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Le talisman Cathare

Le talisman Cathare

Titel: Le talisman Cathare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Luc Aubarbier
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Cazenac, répondit-elle d’une voix innocente, en regardant le comte droit dans les yeux.
    — Sang Dieu ! Tu es la fille…..
    — Vous êtes ici chez moi. Je veux dire, chez mes parents, se reprit-elle.
    — Enfin une bonne prise ! »

    Un chevaucheur fut envoyé sur-le-champ à Castelnaud, porteur d’un ultimatum sévère et désespérant. Si Bernard et son épouse ne se rendaient pas, avec tous leurs hommes, d’ici trois jours, leur fille serait brûlée vive comme hérétique.
    « Vous veillerez, messire Bernard, à bien me livrer le secret que vous portez autour du cou », précisait la missive.
    « Mon Dieu, Blanche ! Prisonnière de ce monstre ! Nous pensions bien faire en la cachant à Montfort sous des habits de servante, quelle erreur funeste ! Je ne puis laisser périr la chair de ma chair ; nous devons nous rendre. »
    La terrible annonce avait fait oublier à Alix toute la dialectique cathare sur la dérision de l’enveloppe corporelle. Pas un instant, elle ne pouvait imaginer la mort de sa fille. Bernard, les larmes aux yeux, la prit dans ses bras. Il connaissait les usages de Montfort. « Nous ne pouvons céder à cet homme sans honneur : il nous brûlera tous les trois et fera exécuter tous les nôtres, comme il l’afait à Casseneuil. La moindre résistance lui est odieuse et le rend fou furieux. Nous ne pouvons ruiner notre cause. Plutôt voir tous les miens écorchés devant moi, embrasser leurs cadavres et périr le dernier. » Sa gorge bouillonnait de sanglots. Il aimait sa fille, son unique enfant, tout autant que son épouse. Mais il savait que les propositions de l’ogre de Chevreuse étaient un marché de dupes.
    « Je vais aller lui parler ; il comprendra peut-être le coeur d’une mère. Laisse-moi partir ! supplia Alix.
    — Et vous perdre toutes deux ! Plutôt donner ma vie. Mais cela ne sert à rien ; il exige une reddition sans condition, avec un bûcher pour conclure l’affaire. »
    Ils restèrent longtemps à pleurer ensemble, l’un contre l’autre, éperdus de peine, incapables de réagir face à la monstruosité qui les frappait.
    « Offre-lui donc ton talisman, dit Alix. Ce n’est rien qu’un objet matériel ; il ne peut contenir les secrets qu’on prétend. »
    Bernard le tira de dessous sa tunique. C’était un bijou d’argent d’une facture assez grossière, sans grande valeur.
    « Le fermoir en est soudé de telle manière qu’une fois ouvert on ne puisse le refermer. La tradition affirme que ce sont les anges du ciel qui l’ont scellé ainsi …
    — C’est le moment de le déclore ; notre fille est en danger.
    — Cette amulette ne pourra la sauver ; elle ne concerne que notre foi.
    — Notre religion est en danger !
    — Mais elle n’est pas vaincue. De toutes les façons, le message de Montfort est clair : il nous veut tous lestrois, pour nous faire payer les mutilations que nous avons infligées aux catholiques. Je pense qu’il se moque du talisman. Il veut éteindre notre race avec notre croyance.
    — J’ai empêché des femmes d’être mère et d’allaiter des enfants. Je suis maudite, s’écria Alix en s’arrachant les cheveux par poignées. Dieu me frappe dans mon propre enfant !
    — Dieu est bon ; il ne tue personne », dit doucement Bernard en s’efforçant de la calmer.
    Les minutes passaient de plus en plus vite, comme affolées par la menace, et le jour fatidique approchait. Chaque seconde tombait comme une goutte de plomb. Le chef croisé avait entouré Montfort d’un triple rang de soldats et des cavaliers patrouillaient en permanence. Nul ne pouvait s’approcher. Cette impuissance à agir rendait Bernard fou de douleur et de rage.
    « Peut-être qu’il n’osera pas, murmura Alix ; qu’il me donnera une chance. »

    À l’heure dite, un bûcher fut construit sur la grande terrasse du château. Le moine Augustin, qui avait tenté une délégation, une ultime négociation faisant appel aux sentiments chrétiens du chef croisé, ne fut même pas reçu. À la tombée de la nuit, la jeune fille fut conduite, ligotée, sur le lieu de son supplice. Des hommes, habillés de noir, portaient son corps tremblant. Un prêtre l’escortait en priant pour le salut de son âme. Sa jeunesse n’avait été que chants, musique, poésie et beauté. Ses parents l’avaient gardée dans l’univers artificiel des jardins de Montfort, comme dans un paradis terrestre coupé du reste du monde, un lieu immatériel propre

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