Le secret d'Eleusis
bientôt de tes nouvelles.
— Oui, je ferai tout ce que je...
— Ça fait trente secondes, décréta Sandro en reprenant le téléphone. Maintenant, parlez-moi de ma Toison d’or.
Édouard mit un moment à reprendre ses esprits et à se concentrer.
— Écoutez, nous ne parviendrons jamais à convaincre si nous ne faisons pas bonne impression dès le départ, déclara-t-il. Le scepticisme se répand comme une traînée de poudre. Nous devons être crédibles. Oubliez cette histoire de toison qui se manipule aussi facilement qu’une peau de mouton tout en étant en or massif. C’est trop improbable et trop difficile à réaliser d’un point de vue technique, aussi bien pour nous que pour les Anciens. J’ai une autre idée. Ce sera beaucoup moins spectaculaire, mais bien plus plausible.
— Je vous écoute.
— Les métaux, argent, étain, bronze, cuivre ou fer, étaient des matières premières extrêmement importantes dans l’Antiquité. Ils étaient expédiés dans tout le bassin méditerranéen sous forme de lingots, qui avaient parfois la forme de briques mais aussi de rectangles plats avec de petites saillies à chaque angle, peut-être pour en faciliter le transport. Or, ces lingots plats ressemblaient indéniablement à des peaux d’animaux.
— Ah ! s’exclama Sandro.
— C’est ce que les archéologues appellent les lingots peau de bœuf. En réalité, ceux-ci évoquent davantage une peau de mouton. Ils pouvaient tout à fait être en or. Et si on en retrouvait un en or colchidien...
Sandro réfléchit un instant.
— Je suppose que ça ira, dit-il. Pouvez-vous nous fournir une description détaillée ?
— Il y a des photos de lingots peau de bœuf sur l’Intranet du musée, avec les différentes caractéristiques techniques. Je vous les enverrai par courrier électronique dès que j’aurai accès à un ordinateur.
— Pas la peine. Donnez-moi juste vos identifiants.
Édouard soupira. Avec les Nergadze, on ne pouvait que s’enfoncer davantage. Il fit ce que Sandro lui demandait et rendit le téléphone à Boris. Les boissons commandées arrivèrent. Lorsqu’il prit son café, il constata que sa main tremblait un peu. Il repensa à la conversation qu’il venait d’avoir avec sa femme, à l’homme qu’elle avait mentionné : Nicoloz Badridze ! Il avait espéré ne plus jamais entendre ce nom. Badridze était un pédophile. Après avoir passé vingt ans en prison, il était venu s’installer à Tbilissi, dans un immeuble situé non loin de celui d’Édouard. Celui-ci n’avait pas supporté l’idée qu’un tel monstre puisse vivre à proximité de ses jumelles. Sa femme et lui avaient décidé de vendre leur appartement et de déménager. Et ils s’étaient sentis mortellement coupables, car ils n’avaient rien dit aux acheteurs, qui avaient une petite fille. Depuis lors, ils n’avaient plus jamais prononcé le nom de Badridze.
Jusqu’à aujourd’hui.
Édouard se pencha en avant jusqu’à ce que le bord de la table lui comprime la poitrine comme s’il était sur le point de faire une crise cardiaque. Ilya Nergadze avait fait du cheval avec Kiko en le tenant par le bras... Soudain, Édouard réentendit Ilya lui dire que son fils était charmant ; puis il revit le beau steward androgyne qui servait le Champagne dans l’avion. À quels périls avait-il exposé son fils ?
Et surtout, qu’allait-il pouvoir faire pour le sortir de là ?
Chapitre 18
I
Pendant que Iain faisait le plein, Gaëlle se dirigea vers la station-service pour payer l’essence.
— C’est pour moi, annonça-t-elle lorsqu’il la rejoignit. Je vous dois déjà tant.
— Merci.
Iain sortit néanmoins quelques pièces pour acheter un paquet de bonbons à la menthe.
— J’ai mal à la gorge, expliqua-t-il. Je n’ai pas l’habitude de parler autant !
— Alors, c’est pour moi aussi. Vous ne parleriez pas si je ne vous posais pas de questions.
— Vous me gâtez...
— Vous n’obtiendrez pas davantage !
Ils rirent de bon cœur et retournèrent à la voiture. Iain versa une partie du paquet entre les deux fauteuils. Puis il prit un bonbon et le serra entre son pouce et son index jusqu’à ce qu’il jaillisse de son emballage pour atterrir directement dans sa bouche.
— Où en étions-nous ? demanda-t-il.
— Vous veniez de me prouver que l’Atlantide était la Crète minoenne, répondit Gaëlle.
— Ah ! le scepticisme a toujours été le meilleur
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