Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le seigneur des Steppes

Le seigneur des Steppes

Titel: Le seigneur des Steppes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Conn Iggulden
Vom Netzwerk:
traduisant, Ho Sa donna à Chen Yi un peu plus de temps
pour répondre et le petit homme lui adressa un regard reconnaissant.
    — Il a fallu mille heures de travail pour le fabriquer,
seigneur. J’ai du plaisir à le regarder.
    Gengis fit tourner le pot dans ses mains. Il avait l’air
déçu et Chen Yi se tourna de nouveau vers Ho Sa qui, d’un haussement de
sourcils, l’incita à poursuivre.
    — Mais ce n’est pas cela la richesse, seigneur, reprit
Chen Yi. J’ai eu faim, je connais la valeur de la nourriture. J’ai eu froid, j’apprécie
la chaleur.
    — Un mouton aussi, répliqua Gengis. As-tu des fils ?
    — J’ai trois filles. J’ai perdu mon fils.
    — Alors, qu’est-ce que la richesse ?
    Ne sachant où le khan voulait en venir, Chen Yi répondit
franchement :
    — Pour moi, c’est la vengeance. La possibilité de
frapper mes ennemis. Avoir des hommes qui tuent et qui meurent pour moi, voilà
ma richesse. Mes filles et mon épouse, voilà ma richesse.
    Avec douceur, il prit le pot des mains de Gengis et le
laissa tomber. L’objet précieux se brisa en petits morceaux sur le parquet.
    — Tout le reste est sans valeur.
    Gengis eut un bref sourire. Khasar avait raison : Chen
Yi n’était pas un homme qu’on pouvait aisément intimider.
    — Je crois que si j’étais né dans une ville, j’aurais
peut-être mené la même vie que toi. Mais je n’aurais pas fait confiance à mes
frères, je les connais trop bien.
    Chen Yi ne répondit pas qu’il n’avait fait confiance qu’à
Khasar mais Gengis parut deviner ses pensées.
    — Khasar a bonne opinion de toi. Je ne reviendrai pas
sur sa parole, donnée en mon nom. Baotou est à toi. Ce n’est pour moi qu’une
étape vers Yenking.
    — J’en suis heureux, seigneur, dit Chen Yi, frémissant
presque de soulagement. Accepteras-tu une coupe d’alcool de riz ?
    Gengis acquiesça et la tension quitta la pièce. Ho Sa se
détendit pendant que Chen Yi cherchait machinalement un serviteur du regard et
n’en trouvait pas. Il apporta lui-même des coupes en écrasant sous ses sandales
les tessons d’une poterie inestimable qui avait autrefois embelli le palais d’un
empereur. D’une main un peu tremblante, il remplit trois coupes et, alors
seulement, Gengis s’assit. Ho Sa l’imita en faisant grincer son armure, inclina
brièvement la tête quand son regard croisa à nouveau celui de Chen Yi, comme
pour lui signifier qu’il avait réussi une sorte d’épreuve.
    Chen Yi avait conscience que le khan n’aurait pas perdu son
temps à s’asseoir chez lui s’il ne voulait pas quelque chose. Il observa le
visage sombre et aplati de Gengis en lui présentant une coupe et se rendit
compte que le Mongol était lui aussi mal à l’aise et semblait chercher ses mots.
    — Baotou doit te sembler bien petite, seigneur, hasarda-t-il.
    Gengis but une gorgée, marqua une pause pour savourer un
goût nouveau.
    — Jusqu’ici, je n’ai pénétré dans une ville que pour la
brûler. En voir une aussi tranquille est étrange pour moi.
    Il vida sa coupe et la remplit lui-même, tendit la bouteille
à Chen Yi et à Ho Sa.
    — Une encore et c’est tout, dit Chen Yi. Je veux garder
les idées claires, cet alcool est fort.
    — C’est de la pisse de cheval, grogna Gengis, mais j’aime
la façon dont il chauffe le gosier.
    — J’en ferai envoyer cent bouteilles à ton camp.
    Le chef mongol regarda Chen Yi par-dessus le bord de sa
coupe.
    — Tu es généreux.
    — C’est peu de chose en échange de ma ville natale.
    Gengis parut enfin se détendre.
    — Tu es un homme intelligent, Chen Yi. D’après Khasar, tu
dirigeais déjà Baotou quand les soldats y étaient.
    — Il a peut-être exagéré un peu. Mon autorité est forte
parmi les couches inférieures : les matelots, les marchands. Les nobles
vivent dans un autre monde et j’avais rarement l’occasion de limiter leur
pouvoir.
    — Tu les hais, ces nobles ?
    La question n’était pas innocente et Chen Yi pesa
soigneusement sa réponse. Faute de trouver les mots adéquats dans la langue des
tribus, il se rabattit sur la sienne et Ho Sa traduisit.
    — La plupart d’entre eux évoluent dans un monde si
éloigné du mien que je ne pense même pas à eux. Leurs juges prétendent
appliquer les lois de l’empereur mais ils ne s’en prennent jamais aux nobles. Si
je vole, je peux avoir la main tranchée ou être fouetté à mort. Si un noble me
vole, justice ne sera pas rendue.

Weitere Kostenlose Bücher