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Le seigneur des Steppes

Le seigneur des Steppes

Titel: Le seigneur des Steppes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Conn Iggulden
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bout de vingt-quatre heures seulement,
la puanteur était terrible, l’air infesté de mouches qui grésillaient dans la
fumée brûlante des feux.
    Un peu à l’écart, Gengis attendait ses généraux. Il voulait
voir la ville qui avait envoyé une telle armée contre lui. Kachium et Khasar le
rejoignirent sur leurs chevaux, se retournèrent pour regarder une fois de plus
le champ de bataille baigné de sang. Les feux projetaient des ombres
tremblotantes sur les parois rocheuses et les guerriers enfin apaisés
chantaient à voix basse pour leurs morts.
    Les trois frères attendirent en silence qu’approchent au
trot les officiers que le khan avait fait mander. Süböteï s’avança le premier, pâle
et fier, de vilaines estafilades noires courant le long de son bras gauche. Puis
vinrent Jelme et Arslan, silhouettes sombres, et enfin Ho Sa et Lian, le maître
maçon. Seul Temüge était resté derrière pour installer le camp au bord d’une
rivière distante d’une trentaine de lis au nord. Les feux continueraient à
brûler quelques jours encore, sans personne pour les alimenter. Les mouches
étaient de plus en plus nombreuses et Temüge ne supportait plus ni leur
bourdonnement continu ni l’odeur pestilentielle des corps en décomposition.
    Gengis n’arrivait pas à détacher son regard de la plaine. C’était
la mort d’un empire qu’il avait sous les yeux, il en était certain. Jamais
auparavant il n’avait frôlé d’aussi près la défaite et l’anéantissement. La
bataille de la passe avait laissé son empreinte sur lui, il savait qu’il lui
suffirait de fermer les yeux pour la revivre. Huit mille de ses hommes avaient
été enveloppés de draps blancs et portés dans la montagne. Il leva les yeux
vers l’endroit où ils gisaient dans la neige, comme des doigts décharnés, tout
là-haut. Déjà les faucons et les loups déchiraient leur chair. Il avait retardé
son départ uniquement pour assister à leurs funérailles et leur rendre hommage,
ainsi qu’à leurs familles.
    — Temüge s’occupe du camp, dit-il à ses généraux. Allons
voir Yenking et son empereur.
    Il donna du talon dans les flancs de son cheval, qui bondit
en avant. Les autres le suivirent, comme toujours.
     
     
    Bâtie sur une vaste plaine, Yenking était de loin la plus
imposante ville qu’aucun d’eux eût jamais vue. En la voyant grandir devant lui
à mesure qu’ils approchaient, Gengis se rappela les mots de Wen Chao, l’émissaire
jin qu’il avait rencontré des années plus tôt et selon qui ses compatriotes
étaient capables d’édifier des villes pareilles à des montagnes. Yenking en
était la démonstration.
    Ses murs de pierre gris sombre s’élevaient d’au moins cinquante
pas de la base au sommet. Gengis envoya Lian et Ho Sa en parcourir le périmètre
pour compter les tours en bois, qui montaient encore plus haut. À leur retour, ils
avaient fait plus de dix-huit lis et dénombré près d’un millier de tours
hérissant les murailles comme des épines. Plus stupéfiante encore fut leur
description des sortes d’arcs géants installés sur les remparts.
    Aux coins de l’immense rectangle, quatre forts se dressaient,
séparés des murailles par des douves et ceints d’un autre mur extérieur. Seule
brèche dans cette forteresse, un large canal coulait à travers une grille en
fer protégée par des plates-formes pour les archers et les catapultes. La voie
d’eau s’étirait vers le sud aussi loin que portait le regard. Tout en Yenking
était à une échelle qui défiait l’imagination et Gengis n’entrevoyait pas même
comment en forcer l’accès.
    Le khan et ses généraux s’en étaient approchés autant que de
Yinchuan ou de quelques autres villes jin de l’Ouest quand un coup de marteau
claqua dans l’air du soir. Une tache sombre passa au-dessus d’eux et son
souffle fit chanceler le cheval de Kachium. Gengis faillit tomber de sa selle
lorsque sa monture se cabra et vit, éberlué, un poteau à demi enfoncé dans le
sol meuble, plutôt un tronc d’arbre lisse qu’une flèche.
    Sans un mot, Gengis et ses généraux reculèrent pour se
mettre hors de portée de l’arme redoutable, le moral encore plus bas. Approcher
à moins de cinq cents pas des murailles, c’était s’offrir comme cibles à d’autres
poteaux à pointe de fer. La seule idée des ravages qu’un seul de ces
projectiles pouvait causer dans la masse de ses cavaliers était terrifiante. Le
khan se tourna vers

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