Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Le spectre de la nouvelle lune

Le spectre de la nouvelle lune

Titel: Le spectre de la nouvelle lune Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Marc Paillet
Vom Netzwerk:
une évidence. Mais d’autres cérémonies, plus importantes à plus d’un titre, doivent rassembler ailleurs, à l’appel du spectre blanc peut-être, des sectateurs, des extravagants et aussi des gredins plus nombreux que ce que peuvent en contenir ces lieux-ci. J’ajouterai que la plupart de ceux qui s’adonnent à de telles abominations doivent souhaiter le faire dans la discrétion.
    Le Goupil fit une moue.
    — Or, ici, même au cœur de la nuit, même à la nouvelle lune, pour la discrétion…
    — Précisément, Timothée, ne trouves-tu pas étonnant que dans de telles conditions, nous soyons les premiers, selon toute apparence, à nous être inquiétés de ce qui se passait ici, alors qu’une recherche un peu sérieuse aurait dû y conduire tout enquêteur ?
    — Si fait, seigneur, et je ne me souviens pas que quiconque nous ait avertis à ce sujet, ni même en ait fait mention.
    — Moi non plus, Timothée, ajouta le Saxon, moi non plus…
    — Rien de surprenant cependant, avança le frère Antoine, si chacun s’en remettait à l’autre…
    Erwin se tourna vivement vers le moine et le regarda comme frappé par une révélation.
    — Bien, très bien ! lui dit-il. Mais la voilà l’explication !
    Puis, sans fournir aucun éclaircissement sur le sens de cette déclaration, il donna le signal du retour.
    Après la collation de la mi-journée prise dans leur réfectoire au monastère Saint-Pierre, Erwin confia à Timothée et au frère Antoine le soin de poursuivre des recherches sur la manière dont l’enquête avait été précédemment menée ; puis il constitua une troupe imposante avec Sauvat et les quatre gardes auxquels il joignit six serviteurs à cheval et armés.
    Ainsi escorté et accompagné par Doremus, il gagna le domaine du « button aux fades » où il parvint rapidement. Le détachement arriva au galop devant la résidence principale. L’ancien rebelle mit pied à terre et Erwin demanda à Herta qui était sortie de sa demeure, alarmée, de faire comparaître immédiatement devant lui son intendant.
    — Je parle, précisa-t-il, de celui qui, entre autres, commande les esclaves à l’œuvre sur le marais et s’occupe de la domesticité. J’attends ici. Qu’on fasse diligence !
    — Comme nous n’avons pas été avertis de ta venue, indiqua la maîtresse du domaine, tu voudras bien excuser mon fils qui inspecte en ce moment des forestiers non loin d’ici. Quant à mon intendant, il surveille en effet des travaux en cours sur le marais de Bellebouche. Des domestiques vont les prévenir. Cependant, honoreras-tu mon foyer de ta présence ?
    — Je demeurerai où je suis ! répondit l’abbé saxon qui, ensuite, bras croisés et regard au loin, ne desserra plus les dents.
    Après une attente qui, dans le plus complet silence, parut à tous interminable, Erwin et ceux qui l’escortaient, Herta et des domestiques qui l’avaient rejointe, des serviteurs qui observaient de loin cette scène insolite virent arriver au galop l’intendant et ceux qui étaient allés le quérir. Il descendit de cheval et se présenta hors d’haleine devant le missus dominicus qui le dévisagea, puis se tourna vers Doremus.
    — Fais-lui connaître les accusations que nous portons contre lui ! ordonna-t-il.
    — Ainsi vais-je faire, seigneur.
    Quand l’intendant reconnut en Doremus celui qui l’avait précédemment interrogé, il blêmit et jeta autour de lui des regards apeurés. L’assistant du missus fit trois pas vers lui et énonça d’une voix forte, de manière à être entendu de tous, sans être cependant compris par beaucoup car il s’exprima en francique :
    — Tu es accusé d’avoir imposé à des esclaves, prisonniers de guerre avars, qui ont été confiés à ce domaine par décision impériale, des corvées conduites de telle façon – ô combien scandaleuse ! – que tous se trouvent à présent en pitoyable état, malades, décharnés, épuisés, et que six, déjà, en sont morts ; tu es accusé d’avoir détourné à ton profit, ou à celui de complices, la nourriture et les vêtements qui leur étaient destinés, de ne leur avoir fourni ni toit ni abri. En conséquence de quoi, le bien que constituent ces esclaves, bien de l’empereur, a été dilapidé. Tu as gravement méconnu les ordres que t’avaient donnés tes maîtres Godfrid et Gilbert, lesquels t’avaient enjoint d’en user avec ces prisonniers de manière qu’ils puissent être longuement et fructueusement à

Weitere Kostenlose Bücher