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Le talisman de la Villette

Le talisman de la Villette

Titel: Le talisman de la Villette Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Claude Izner
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la chique. Il l’accola avec effusion et n’obtint en retour qu’une mimique ironique.
    — Exquise consœur, j’expliquais justement à ton époux que Lautrec et Bonnard encensent ton génie.
    — Tais-toi, perfide, sinon je vais ployer sous le faix de tes compliments.
    Embusquée à peu de distance, la comtesse de Salignac faillit suffoquer. Quant à Mathilde de Flavignol, elle parut stupéfaite.
    — Son époux ? Son époux ? répéta-t-elle. Ils sont donc mariés ?
    — Sûrement pas à l’église, de tels mécréants ! siffla la comtesse en s’éventant nerveusement.
    — Avouez, Olympe, qu’ils forment un joli couple.
    — Si ce n’était ma soif de lecture et la politesse raffinée de M. Mori, je boycotterais 47 cette librairie. Venez, Boni, sortons.
    Elle bouscula Tasha qui quêtait l’appréciation de Djina.
    — Ça te plaît vraiment, maman ?
    — Énormément, ma douce. C’est inouï ce que tu as réalisé en six ans, quelle maîtrise…
    — J’aurais dû tendre les murs d’un tissu neutre avant l’accrochage, cette affreuse tapisserie lilas tue les contrastes. Et ce rideau à fleurs qui s’entortille, là, ne serait-ce pas préférable de l’ôter ?
    Cette question s’adressait à Kenji, campé face au nu académique d’un jeune homme dont il jalousait la musculature. Il échangea avec Djina un regard appuyé, prélude à un sourire de plus en plus accentué. Refréner leur hilarité les força à se contorsionner de façon fort peu naturelle.
    « Me voici frappée de rideaumanie galopante. Dieu merci, la bienséance lui a interdit de me soumettre ses estampes japonaises ! » pensa Djina, simulant une quinte de toux.
    — Qu’y a-t-il de si drôle ?
    Déconcertée, Tasha s’effaça. Derrière elle, une voix féminine ronchonnait :
    — Pourvu que ton ami Legris soit à la hauteur, j’ai misé sur lui, qu’il se grouille, parce que les cognes se contrefichent de Loulou depuis qu’ils l’ont flanquée six pieds sous terre au fond d’une fosse commune !
    — Goûte ce sablé, ma bichette, proposa son compagnon.
    Tasha opéra un demi-tour, à temps pour pincer Maurice Laumier enfournant un biscuit dans la bouche de Mimi, qui manqua s’étrangler. Il l’entraîna vivement, mais elle lui résista et agrafa Victor.
    — Vous nous le débrouillez quand, ce mystère, monsieur Legris ? articula-t-elle après avoir dégluti.
    — C’est trop tôt, ayez confiance, je vous ai promis de…
    Mimi lui serra le bras.
    — Vous êtes un champion, j’ai foi en vous, n’hésitez pas à exiger de moi ce qui vous fera plaisir !
    Cette fois, Laumier la remorqua si violemment qu’elle dérapa.
    — T’as la cafetière ébréchée ? brailla-t-elle. Lautrec la détailla d’un air gourmand.
    — Beau brin de fille ! claironna-t-il.
    — Qui est Loulou ? Que manigancez-vous ensemble, Laumier et toi ? Et qu’as-tu promis à cette catin ? jeta Tasha, hors d’elle.
    Quelques têtes pivotèrent. Gêné, Victor l’attira vers la sortie.
    — Tu te méprends, ma chérie. La cousine de cette personne est décédée récemment à l’hôpital – la tuberculose –, Laumier est une vieille connaissance…
    — Je sais, c’est moi qui te l’ai présenté et tu l’exècres !
    — J’ai révisé mon opinion, il a de bons côtés. Je me suis engagé à récupérer les effets de cette Loulou qui ont probablement été dérobés par une infirmière ou une malade.
    — Tu te figures que je vais gober ces fariboles ? Je suis certaine que vous avez encore été mordus par le démon de l’enquête, toi et Joseph. Où l’as-tu expédié ?
    Le visage en feu, elle s’évertuait à le surprendre en flagrant délit de mensonge. Il adopta une expression affectueuse et, d’un mouvement du menton, désigna l’exposition.
    — Nulle part. Je t’aime, c’est l’essentiel. Ce soir, c’est ton triomphe, j’y ai participé et j’en suis enchanté. Ne gâche pas cette apothéose.
    Il était coutumier de ce genre de pirouette, elle aurait pu enfoncer le clou, l’acculer aux aveux, pourtant elle chassa les présomptions liées à la présence de Laumier et de Mimi. Mieux valait préserver son ignorance et par conséquent sa quiétude.
    Comme ils revenaient sur leurs pas, ils croisèrent Euphrosine Pignot et Micheline Ballu, pressées d’affronter un long trajet en omnibus.
     
    Le voyage avait été éprouvant – des sièges sur l’impériale car le véhicule

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