Le Temple Noir
électromagnétique a-t-elle fonctionné ?
— Oui, à la perfection. Et le plan d’accès fourni par le diacre de la basilique était parfait. Le pauvre n’a pas eu le temps de profiter de son argent. Il a été victime d’un accident de la route. En revanche, il y a eu un léger contretemps.
— De quel ordre ?
— Un prêtre nous a surpris pendant que nous étions dans la salle souterraine. Il est mort. Un accident, aussi.
Fainsworth consulta sa montre, ce genre de détail ne l’intéressait pas, le temps s’écoulait trop lentement à son goût.
— C’est bien triste en effet. Et le pilote de l’avion ?
— Il a rejoint le prêtre. Là-haut. C’est drôle, la compagnie aérienne s’appelle Angelsfly… Rassure-toi, il n’y a aucun moyen de nous retrouver. Nous avons effacé toutes nos traces.
Elle reposa son gobelet en grimaçant.
— Dégueulasse, ce café. Vraiment.
Il l’embrassa tendrement et se leva. Il ne supportait pas d’attendre dans cette salle glauque et retourna dans le laboratoire. Le docteur Mantinéa restait concentré devant son écran. L’aristocrate s’avança :
— Vous en êtes où ?
— Le plasma est à température nominale. J’actionne progressivement le canon à protons. Ces particules vont traverser les os de part en part puis percuteront une plaque de conduction polarisée.
Il vit l’expression neutre de l’aristocrate, s’arrêta quelques secondes pour chercher ses mots, et reprit :
— Disons que ces protons vont couler dans une sorte d’entonnoir pour être ensuite comptés par un détecteur de particules. S’il en manque à l’arrivée, après avoir traversé le squelette, cela indiquera que celui-ci a été auparavant exposé à une source d’énergie. C’est ce qui vous intéresse ?
— Pas seulement mais en gros, oui.
— Ce que je ne comprends pas, c’est le type d’énergie que vous recherchez. J’ai effectué une mesure de radioactivité et il n’y a absolument rien. Et, d’après ce que j’ai vu, vos os doivent remonter à une époque ignorante des bienfaits du nucléaire comme de ceux de la vapeur.
— Contentez-vous d’effectuer votre tâche, répondit froidement Fainsworth.
Il n’avait aucune envie de s’appesantir sur le sujet et se rapprocha à nouveau de la paroi vitrée. Son visage était teinté par les rayons verts qui émanaient des générateurs. N’eût été l’enjeu, il aurait pu se croire dans un décor de film de science-fiction naïf des années cinquante. Mais l’équipement qu’il avait sous les yeux valait des dizaines de millions de livres et personne dans le complexe nucléaire de Dalton ne faisait de la figuration.
Il se tourna à nouveau vers l’ingénieur.
— L’exposition prolongée va-t-elle abîmer les os ? Vous savez que j’en ai besoin.
L’ingénieur secoua la tête et ajusta ses fines lunettes.
— Non. Comme je vous l’ai dit, le squelette est soumis à une irradiation ciblée, un bombardement de protons qui ne fait que traverser la matière, en l’occurrence de l’os, un assemblage d’atomes de carbone. Les tissus ne sont plus vivants, ils ne risquent rien. Ah, je pense que l’on va avoir un premier résultat. Excusez-moi.
L’homme en blouse blanche fit pivoter son siège et se plaça face à un écran LCD aussi large qu’une fenêtre. Des séries de chiffres défilaient sur le tiers inférieur de l’écran, comme les cours de Bourse sur une chaîne d’informations économiques. Sur la partie droite, on pouvait distinguer, dans une image incrustée, le squelette nimbé d’une lueur vert émeraude. À gauche, des barres verticales bleues et rouges montaient et descendaient sur toute la hauteur de l’écran, avec en insert d’autres chiffres. L’homme pianota sur le clavier et fronça les sourcils. Les barres rouges dépassaient les bleues.
— C’est incroyable.
— C’est-à-dire ?
— Vous voyez les histogrammes de couleur ?
— Oui, fit Fainsworth, j’ai ce type d’indicateurs sur mon ordinateur, pour suivre les évolutions des cours du portefeuille d’actions de ma société.
— J’espère pour vous qu’ils se comportent de la même façon. Ces indicateurs mesurent l’état instantané du bombardement de protons sur les os que vos hommes m’ont apportés. Normalement, sur n’importe quel objet ou tissu non radioactif, le bleu et le rouge sont à l’équilibre.
— Et alors ?
— Regardez sur l’écran, les
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