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Le souffle du jasmin

Le souffle du jasmin

Titel: Le souffle du jasmin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gilbert Sinoué
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volant. Au moment où il démarrait, une balle fracassa la
lunette arrière. S'en servant comme meurtrière, l'un des Palestiniens y glissa
son Mauser, prêt à tirer sur d'éventuels poursuivants. Personne. Les habitants
du kibboutz avaient sans doute préféré maîtriser l'incendie
plutôt que de s'engager dans une course-poursuite stérile. Latif appuya à fond
sur l'accélérateur la Humber bondit.
    Après un
moment, Abd el-Kader demanda :
    – Y a-t-il
un blessé parmi vous ?
    – Moi,
répondit une voix à l’arrière.
    Celui qui
venait de s'exprimer ôta sa cagoule et ajouta :
    – Ce n'est
rien. Une balle dans la cuisse. Je...
    –
Toi ? Toi ici.
    Latif,
qui, dans le rétroviseur, venait de reconnaître son cousin, faillit perdre le
contrôle de la voiture.
    Abd
el-Kader s'écria à son tour :
    –
Soliman. ?
    – En chair
et en os.
    – Comment
diable as-tu fait pour arriver au kibboutz ?
    – Peu
importe, dit le « poète », en étouffant un cri de douleur.
    Abd
el-Kader retira à son tour sa cagoule, laissant apparaître un visage livide.
    –
Personne ! Tu m'entends ? Personne ne désobéit à mes ordres ! Tu es un inconscient. Tu aurais pu provoquer
un désastre !
    – Tout
s'est bien passé, non ?
    – On
aurait dû t'enfermer ! pesta Latif.
    –
Peut-être. Mais, malgré mes lunettes, j'ai tout de même réussi à faire sauter
l'un des projecteurs.
    – On s'en
fout !
    Un silence
glacial s'installa jusqu'à leur arrivée devant la maison de pierre où ils s'étaient réunis la veille.
    Les deux
autres voitures déboulèrent presque au même moment.
    On fit le
compte des blessés. Quatre. Dont deux grièvement touchés. Un mort. Abd el-Kader
envoya un homme avec un véhicule quérir un médecin de confiance et s'approcha
de Soliman qu'on venait d'allonger sur une dekka [93]
    – Rends
grâce à Dieu. Tu as eu beaucoup de chance.
    Il
répéta :
    – Tu as eu beaucoup de chance...
    Sol iman ne fit aucun commentaire.
    Jamais il n’avait eu aussi
peur de sa vie.

 
     
     
     
     
     
     
     
     
     

Huitième partie
     
     

 
     
     
     
25
     
     
     
     
    Toutes les rivières de l ’ univers ne peuvent apaiser la soif de justice d ’ un homme.
    Saadi.
     
     
    Haïfa, janvier
1938
     
     
    À des milliers de kilomètres de là, une averse ridait
les eaux de la Tamise et la pluie crépitait sur les vitres du Foreign Office.
    – L'ennui, monsieur, déclara Marc Wyndham, c’est que
nous n'avons pas beaucoup de gens qui parlent l’arabe.
    – Ah, quelle grande perte que celle de Lawrence !
acquiesça son interlocuteur, sir Robert Anthony Eden, premier comte d'Avon et,
depuis trois ans, secrétaire d'État au Foreign Office.
    Eden était assis à son bureau, son directeur des
Affaires orientales debout devant lui, aussi raide que s'il se tenait au
garde-à-vous.
    Wyndham ne releva pas les regrets de son chef ; il
lissa brièvement du bout de l'index sa moustache grisonnante, impeccablement cirée.
Lawrence était mort trois ans auparavant, dans un accident de moto, dégoûté de
la politique anglaise et humilié d'avoir contribué à
une trahison.
    – Mais ne peut-on trouver quelqu'un qui nous porte de la
sympathie parmi tous ces gens, en Irak, en Égypte, en Syrie, que sais-je ?
Quelqu'un qui aurait de l'influence sur tous ces agités.
    – S’il nous porte de la
sympathie, monsieur, il n’aura pas d'influence.
    – Même pour de
l'argent ?
    Wyndham se raidit un peu plus.
    – Jusqu'ici, monsieur, l'argent ne nous a servi qu’à acheter du
renseignement. Je doute qu'un homme possédant véritablement de l'ascendant sur
les Arabes, si tant est qu'il existe accepterait de considérer une telle
proposition.
    – Pourquoi ?
    – Parce que, monsieur, ce serait à nos yeux qu'il se déconsidérerait.
    L'argument cloua Eden.
    – Vous ne croyez donc pas que la partition de la Palestine mettra fin à l'agitation dans la région ?
    – La Palestine s'avérant la plus grande pomme de discorde, je crains,
au contraire, monsieur, que la partition n'attise au maximum la rancœur arabe. Et pour longtemps.
    – Nous serions donc voués à être détestés
dans cette partie du monde ?
    Wyndham se demanda si le secrétaire d'État lisait vraiment les
communiqués qu’il lui soumettait ; il prit son temps pour répondre :
    – Nous sommes des occupants, Monsieur. À leurs yeux, des impérialistes.
    – Nous nous montrons pourtant discrets, que je sache.
    Wyndham, qui connaissait

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