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Le talisman Cathare

Le talisman Cathare

Titel: Le talisman Cathare Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Luc Aubarbier
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dans la paix, n’avait pas été discrète. Toute la fine fleur de la noblesse ariégeoise y avait assisté, y compris son frère, le seul de la famille à conserver la religion catholique, pour des raisons strictement juridiques. L’évêque Guilhabert de Castres lui avait donné le consolament, dans la bonne ville de Fanjeaux, là même où Dominique de Guzman avait établi son quartier général et fondé l’ordre des dominicains, qui vivaient dans la pauvreté, à l’instar des Parfaits. En même temps qu’elle, trois personnes de haute naissance, Aude, Fays de Durfort et Raymonde de Saint-Germain prirent la vêture devant une soixantaine de nobles dameset de grands seigneurs. Trois ans plus tard, à Pamiers, elle osait défier Dominique de Guzman lui-même en un débat contradictoire resté célèbre, au cours duquel elle fit perdre patience au saint homme. Aussi belle qu’intelligente et cultivée, cette femme brune devint un modèle pour toutes celles qui voulaient se défaire du joug d’un époux, d’un père ou d’un prêtre. À travers elle, la religion cathare gagna les esprits féminins. Dans son lointain Périgord, Alix avait entendu parler d’Esclarmonde et souhaitait progresser, sous sa houlette, vers la perfection.
    Pressentant le destin tragique qui menaçait son pays et sa foi, Esclarmonde avait insisté pour que fût érigé, loin des hommes, dans la haute montagne, un château saint qui ne serait pas soumis à la versatilité des humains, mais au seul vouloir de l’Église cathare. En 1206, le seigneur Raymond de Pereille, dont la mère et la fille étaient Parfaites, entreprit de bâtir la citadelle de Montségur. Esclarmonde s’y retira en 1212, à l’abri du fracas des armes, et nombreuses furent les femmes qui la rejoignirent.

    Profitant de la paix revenue avec la mort de Montfort, Alix quitta Toulouse sous la protection du comte de Foix et gagna les Pyrénées. Elle progressait à pied, lentement, par modestes étapes, heureuse de l’accueil qu’elle rencontrait dans les villages. C’était à qui l’inviterait à sa table, l’hébergerait sous son toit. Elle n’était encore qu’une postulante, et on la recevait comme une sainte femme. Quitter Bernard avait été, pour elle, un soulagement. Elle craignait de ne pas en avoir le courage, tant son attachement terrestre était encore fort. Elle savait toutefois que rien ne pouvait résister à l’appel de Dieu. Les épreuves subies, le deuil impossible de sa fille, le chaos où plongeait le monde : tout était signe. Les temps étaient proches où la route du salut serait barrée. Elle ne devait pas s’attarder sur les sentiers fleuris du bien vivre, mais se hâter de gravir les pentes abruptes de la montagne, de crainte que la Mort ne la surprenne avant qu’elle n’ait approché du sommet.
    Elle traversa le pays vert en chantant et priant à la fois. La saison était belle, opportune au pèlerin, et rien n’arrêta son pas. Elle savait qu’il lui fallait arriver avant les premières neiges qui isolaient les Parfaits, les protégeant de leur manteau de froidure. Aujourd’hui, c’était l’été, le soleil chauffait la pierre, et elle peinait à imaginer le gel et l’humidité de la morne saison.
    Elle aurait aimé faire halte quelque temps chez ces paysans à la foi naïve qui lui demandaient conseils, chez ces petits seigneurs des montagnes, flattés de recevoir la grande Alix de Turenne, autrefois chantée par les troubadours, à présent humble croyante parmi les autres. Mais rien ne devait retarder sa marche ; elle n’avait qu’un but : rencontrer Esclarmonde.
    Après Lavelanet, le chemin se fit plus rude, la pente plus sévère. L’été desséchait les torrents, faisait brûler les cailloux. Soudain, au sommet d’un col, elle vit le « pog », la montagne sacrée. Elle resta un moment, droite, les cheveux au vent, laissant errer son regard sur les Pyrénées bleues. Elle chercha des yeux le château, peinant à identifier la capitale des cathares dans ce modeste fortin. Cela n’avait rien à voir avec les lourdes forteresses du Périgord. Quatre murs de pierre sur un éperon rocheux.
    « C’est mieux ainsi, murmura-t-elle. Tout ce qui est bâti de main d’homme est maudit. Ce pic abrupt est certes fait de matière, mais il ne veut pas de mal aux vivants. La nature est moins cruelle que l’être humain, et l’animal, dans sa stupidité, ne fait pas le mal pour le mal. Ce lieu enchanteur sera une

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