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Le talisman Cathare

Le talisman Cathare

Titel: Le talisman Cathare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Luc Aubarbier
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armure, vêtus comme des gueux, la tunique déchirée, imbibée du sang de leurs blessures. Un ultime assaut, plus violent que les autres, brisa en même temps les deuxépées. Ils continuèrent de se battre avec les poings, sans échanger ni un cri ni un mot. On n’entendait que les coups qui pleuvaient et le feulement rauque de leur souffle qui s’épuisait. Le géant français, la barbe en bataille, parvint à renverser son adversaire qui avait pourtant la vigueur d’un chêne. Ses mains, cherchant son cou pour l’étrangler, rencontrèrent un objet métallique. « Le talisman », grommela Montfort en refermant ses doigts sur la chaîne de fer dont on disait qu’elle ne pouvait être rompue par des mains d’homme.
    Bernard lui écrasa les phalanges avec une pierre.
    « Tu brûleras sur le bûcher avant de rôtir en enfer, hurla le Français.
    — Je dévorerai ta réincarnation sous la forme d’un porc », cracha le Périgourdin.
    Montfort empoigna le chevalier, le serrant contre lui à le broyer ; Bernard plongea ses dents dans la gorge de son ennemi, comme un loup qui veut saigner sa proie.
    Soudain, un bruit de sabots se fit entendre. Les deux adversaires cessèrent leur lutte, dressant l’oreille, tous les sens aux aguets, puis se séparèrent, s’enfuyant chacun de son côté, rompant le combat comme des bêtes soudain effrayées de leur propre barbarie.

    Si Bernard avait pu soulager sa peine par la férocité de la bataille, Alix, son épouse, était restée recluse à Castelnaud. Il la retrouva en pleurs et en désarroi, accablée comme une servante sous un fagot d’épines. Le noir de son deuil la faisait ressembler à une Parfaite cathare.
    « Plus jamais nous n’aurons de joie, ni de plaisir, mon doux seigneur. Les temps de pénitence se sont abattus sur nous. Toute cette violence ! Je ne la supporte plus. Ce bain de sang ! Nous y perdons nos âmes ; nous nous condamnons à l’errance éternelle dans l’enfer de ce monde.
    — Nous devons pourtant bien nous défendre, préserver les nôtres et notre culture. Montfort et les siens ! Je jure que bientôt les vers nicheront dans leurs orbites.
    — Cela a-t-il sauvé notre enfant ? J’ai grande envie de me laisser aller dans la voie de la Vérité, et de rejoindre une communauté de Bonnes Femmes pour tenter d’y faire mon salut. »
    Bernard était horrifié de voir celle qu’il aimait en proie à un tel désespoir. Hugues de Vassal vint à son secours.
    « Le chemin de la perfection n’est pas faiblesse, mais force. On n’y tombe pas, on s’y engage librement. Vous n’êtes pas prête à prendre l’habit.
    — J’ai juré de venger notre fille ; tu dois m’aider à accomplir ce serment.
    — J’accepte, mais ce sera le dernier. Une fois la vengeance accomplie, je ne prêterai plus jamais serment. Je ne m’engagerai plus que devant Dieu et prendrai le voile des femmes cathares. »
    Cette résolution fendit le coeur de Bernard. Beaucoup de faidits avaient vu leurs épouses revêtir l’habit des Parfaites. Pourtant, il n’avait jamais songé que la religion puisse un jour être un obstacle à leur amour. Il se rassurait en pensant que le temps n’était pas encore venu où il devrait se séparer d’Alix. Elle pourrait toujours changer d’avis lorsque les heures écoulées auraient adouci sa douleur de mère. Il saurait bien la reconquérir.

14
    Pour Montfort, il n’était plus temps de barguigner. Sans attendre d’hypothétiques renforts, il rassembla ses hommes et les conduisit au pied du château de Castelnaud.
    « Il est humainement imprenable, l’avertit l’abbé de Sarlat. Le comte du Périgord s’y est cassé les dents. Bâti de pierres dures et de mortier rugueux, avant qu’il ne soit pris, des milliers d’âmes nues s’envoleront des bouches.
    — Laissez ici votre défaitisme ! Vous combattrez avec vos prières et moi avec mon épée. Mordieu, je ferai rendre gorge à ce cathare ! »
    La forteresse, encastrée dans le rocher qui lui servait d’assise, semblait totalement close. On n’entendait aucun bruit ; seuls les cris des corbeaux tournoyant autour du donjon perçaient le silence. Entre les créneaux brillaient les casques des soldats toulousains.
    « Ces noirs oiseaux vont nous porter malheur ! » maugréa un cavalier proche du baron français. Montfortsentait ses troupes hésiter. Un vent de frayeur soufflait sur eux depuis le massacre de Berbiguières. Il les devinait près de

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