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Le talisman de la Villette

Le talisman de la Villette

Titel: Le talisman de la Villette Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Claude Izner
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les cigognes. Malgré leur lourdeur, elles planent sans paraître se mouvoir. La raison en est que leurs ailes sont concaves et que, largement déployées, elles reçoivent du vent une impulsion ascensionnelle. Grâce à leur queue qui leur sert de gouvernail, ces migrateurs fendent les cieux, et hop là !
    Les bras étendus, Helga Becker menaçait de renverser des piles de livres. Euphrosine lui entrava le passage.
    — Autrement dit, si on attache ensemble un éléphant et deux grosses oies et qu’on les lâche de l’aiguille du Midi, ils survoleront les Pyrénées ? Fadaises !
    — Comment osez-vous railler une telle avancée technique ! Unverständig 39
    Kenji ne résista pas à l’envie d’intervenir.
    — Quoique je sois partisan du progrès, je suis d’accord avec Mme Pignot. En matière d’aérostation, ce que nous possédons suffit amplement : montgolfières, ballons sphériques, dirigeables…
    Helga Becker se dressa sur la pointe de ses bottines, et, narines frémissantes, riva son regard au sommet de l’escalier.
    — Et moi je vous le garantis : aujourd’hui la roue motrice, demain le vol !
    — Y en a eu un nouveau ? s’écria Joseph, les joues rougies par le froid et la hâte.
    — Que racontez-vous ? Nous aurait-on dérobé des ouvrages ? rétorqua Kenji, les sourcils en accent circonflexe.
    — Euh… non… c’est-à-dire que…
    Euphrosine se rua au secours de son rejeton.
    — Devine ce que Mme Becker nous prédit, mon minet : on va nous coller des ailes et nous forcer à les battre jusqu’à ce qu’on crie adieu au plancher des vaches !
    — Puisque c’est ainsi, je me retire, lança Helga Becker, presque aussitôt confrontée en sens inverse à Victor et son vélo.
    Choc métallique, sourires contraints, palabres obséquieuses, puis, enfin, l’accalmie.
    — La Teutonne a baissé pavillon, le fourneau me réclame, gronda Euphrosine.
    Joseph rejoignit dans l’arrière-boutique Victor qui lustrait à l’aide d’une peau de chamois le guidon de sa monture.
    — J’aurais été plus avisé d’y aller en fiacre, les chaussées sont des patinoires. Mais cela valait la peine : le douanier a confirmé la présence d’un bancal sur le lieu du meurtre. Et vous ? Je ne vous espérais pas si tôt, que s’est-il passé ?
    — Mission accomplie, chef. Je suis rentré parce que Sophie Clairsange s’est fait livrer ses effets, j’en ai déduit que son installation à l’ Hôtel de l’Arrivée était définitive. Quant au bancal, nulle trace. On est tranquilles, j’ai son adresse. Ah, et puis j’ai ren…
    — Moins fort ! Je suis fier de vous, Joseph, beau travail, vous êtes un limier d’élite.
    Joseph joua les modestes. Il contempla attentivement l’armoire vitrée qui contenait des carquois et des sarbacanes, mais son visage resplendissait d’une orgueilleuse allégresse.
    — Il faut retourner rue de Varenne présenter des condoléances à Mme de La Gournay, je veux découvrir l’identité de l’homme au visage carré, murmura Victor, la bouche en coin.
    — Gardez en mémoire que cet hurluberlu était appâté par une clé enjolivée d’une licorne, afin d’accéder à la collection du baron pour vérifier si on l’avait barbouillée de sang comme ses propres poupées – des poupées, à son âge ! Je vous le recopie ?
    — Inutile, Joseph, tout est noté là, repartit Victor, tapotant son crâne.
    — On y va quand ?
    — Je déjeune en vitesse avec Tasha et j’y cours.
    — On se retrouve où ?
    — J’y vais seul, je vous téléphonerai.
    Joseph ne sembla point pénétrer le sens de ces paroles. Il resta figé, le souffle retenu et l’œil rond. Le front plissé, il marmonna :
    — Qu’est-ce que je vous ai fait pour que vous m’infligiez une punition pareille ?
    Victor enchaîna d’un ton doucereux.
    — Oh, trois fois rien, vous avez déserté votre poste alors qu’il était primordial de ne pas lâcher Sophie Clairsange d’une semelle, et vous me faites passer pour un imbécile auprès de M. Mori à qui j’ai raconté que vous étiez à l’exposition de Drouot pour la journée. Vous savez quoi, Joseph ? Vous n’êtes qu’un velléitaire. Sur ce, bon vent.
    D’un revers de main, il poussa la porte, dérapa sur le parquet, manqua de choir et fonça dans la boutique.
    Joseph bomba ses pectoraux, fouaillé par une flambée de rage.
    — Pour du culot c’est du culot ! Eh ben tant pis, il saura rien de ce

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