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Le Temple Noir

Le Temple Noir

Titel: Le Temple Noir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Giacometti
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goûtaient-elles les teintes sombres tirant sur la nuit tandis que les ombres encore errantes, elles, recherchaient des nuances plus claires. Le sang de Bina, lui, tirait sur le carmin, une couleur favorable pour attirer l’esprit subtil du rabbin. Une dernière goutte tomba qui résonna faiblement sur le dallage. Le Devin posa son pouce sur le poignet et attendit. Les morts n’étaient jamais rassasiés du précieux liquide. Quand il venait à manquer, aussitôt les ombres se manifestaient.
    Le visage de Bina se crispa brusquement tandis que son corps, jusque-là inerte, commençait de trembler. Le Devin resserra son étreinte sur le poignet et posa la pointe de sa botte sur la flaque de sang. Le front de la jeune fille se constella de gouttes de sueur. Les veines bleutées se mirent à battre aux tempes. Un son rauque, comme un éboulis dans la nuit, s’échappa de sa gorge.
    Le Devin ferma les yeux. Il n’avait plus besoin de voir.
    Il suffisait d’entendre.
    La voix jaillit des lèvres comme un serpent entre des pierres.
    — Qui es-tu ?
    Le Devin ne répondit pas. La voix se fit plus impérieuse.
    — Que veux-tu ?
    Le Devin se rappelait un souvenir d’enfance. Une partie de pêche, dans une rivière anglaise. Ce jour-là, il avait hameçonné un gros poisson et son père lui avait appris une leçon qu’il n’avait jamais oubliée. Une fois qu’on avait ferré une prise, il fallait la laisser se débattre et s’épuiser. Encore et encore. C’était le seul moyen de la ramener à la lumière.
    Il avança le pied et couvrit la tache de sang du talon. D’un coup le corps se raidit. La respiration devint haletante. Le poignet se mit à tressauter.
    Le moment était venu.
    — Quel est le secret qui gît au fond du tombeau  ?

    Palais du Légat
La chapelle
    Le Légat s’était engagé dans l’escalier qui tournait à angle droit. Un lumignon éclairait chichement le passage. Arrivé sur le palier, le Renard s’adossa contre le mur et fixa le Grand Maître qui montait lentement les marches. Il boitait de la jambe gauche. Une vieille blessure dont la douleur se réveillait sous le coup de l’émotion. Heureusement, il était le seul à connaître ce point faible.
    — Les frères du Temple ont bien mérité de l’Église, dit le Légat. Ils ont porté haut la bannière du Christ sur toute la Terre sainte. Vous-même, je vois, avez donné de votre personne.
    — Je n’ai fait que mon devoir, comme tous mes frères.
    — Vous êtes la milice armée du Christ, l’équivalente en ce monde, de la milice angélique qui veillera sur la Jérusalem céleste.
    — Que vienne le Jour de Gloire où tous les vrais serviteurs du Seigneur se retrouveront dans la cité de Dieu.
    — Vous n’y retrouverez pas vos amis juifs.
    La phrase tomba comme la pierre qui entraîne un cadavre au fond de l’eau.
    — Nous protégeons tous ceux qui font appel à nous.
    — Une protection qui leur coûte fort cher, mais que des marchands enrichis, de la sueur des chrétiens, des orfèvres voleurs de métaux ou des banquiers prêtant à usure, peuvent sans doute vous payer. En revanche, je me demande bien comment les rabbins, que vous affectionnez tant, parviennent à honorer leur dette…
    Cette fois, le Grand Maître ne tenta pas de répondre. Sa main remonta vers sa ceinture où se trouvait la garde de son épée.
    — Vous auriez tort… annonça le Légat en empruntant à nouveau l’escalier.
    Cette phrase, prononcée sans ciller, désarma la main d’Armand.
    — … car je peux prouver que c’est un de vos hommes qui s’est introduit dans le Puits et qui a tenté de délivrer le Juif Maïmonès. Le même d’ailleurs qui vient de tuer mon conseiller.
    D’un geste, le Renard montra le haut de l’escalier.
    — Il reste six marches. Mes gardes sont en haut. Vous avez le choix : ou vous sortez en tant que Grand Maître ou en hérétique promis au bûcher.
    — Votre prix ?
    — La rançon d’Al Kilhal.

    Ferme d’Ein Kerem
    Depuis que le Devin avait posé la question, les lèvres de Bina s’étaient scellées. À la grande surprise du Templier, l’âme du rabbin résistait à son interrogatoire. D’ailleurs, une douceur imprévue baignait le visage de sa fille. Son front était redevenu pâle et serein, ses joues fraîches et reposées. À tout moment, le Devin s’attendait à la voir sourire. À croire que le rabbin, par-delà la mort, se moquait de lui.
    On frappa à la porte selon le code

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