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Le souffle du jasmin

Le souffle du jasmin

Titel: Le souffle du jasmin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Gilbert Sinoué
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n'est un secret pour personne
que leur président, Roosevelt, désapprouve notre politique à l'égard des
Arabes. Il juge qu'elle pue le colonialisme éhonté. Grand bien lui fasse.
    Il tourna
son regard vers Wyndham :
    – Même
s'ils se bouffent le nez entre eux, les Égyptiens n'oublient pas l'affront
perpétré par Lampson assiégeant le palais royal avec des blindés. Et les Arabes
de tous les pays voient bien que la Palestine, qui était sous notre
responsabilité, est en train de passer aux mains des Juifs. Vous allez sans doute
rédiger un rapport sur votre tournée dans le Moyen-Orient, monsieur
Wyndham : je veux espérer que vous saisirez l'importance du problème
palestinien.
    Wyndham fut pris de court par
cette averse d'acre franchise. Il éclata de rire.
    – Eh bien, monsieur Barnes, je
vous remercie de parler de manière aussi carrée !
    Il vida le
reste de son gin-tonic et conclut pensivement :
    – So Kipling was right
after ail. East is East and West is West...
    – ... And never the twain shall meet [104] , conclut Barnes.
     
    Le lendemain matin, sur la suggestion du ministre d'État
mais à l'insu de Lampson, John Wyndham téléphona à Hassaneïn pacha, l'éminence
grise de Farouk : jugeait-il opportun que le délégué itinérant du Foreign
Office vînt se présenter à Sa Majesté ?
    – Certainement, M. Wyndham. Je vais m'en entretenir
avec Sa Majesté et je vous rappellerai.
    L'entretien fut bref, car, une demi-heure plus tard,
Hassaneïn rappelait, en effet, pour fixer l'heure de l'audience : le jour
même à midi.
    Un bel homme, songea Wyndham, parvenu devant le bureau
du monarque. Visage plein, souriant, l'œil charmeur. Dommage qu'il soit devenu
ventripotent.
    – Asseyez-vous, je vous prie, M. Wyndham, déclara
Farouk en anglais.
    Quand son hôte lui eut exposé l'objet de sa mission, en
termes éminemment plus diplomatiques, c'est-à-dire celant l'objet réel de sa
tournée, le roi lui lança, ironique :
    – Je me félicite de votre visite,
monsieur Wyndham. Je me disais
aussi que les services britanniques de renseignement avaient besoin de renfort.
    Wyndham
écarquilla les yeux.
    – Il faut, en effet, reprit Farouk, que
vous soyez bien mal informés à Londres pour maintenir ici un
haut-commissaire aussi malvenu que sir Miles Lampson et, pire encore, pour l 'élever dans la noblesse et en
faire lord Killearn.
    L'Anglais
ne put se retenir de sourire. Le roi, lui, se laissa aller à un rire franc. La
glace était rompue.
    Après
quelques autres échanges, le roi consulta sa montre.
    – L'heure
du déjeuner approche. Avez-vous un engagement plus pressant ou voulez-vous
déjeuner avec nous ?
    Wyndham
réprima sa surprise, répondit qu'il était très honoré et accepta l'invitation.
Ce diable d'homme qu'était Farouk avait brouillé les cartes : transformé
une rencontre diplomatique en un rendez-vous de club, comme si le palais avait
été le White's ou le Boodle’s.
    Des
domestiques apportèrent un plateau chargé de verres, d'une bouteille
d'orangeade, d'une autre de scotch et d'un seau de glaçons. Il s servirent au roi sa boisson
préférée, puis un scotch à Wyndham, et Farouk leva son verre à la santé du visiteur. C 'est alors que fut introduit un
personnage singulier, emprunté et prudent, ne possédant apparemment pas de
fonctions officielles, car le roi ne cita que son nom : Elias And raos. Wyndham l'identifia sur-le-champ
comme un cour tisan, sans doute un homme à tout faire et, pourquoi pas, une franche canaille à ses heures. Puis apparut un autre
homme, |e docteur Rachad,
dont le maintien et le visage racontaient une tout autre histoire. Le roi se leva et tous se dirigèrent
vers un salon.
    Wyndham avait alors récupéré tout son sens critique et comprit l'objet de la soudaine
bienveillance royale : orienter le rapport qu'il ferait à son retour à Londres.
    Le
repas fut évidemment royal, et le vin français — mais où se le procurait -on ? – excellent, mais Wyndham, sur ses
gardes, se contenta d'une
seule gorgée.
    – À présent que la guerre semble se
diriger vers sa fin, votre tournée
vous mènera-t-elle en Palestine, monsieur Wyndham ? s'enquit Farouk.
    – En effet, sire.
    – Alors je vous plains.
    Wyndham se demanda quelle autre
saillie il allait affronter quand le roi reprit :
    – Vous pourrez constater de vos
yeux le plus grand désastre de la politique britannique en Orient. Londres
était chargé de veiller à l’ordre et à la

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