine. La gravité sépara les oreillers et les couvertures des draps blancs, qui tombèrent sur le sol comme de vieux fantômes blessés. L’espace d’une seconde, Mikhaïl revit une image de son enfance : il était debout au-dessus du corps immobile et brisé d’une fille et savait que, cette fois, il était allé trop loin. Il s’approcha de Knox et posa le canon de son fusil contre sa tempe.
— Vous me conduirez jusqu’à la Toison d’or si je lui laisse la vie sauve ? demanda-t-il en montrant Nadia.
— Oui, répondit Knox.
— Vous me donnez votre parole ?
— Oui.
Davit revint avec un seau à chaque main. Les récipients étaient si remplis que leur anse en métal pliait sous le poids d’un liquide épais, qui débordait en répandant une forte odeur.
— J’ai pris l’essence des voitures, annonça-t-il.
— Apportez-en encore, ordonna Mikhaïl. Et versez-en autour de la Ferrari et d’une des deux Mercedes. On va devoir les brûler aussi. On ne gardera que la fourgonnette et la deuxième Mercedes.
— Oui, monsieur.
Mikhaïl balaya la maison du regard en prenant son temps, pour montrer à ses hommes qu’il n’avait pas perdu le contrôle de la situation, ni de lui-même.
— Dix minutes ! annonça-t-il après avoir consulté sa montre. Dix minutes pour terminer et rassembler nos affaires. Ensuite, on y va.
Chapitre 32
I
Mikhaïl sentait les vapeurs d’essence lui monter à la tête, mais il ne se laissa pas gagner par la migraine. Le flegme face au chaos était une vertu qu’il admirait.
— Il faut qu’on y aille, monsieur, déclara Davit en lui tendant une boîte d’allumettes à barbecue. Allez-y !
Mikhaïl jeta un coup d’œil au corps ensanglanté d’Édouard, couché comme un héros tombé sur le champ de bataille au sommet du bûcher de meubles et de draps. Il prit la boîte d’allumettes ; elle était restée dehors trop longtemps et le frottoir, encore humide, était voilé. Après plusieurs tentatives infructueuses, il parvint à enflammer une longue allumette. Il s’accroupit et la posa sur un drap imbibé d’essence. La flamme grandit rapidement en dégageant une chaleur intense. Lorsqu’elle atteignit le milieu du bûcher, où toutes les substances inflammables étaient rassemblées, elle jaillit en formant un immense ballon de feu brûlant, qui fit reculer tous les hommes, sauf Mikhaïl. Seul, comme hypnotisé par ce spectacle, celui-ci regarda son lit partir en fumée.
Il prit son fusil et réfléchit un instant. L’emporter à l’aéroport était trop risqué. S’il devait l’abandonner, autant le détruire pour faire disparaître toutes les preuves. Il le jeta dans les flammes, ainsi que les cartouches restantes. Il récupéra la mallette en acier qui contenait des millions d’euros et alla chercher dans la cuisine un couteau pointu et bien aiguisé.
Dehors, la Ferrari était luisante d’essence. Il frotta une autre allumette ; il avait pris le coup. Il la jeta et regarda avec ravissement l’essence s’enflammer et le cuir brûler en crachant une épaisse fumée noire dans le ciel. Il aimait les belles choses, Mikhaïl, mais il aimait aussi les détruire. Ensuite, il mit feu à la Mercedes, ce qui était déjà moins jouissif... À l’intérieur de la maison, les cartouches se mirent à détoner. Le verre de la fenêtre de toit, aspiré par le vide, se brisa en éclats.
— Boris, appela Mikhaïl, Davit et vous allez prendre la fourgonnette et emmener Knox à l’aéroport.
— Bien, patron, répondit Boris.
— Quand vous serez arrivé, appelez-moi. Je serai dans le secteur avec Zaal et Nadia. Je ne vous en dis pas plus. Allez récupérer la clé avec Knox et retirez la Toison d’or de la consigne. On se retrouve au terminal privé de l’aéroport, si tout se passe bien.
— Et sinon ?
— Vous vous occupez de Knox. Et moi de Nadia.
Mikhaïl se tourna vers
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