Le secret d'Eleusis

c’est tout.
    — Non, vous avez menti, décréta Mikhaïl.
    — Je croyais que vous la vouliez, cette Toison d’or ! Vous allez abandonner uniquement parce que vos hommes ne sont pas foutus de trouver un graffiti sur un arbuste ?
    — Il n’y a pas de graffiti, dit Boris, catégorique.
    — Laissez-moi vous le montrer, implora Knox. Qu’est-ce que vous risquez ? J’ai les mains attachées dans le dos.
    Mikhaïl hocha la tête d’un air pensif.
    — Je voudrais que vous compreniez pleinement la situation, murmura-t-il. Si vous me mentez, vous mourrez et Nadia mourra aussi. Mais ça, vous le savez déjà. Alors permettez-moi d’ajouter ceci : votre petite amie, Gaëlle, mourra également.
    — Non, dit Knox d’une voix faible.
    — Si. Je la trouverai, je la baiserai et je la tuerai. Vous avez ma parole.
    — Elle n’a rien à voir dans tout ça, protesta Knox.
    — Maintenant, si. Grâce à vous. À moins, bien sûr, que vous ne changiez d’avis et admettiez qu’il n’y a pas de clé.
    Knox garda le silence et s’efforça de lutter contre la peur, mais son instinct de survie l’emporta. Tout à coup, il ne lui sembla plus inconcevable qu’il ait regardé Augustin se faire agresser sans réagir. Il était comme ça.
    — Elle est là, proclama-t-il, je le jure !
    — Très bien, alors détachez-lui les jambes, ordonna Mikhaïl à Davit. Et mettez votre veste sur ses épaules. Je ne veux pas qu’on voie ses menottes.
    — Bien, monsieur, dit Davit.
    Mikhaïl et Boris sortirent et firent le tour de la fourgonnette pour aller ouvrir les portes. Knox descendit avec Davit, qui le tenait par l’épaule. Il constata avec étonnement que le crépuscule était déjà là. Autour d’eux, les lampadaires s’allumèrent un à un. Mikhaïl appuya la lame de son couteau contre la cage thoracique de Knox, en direction du cœur.
    — Ne songez même pas à appeler au secours, prévint-il. Vous seriez mort avant de pouvoir reprendre votre respiration.
    Ils longèrent une petite bande de pelouse, entre les voitures stationnées et la haie. Les Géorgiens s’interposèrent entre Knox et les quelques personnes qu’ils croisèrent. Mais les voyageurs ne regardaient pas de leur côté ; ils étaient bien trop occupés. Un homme embrassait sa femme pour lui dire au revoir. Un autre hissait des bagages dans le coffre sa voiture. Mikhaïl enfonçait profondément la pointe de son couteau dans la peau de Knox. Celui-ci sentait même une goutte de sang couler sur son torse. Mais il continuait à marcher. Pendant des années, il avait vu, dans des documentaires télévisés, des prisonniers affamés et à moitié nus se diriger sans broncher vers leur potence. À chaque fois, il s’était demandé comment ces hommes avaient pu aller aussi imperturbablement au-devant de leur propre mort. Pourquoi n’avaient-ils pas combattu, fui, craché au visage de leurs gardes, fait quelque chose, n’importe quoi ? Qu’avaient-ils à perdre de toute façon ? Et maintenant, il faisait la même chose qu’eux. Pis encore, il avait trahi Gaëlle pour prolonger sa propre vie d’une seule minute. Il fit ce constat brutal avec amertume. Puis il ralentit le pas et s’arrêta.
    — C’est ici ? demanda Mikhaïl.

Chapitre 35
    I
    Les symboles gravés sur les différentes stèles correspondaient à certains groupes de symboles figurant au dos du disque de Phaistos. Il n’y avait plus le moindre doute. Seulement, personne n’avait encore déchiffré ce disque. Gaëlle réfléchit une minute ou deux, mais ne parvint à aucune conclusion satisfaisante. Iain aurait peut-être une idée. Elle mit le disque de côté et retourna aux étagères, où elle prit un dossier parmi d’autres. Celui-ci contenait des photos prises dans une grotte. Chacune représentait une niche abritant des offrandes votives, préminoennes à première vue. Dans un deuxième dossier, Gaëlle trouva un compte rendu de fouille concernant une fosse d’environ un mètre de long sur cinquante centimètres de large. Il était complété par des photos archéologiques classiques de tous les artefacts découverts in situ , présentés à côté d’une règle en bois, pour l’échelle, et d’une fiche indiquant une date et un numéro de référence, qui renvoyait sans doute aux boîtes à archives.
    Gaëlle examina le contenu de quelques autres dossiers et tomba sur des photos de l’escarpement rocheux. Elle était sur le point de les remettre à leur