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Le souffle de la rose

Le souffle de la rose

Titel: Le souffle de la rose Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Andrea H. Japp
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circonstances qui m’ont
poussé à solliciter votre aide. Surtout, je vous serai reconnaissant sur mon
âme de n’avoir pas hésité à me l’offrir en dépit de votre devoir d’obéissance à
votre ordre.
    — Francesco, Francesco... Quel bonheur aussi de vous
considérer devant moi. Quant à mon aide, elle n’est que le reflet de l’amitié
et de l’estime que je vous porte depuis toujours. Eustache vous considérait
comme un fils, je vous considère donc comme mon jeune frère. Nulle requête de
votre part ne pouvait être entachée de vilenie, aussi n’ai-je pas hésité une
seconde à vous servir lorsque votre courte missive me parvint, pas plus que mon
frère de robe Anselme.
    Jean s’interrompit lorsque maître Bobinoir posa devant lui
un gobelet de bière mousseuse. Il remercia l’homme d’un petit hochement de tête
aimable et attendit qu’il se soit écarté pour reprendre d’un ton de confidence :
    — Quant à l’obéissance que je dois à mon ordre, elle n’étouffera
jamais celle que j’offre à Dieu. Ne croyez pas, cher Francesco, que nous soyons
tous aveuglés par notre volontaire soumission aux règles, ne croyez pas qu’elle
nous prive de notre réflexion. Nombre d’entre nous, dominicains et
franciscains, s’interrogent sur le tour sanglant qu’a pris l’Inquisition. Ce
qui commença comme une volonté de conviction est devenu atroce férocité. La
défense de la foi est une chose, la violence coercitive en est une autre et
elle défigure les Évangiles.
    — Benoît XI voulait museler l’Inquisition.
    Jean de Rioux le considéra avec étonnement et s’enquit :
    — Et revenir ainsi sur la bulle ad Extirpanda d’Innocent
IV ?
    — En effet.
    — Le risque politique était considérable.
    — Benoît ne l’ignorait pas.
    — Une rumeur court, qui tente de faire accroire qu’un
saignement bien naturel de ventre l’aurait emporté, précisa Jean de Rioux.
    — Il fallait s’y attendre... Il a pourtant été
assassiné, par des figues empoisonnées, rectifia le chevalier, débarrassant les
tenants de l’Église impériale d’un gênant réformateur, et privant la chrétienté
d’une de ses plus belles âmes.
    Ils burent quelques gorgées en silence, puis le dominicain
reprit d’un ton presque inaudible :
    — Mon frère, ce que vous me dites ajoute à l’angoisse
que je ressens sans parvenir à la définir. Quelque chose se déploie dont la
véritable nature m’échappe. Quelque chose qui dépasse très largement un procès
de complaisance contre rémunération. Florin se sent invulnérable, et ce ne
serait pas le cas si son seul intérêt était une bourse remise par ce paltoquet
de baron ordinaire.
    — Vous en êtes arrivé à la même conclusion que moi, et
je pense pouvoir mettre un nom et un visage sur cette grande ombre.
    — Qui ?
    — Le camerlingue Honorius Benedetti.
    — Vous n’insinuez tout de même pas qu’il serait à l’origine
du décès soudain de notre doux et regretté Benoît XI ?
    — J’en suis presque certain, même si les preuves me
font défaut, et que je doute de les réunir un jour.
    Ils se séparèrent une heure plus tard, en haut des marches
qui menaient au débit de vin. Jean avait relaté à Leone les interrogatoires de
madame de Souarcy auxquels il avait assisté, et cela dans le moindre détail. L’ignoble
pitrerie des accusations ne faisait aucun doute selon lui ; la
malhonnêteté du procès, non plus. Jean avait insisté sur le rôle de la fille d’Agnès.
    Il fallait agir vite. Les interrogatoires préalables ne
dureraient plus longtemps, surtout depuis que le témoin crucial de Florin, la
fielleuse mais bien sotte Mathilde de Souarcy, s’était si petitement comporté
devant les juges.
    Ils se serrèrent les mains avant de se séparer, et Jean
retint celles de Leone. Celui-ci hésita à peine puis demanda :
    — Jean, mon ami, pensez-vous comme Eustache et moi-même
que nul sacrilège ne se peut commettre dans la défense de la Lumière ?
    — C’est ma conviction profonde, et vous me blesseriez d’en
douter, murmura le dominicain avec gravité.
    Leone lui tendit un mince paquet de toile en recommandant :
    — Ne l’ouvrez pas en ces lieux, mon frère. Il contient
votre passe-droit et sans doute la survie de madame de Souarcy. Une note l’accompagne.
Si vous jugiez... Enfin, ce que cette note suggère peut vous mettre en danger,
et je m’en voudrais de...
    Un mince sourire éclaira le

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