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Le seigneur des Steppes

Le seigneur des Steppes

Titel: Le seigneur des Steppes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Conn Iggulden
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contorsions outragées, ils avaient repris leur vie
habituelle, presque avec soulagement. Les habitants de la ville savaient
seulement que le Fils du Ciel avait quitté son enveloppe charnelle et ils se
lamentaient dans les rues, hébétés de chagrin.
    En revanche, le jeune fils de l’empereur n’avait pas versé
une larme en apprenant la disparition de son père. À cet égard au moins, Wei
avait bien préparé sa famille. La mère de l’enfant était assez intelligente
pour savoir que toute protestation entraînerait sa mort et elle était restée
silencieuse pendant les funérailles, regardant, pâle et belle, le corps de son
époux se consumer. Lorsque le bûcher funéraire s’était écroulé dans un
craquement, Zhu Zhong avait cru sentir sur lui le regard de la veuve, mais
quand il avait levé les yeux, elle avait la tête baissée en signe de soumission
à la volonté des dieux. À sa volonté à lui, avait-il pensé, mais cela revenait
à peu près au même.
    Le général grinçait des dents d’agacement en parcourant la
salle. D’abord les funérailles avaient duré plus qu’il ne l’aurait cru possible
et on lui avait ensuite annoncé que le couronnement prendrait cinq jours. C’était
exaspérant. La cité était en deuil, personne ne travaillait alors que des
événements autrement importants se déroulaient à l’extérieur. Zhu Zhong avait
dû supporter les essayages interminables de tuniques neuves indiquant son rang
de régent. Il avait même écouté sans broncher tandis que ses ministres lui
donnaient nerveusement lecture de ses nouvelles responsabilités. Pendant ce
temps, les Mongols rôdaient tels des loups aux portes de la ville.
    Il était plusieurs fois monté à divers endroits des
murailles pour observer les barbares crasseux qui s’installaient sur les terres
impériales. Il avait parfois l’impression de sentir l’odeur rance de leurs
moutons et de leur lait de chèvre portée par le vent. C’était rageant d’avoir
été battu par des gardiens de troupeaux, mais ils ne prendraient pas Yenking. Les
empereurs successifs avaient bâti cette ville pour montrer leur pouvoir, elle
ne tomberait pas facilement.
    Il lui arrivait encore, la nuit, d’avoir des cauchemars dans
lesquels les Mongols le pourchassaient, leurs flèches bourdonnant à ses
oreilles tels des moustiques. Qu’aurait-il pu faire d’autre ? Nul ne les
aurait crus capables d’escalader les montagnes pour le prendre à revers. Zhu
Zhong n’avait plus honte de sa défaite. Les dieux avaient été contre lui et lui
avaient cependant livré la ville en qualité de régent. Il regarderait les
barbares fracasser leur armée contre les murailles de Yenking, et lorsqu’ils
seraient vaincus, il couperait la tête de leur khan et la jetterait dans la
fosse d’aisances la plus profonde de la ville.
    Cette pensée égaya un peu son humeur tandis qu’il attendait
l’arrivée du jeune empereur. Quelque part, au loin, des gongs résonnèrent, annonçant
la présence d’un nouveau Fils du Ciel. Les portes de la salle du couronnement s’ouvrirent
sur le visage transpirant de Ruin Chu, le Premier ministre.
    — Seigneur régent ! s’exclama-t-il en découvrant
Zhu Zhong. Vous ne portez pas votre tunique ! Sa Majesté impériale sera là
d’un instant à l’autre !
    Il semblait au bord de l’effondrement, après des journées
passées à organiser les funérailles et le couronnement. Zhu Zhong trouvait le
petit homme grassouillet agaçant et il savoura d’avance l’effet que sa réponse
aurait sur lui :
    — Je l’ai laissée dans mes appartements. Je n’en aurai
pas besoin aujourd’hui.
    — Tous les détails de la cérémonie ont été réglés. Vous
devez…
    — N’utilisez pas ce verbe pour moi, répliqua Zhu Zhong.
Faites venir le garçon, placez-lui une couronne sur la tête. Chantez, psalmodiez,
allumez des bâtonnets d’encens, tout ce que vous voudrez, mais si vous me dites
encore ce que je dois faire, vous aurez la tête tranchée.
    Médusé, le ministre le regarda puis baissa les yeux en
tremblant. Il savait que Zhu Zhong avait assassiné l’empereur. Le général était
une brute, un traître qui n’hésiterait pas à verser le sang le jour même du
couronnement. Il s’inclina en reculant vers les portes. Zhu Zhong entendit la
procession avancer lentement et attendit en silence que le ministre la rejoigne.
    Lorsque les portes se rouvrirent, la peur minait
manifestement l’entourage du

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