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Le soleil d'Austerlitz

Le soleil d'Austerlitz

Titel: Le soleil d'Austerlitz Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Max Gallo
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qui me succéderont .
    Mais de quoi puis-je être sûr ?
    Tout cela durera-t-il après moi ?
     
    Le lendemain matin, 19 mai 1804, il entend Constant pousser la porte de la chambre.
    — Quelle heure est-il ? Quel temps est-il ? demande-t-il comme chaque matin.
    — Sire, sept heures, beau temps.
    Sire . Le premier matin.
    Il pince l’oreille de Constant.
    — Monsieur le drôle, murmure-t-il.

26.
    Napoléon attend avec impatience la fin du dernier acte. On ne connaît le sort d’une pièce, dit-il à Fouché, que lorsque le rideau est tombé sur l’ultime réplique. Et le procès du général Moreau, de Cadoudal et de ses complices vient juste de commencer, ce 25 mai 1804. Peut-on faire confiance aux juges ? Il lit les rapports de police. Thuriot, le juge instructeur, est sûr. Il a été membre du Comité du salut public. Mais que penser du juge Lecourbe, dont le frère, général, a été proche de Moreau ? Et de quelles sympathies dispose encore ce dernier dans l’armée ?
    Chaque soir, Napoléon se fait apporter le compte rendu des audiences. Il n’aime pas l’atmosphère de la salle telle que la décrivent les espions de police. Il s’indigne. De nombreux officiers viennent en civil soutenir Moreau. Ils ne respectent pas la consigne qui a été édictée afin de les retenir dans les cantonnements. Les premiers bancs sont occupés par des aristocrates venues des salons du faubourg et qui se pâment quand Cadoudal ou Armand de Polignac répondent avec arrogance ou ironie aux questions, ou bien quand Picot, le domestique de Georges, affirme qu’il a été torturé, qu’on lui a serré les doigts dans un chien de fusil.
    Napoléon s’emporte. Quelle est cette comédie ? !
    Quand il descend au salon, les soupirs de Joséphine et de Mme de Rémusat l’accueillent. Elles plaident avec leurs mimiques et leurs larmes, qui pour Polignac, qui pour Bouvet de Lozier.
    Il a envie de s’écrier : « C’est moi qu’on voulait poignarder ! »
    Un soir, la fureur le saisit. Le général Lecourbe, en civil, a soulevé dans ses bras, en pleine salle du tribunal, le fils de Moreau et a crié : « Soldats, voilà le fils de votre général ! » Et les militaires se sont mis au garde à vous. Que Moreau eût eu un peu de cran, et le tribunal était balayé et les prisonniers libres !
    Est-il possible que la pièce se termine ainsi ? !
     
    Fouché se présente à Saint-Cloud, où Napoléon attend le verdict.
    De quel côté penche Fouché ?
    Napoléon lui tend un courrier. C’est une déclaration de Louis XVIII qui dénonce « l’usurpateur Bonaparte ». Mais pas seulement. Lisez, lisez donc, Fouché. Louis XVIII condamne tous les actes illégaux commis depuis les États généraux de 1789. Ce sont eux, à entendre le frère de Louis XVI, qui ont plongé la France et l’Europe dans une crise effrayante.
    Fouché est impassible comme à son habitude. Il dit ce que Napoléon ressent. Que bien des généraux, même devenus des maréchaux, souhaitent l’acquittement de Moreau. Moncey dit même qu’il n’est pas sûr de la gendarmerie.
    — Un acte de clémence en imposera plus que les échafauds, conclut Fouché.
    — Qu’on les condamne, répond Napoléon, et le droit de grâce pourra s’exercer.
    Le 10 juin au soir, le verdict tombe. Cadoudal, Armand de Polignac et Rivière sont condamnés à mort. Et Moreau à deux ans de prison.
    Deux ans !
    Napoléon gesticule. Il insulte le juge Lecourbe.
    — Juge prévaricateur ! crie-t-il.
    Selon la loi, Moreau méritait la peine capitale. Mais les juges ont eu peur.
    — Ces animaux, dit-il, me déclarent que Moreau ne peut se soustraire à une condamnation capitale, que sa complicité est évidente, et voilà qu’on me le condamne comme un voleur de mouchoir.
    Il continue de crier, donne des coups de pied dans les chaises.
    — Que voulez-vous que j’en fasse ? le garder ? Ce serait encore un point de ralliement.
    Il se maîtrise. Il se souvient du vers de Cinna qu’il a tant de fois récité : « Je suis maître de moi comme de l’univers. »
    — Qu’il vende ses biens et qu’il quitte la France, dit-il. Qu’en ferais-je au Temple ? J’en ai assez sans lui.
     
    Dans la matinée du 11 juin, il est au travail dans son cabinet en compagnie de Talleyrand.
    Il écoute le ministre lui faire part des réactions des puissances à l’exécution du duc d’Enghien. La cour du tsar a pris le deuil à l’annonce de la nouvelle.
    — Le deuil !
    Napoléon, d’un geste

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