Le secret d'Eleusis
rompu par une salve d’applaudissements. Knox n’avait jamais rien entendu de tel à un congrès aussi formel. Une femme se leva, puis un homme, quelques groupes de personnes ici et là, et soudain tout l’auditorium se mit à applaudir debout. Knox savait que cette reconnaissance ne s’adressait pas à lui, mais à Augustin, pour tout le travail que celui-ci avait effectué à Alexandrie, dans l’ombre, pendant des années. C’était une façon pour toutes les personnes présentes de montrer qu’elles ne croyaient pas un seul instant aux accusations portées contre Augustin.
Nico rejoignit Knox sur le podium.
— Cela ne va pas être facile de passer après vous, murmura-t-il avec une morosité feinte.
Knox sourit et fit un signe de tête en direction du cadreur.
— Vous faites des enregistrements ? s’enquit-il.
— Bien sûr, vous en voulez un ?
— Pas pour moi, mais je pense que Claire sera heureuse de voir que le travail d’Augustin a déclenché un tel enthousiasme.
— Bonne idée ! Je m’en occupe personnellement.
— Merci.
Les applaudissements ne faiblissaient pas. Knox en profita pour suggérer à Nico de dresser la liste des absents de la veille et de la confronter à celle des experts au courant de la découverte de Petitier.
— J’y ai déjà pensé, déclara Nico, mais ils étaient tous présents, à part Augustin. Et Antonius, bien sûr.
— Antonius ?
— C’est un ancien collègue de l’université, un expert en écritures anciennes. C’est pour cette raison que je l’avais contacté, mais il ne risquait pas de venir jusqu’ici. Il vit en reclus et ne quitte pratiquement jamais sa maison.
— Même pour un congrès comme celui-ci ? insista Knox.
— Oui, répondit Nico.
Il semblait néanmoins songeur.
— Vous croyez que je devrais l’appeler ? demanda-t-il.
— Pourquoi pas ?
— Je le ferai tout à l’heure.
Nico se tourna vers l’auditoire et les applaudissements finirent par décroître.
— Acceptez-vous de répondre à quelques questions ? demanda-t-il à Knox.
— À quelques-unes mais, ensuite, il faudra vraiment que je retourne à Athènes.
Chapitre 19
I
Iain et Gaëlle remontèrent dans les montagnes et traversèrent plusieurs villages pittoresques, avant de tourner à gauche en direction de Plakias. Les flancs rocheux de la gorge de Kourtaliotiko se dressaient au-dessus d’eux et donnaient le vertige à Gaëlle à chaque fois quelle levait les yeux. Au loin, un mur blanchi à la chaux témoignait de l’incapacité des Grecs à franchir un sommet sans y construire une église. La Mustang sortit de la gorge, au grand soulagement de Gaëlle, mais s’engagea presque aussitôt sur une route étroite et sinueuse, à flanc de montagne. La chaussée était jonchée de pierres et de rochers éboulés.
— Quelle horreur ! murmura Gaëlle, tandis que Iain slalomait avec désinvolture entre les obstacles en s’approchant dangereusement du bord. Il y en a beaucoup, des routes comme celle-ci ?
— Des tas, répondit Iain en souriant. Les plaques tectoniques africaine et européenne se sont heurtées juste au-dessous de nous. L’île tout entière est le résultat de cette rencontre. Les gorges se sont créées lorsque la poussée a fait éclater la croûte terrestre.
— Comme lorsqu’on rompt une baguette ?
— En quelque sorte.
La route continua son parcours tortueux. Quelques maisons s’étaient accrochées avec détermination aux versants abrupts, tels des alpinistes qui se seraient aventurés trop loin et auraient gelé sur place. La chaussée était étroite et en mauvais état ; heureusement, la circulation était rare. Lorsqu’ils eurent dépassé le village de Frangocastello et le petit port d’Hora Sfakion, Iain et Gaëlle atteignirent une plaine côtière, puis gravirent une nouvelle route de montagne, si raide qu’elle ressemblait à un spaghetti jeté contre un mur. Les virages en épingle à cheveux étaient de plus en plus ardus. Gaëlle commença à avoir la nausée et des crampes dans les pieds. Iain ne semblait pas du tout avoir le vertige. Il prenait les virages avec une sérénité nonchalante, bien que les pneus ne cessent de déraper sur l’asphalte poussiéreux pour les entraîner au plus près du gouffre.
— S’il vous plaît, supplia Gaëlle. J’ai le vertige.
— Ne vous inquiétez pas, la rassura Iain. Je prends ces routes régulièrement.
— S’il vous plaît,
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