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Le souffle du jasmin

Le souffle du jasmin

Titel: Le souffle du jasmin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gilbert Sinoué
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Nidal et
Dounia, avait démissionné du poste de premier secrétaire aux Affaires
orientales et, sous les couleurs du parti radical socialiste, s'était porté
candidat lors des élections législatives dans la circonscription des Hauts-de-Seine.
Il avait été élu avec un score des plus honorables. Si, dans les coulisses, il
demeurait un personnage incontournable dès qu’il était question
de l'Orient, il n'exprimait plus l'opinion du gouvernement, mais la sienne. Une
indépendance, qui n'allait pas sans frictions avec ses collègues ; la
politique n'a jamais apprécié les francs-tireurs.
    Il mit la dernière main à la note qu’il destinait à Joseph
Paul-Boncour, le tout nouveau ministre des Affaires étrangères, la signa et
consulta sa montre de gousset : 19 heures ! Il avait promis à Dounia
de l'emmener au théâtre. Il récupéra en toute hâte son imperméable et marcha
vers la porte. Au moment où il allait sortir, Marie Weil, qu'il avait conservée
comme secrétaire, lui barra le passage. Essoufflée, les traits blêmes, elle
semblait sur le point de défaillir.
    – C 'est une catastrophe,
monsieur, une catastrophe.
    – Quoi donc ?
    Elle s’éclaircit la gorge
et reprit son souffle.
    – La Wehrmacht a franchi la frontière austro-allemande.
    – Quoi ?
    – Oui, monsieur.
    – Quand ?
    – II y
a quelques
heures.
    – Ce… ce n’est pas possible.
    – C'est pourtant confirmé.
    Comment les Autrichiens ont-ils
réagi ?
    – Il n'y a
pas eu d'opposition. La population a accueilli les troupes allemandes par des
acclamations et des fleurs. Il semble qu'à leurs yeux ce ne soit qu'un Anschluss . Un rattachement naturel à
l'Allemagne.
    Jean-François
peinait à respirer. Ainsi, faisant fi des termes du traité de Versailles
interdisant toute forme d'union entre l'Allemagne et l'Autriche, Hitler avait
osé.
    Il tapota
l'épaule de sa secrétaire.
    – Bon.
Gardons notre sang-froid. Nous verrons bien la réaction des Alliés. Je dois
filer. Ma femme m'attend.
    – J'ai
peur, monsieur Levent.
    –
Peur ?
    Marie Weil
baissa la tête. Ses lèvres tremblaient un lorsqu'elle murmura :
    – Je suis
juive, monsieur.
    Il fit de
son mieux pour adopter un ton rassurant.
    – Allons,
vous n'avez rien à craindre. Nous sommes en France.
    Elle
acquiesça faiblement.
    – Oui,
monsieur. Vous avez raison.
     
     
    *
     
     
    Haïfa, 2 juillet 1938
     
     
    La première idée qui traversa l 'esprit de Mourad
fut : « Il pleut des gravillons. »
Il fallut que Mona l'arrache
à son som meil pour qu'il prenne conscience qu'il s'agissait de coups répétés frappés à la porte.
    Le réveil indiquait 2 heures du matin.
    Il se redressa dans son lit et ordonna
à sa femme.
    – Va dans la chambre du petit
et enferme-toi.
    – Mais...
    – Fais ce que je te dis !
    Il ouvrit le premier tiroir d'une commode, sortit de
dessous les linges l'un des Mauser conservés depuis l'attaque du Kibboutz de
Kfar Sofer et gagna la porte d'entrée :
    – Qui est
là ?
    — Ouvre, c'est moi. Samia.
    Samia ? Mais que diable faisait sa sœur ici en pleine nuit au
lieu d'être auprès de son mari ? Elle tenait entre
ses bras son bébé, un garçon né en avril, baptisé du nom de son
père, Hussein. Il pensa au pire.
    Écartant le battant, il retint un cri de surprise. Le visage d'Abd el-Kader se détachait dans la pénombre.
    – Ferme la porte. Éteins la
lumière. Vite !
    Mourad s'exécuta. Une fois toutes les pièces plongées dans l'obscurité, il questionna :
    – Alors ?
    Ce fut Samia qui expliqua :
    – Les Britanniques ont retrouvé la trace d'Abd el-Kader dans le maquis. Heureusement que nous avons été prévenus.
    Le résistant palestinien se voulut rassurant.
    – Ne crains rien, Mourad. Dans quelques minutes, je ne
serai plus là. On vient me chercher.
    Attiré par les éclats de voix, Soliman apparut à son tour, les yeux pleins de sommeil.
    – Abd el-Kader ? Qu'est-il arrivé ?
    – Rien de très original. J'ai les Anglais à mes trousses. Ce n'est pas nouveau, n'est-ce pas ?
    C'était vrai. Déjà, en mai 1936,
après une attaque contre une base militaire, les Britanniques s'étaient
acharnés sur lui, menant une offensive terrestre et aérienne contre son camp.
Au terme de violents combats, blessé, il avait été capturé et transféré à
l'hôpital d'Hébron. Trois jours plus tard, il faussait compagnie à ses geôliers
et trouvait refuge en Syrie. À peine remis de ses blessures, il était

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