Le Temple Noir
de luxe et de restaurants hors de prix. L’argent coulait toujours à flots, la continuité de l’esprit des lieux était assurée.
Fainsworth jeta un regard circulaire dans l’intérieur du bâtiment, un patio gigantesque dont la hauteur montait sur sept étages. Des images de films de la Hammer 1 étaient diffusées par des vidéoprojecteurs. Sur toute la longueur d’un mur, des écrans rectangulaires et plats retransmettaient en continu les cours de la Bourse sur des plateaux de chaînes de télévision boursières. Fainsworth apprécia l’alliance symbolique du trading et du vampirisme.
Des femmes-vampires, évanescentes, en robes de dentelle ébouriffées sortaient de cercueils d’ébène, les bras tendus et la bouche sanglante. Autour d’elles, de jeunes dandys, en frac noir et lunettes teintées, prenaient des poses de Dracula de comédie.
Derrière un comptoir, se tenaient deux jeunes femmes brunes, longues et minces, la peau du visage émacié, rendu exagérément livide par un maquillage adapté, les lèvres écarlates, toutes deux habillées d’une tunique noire qui descendait jusqu’aux chevilles.
Fainsworth chuchota à l’oreille de la Louve :
— C’est quoi, cette ambiance décadente ? Une réunion de l’association des vampires anorexiques ?
— Non, un défilé de mode. Il y a un podium à côté du restaurant central.
— Trouve le sous-sol. Il faut descendre.
La Louve aperçut un vigile et murmura à l’adresse de l’aristocrate :
— Je m’en occupe. Sois sage avec les suceuses de sang…
Elle s’éloigna en direction d’un homme en casquette grise et veste marron frappée du logo de la sécurité. Elle revint quelques minutes plus tard, avec deux badges noirs à la main.
— Charmant, ce petit gardien, j’en aurais bien fait mon quatre heures. Il m’a cédé deux badges qu’il faudra lui rendre en sortant. On contourne le bal des vampires et on prend la première porte à droite. Un escalier conduit au parking, dernier niveau, - 4.
— Tu lui as dit quoi ?
— Que j’avais oublié le porte-documents de mon patron dans la voiture. Et qu’il allait m’engueuler ferme, s’il apprenait mon erreur. Tu me dois aussi trois cents livres.
Ils passèrent devant les deux cerbères gothiques et longèrent une barrière de sécurité qui entourait toute la cour centrale et bloquait l’accès aux chaises disposées autour du catwalk 2 .
Une porte grise d’ascenseur était nichée dans un renfoncement. La cabine descendit à toute vitesse pour s’ouvrir sur un parking qui empestait la peinture et le désinfectant. Trois voitures étaient garées entre des piliers fraîchement repeints. Fainsworth regarda méticuleusement autour de lui, s’assura qu’aucune caméra n’était installée, puis d’un geste affirmé, indiqua un mur, situé sur la gauche.
— Là-bas, à côté de la Rover.
D’un pas vif, ils se dirigèrent vers une porte métallique repeinte en rouge, sur laquelle était apposé un autocollant Défense d’entrer . La Louve sortit une arme et tira à bout portant sur la serrure qui vola en éclats.
Une volée de marches descendait vers l’étage inférieur. L’escalier donnait sur une salle voûtée où était entreposé un amoncellement hétéroclite de poutres en bois rongées de mousse, de traverses de métal rouillées, de bardages défoncés. Des tas de gravats, recouverts de poussière compacte, s’éparpillaient un peu partout. Un groupe de gros rats noirs détala, pour se cacher derrière un échafaudage en vrac.
— Charmant… lança la Louve. On est censés chercher quoi, dans cette décharge ?
— La Colonne du soleil.
Ils regardèrent autour d’eux. La Louve cria :
— Là-bas !
Sur leur gauche, deux piliers massifs montaient vers le plafond du parking. Ils s’approchèrent. Un crépi verdi recouvrait les fûts.
— Où est l’est ?
La Louve fit jaillir son iPhone et tapa une appli. Une boussole apparut dont l’aiguille se mit à tournoyer.
— Juste sur ta gauche.
Fainsworth se plaça dans l’axe. De la main, il remonta le long d’une des colonnes. Sous la base du chapiteau, il s’arrêta. Le crépi s’effritait. Il gratta l’endroit du doigt et dégagea un écusson où apparaissait en relief une lettre stylisée : B. La Louve aussitôt se précipita sur l’autre colonne. Au même endroit apparut une autre lettre : J.
Jakin et Boaz . Les deux piliers à l’entrée de tout temple
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