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Le Temple Noir

Le Temple Noir

Titel: Le Temple Noir Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Eric Giacometti
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certain que les maçons anglais, qui eux croyaient en Dieu et honoraient la royauté, lui fassent un accueil franchement fraternel.
    La voix du contrôleur jaillit des haut-parleurs pour prévenir de l’arrivée du train à Saint-Pancras. Antoine rangea ses affaires, il eut la tentation d’appeler à nouveau sa compagne mais il renonça. Il n’allait pas s’humilier avec un troisième coup de fil.
    Et puis quoi encore, qu’elle aille au diable !
    Il descendit du wagon, salua à peine Charlize Theron et embrassa du regard la grande gare au plafond de verre. L’architecture était superbe, rien à voir avec la gare de Waterloo 2 , vieillotte et bruyante. Au bout du quai, sur toute la hauteur, six anneaux gigantesques de différentes couleurs s’entrelaçaient. Il hésita sur l’interprétation à donner à cette œuvre abstraite et se traita de crétin : il avait complètement oublié les futurs Jeux olympiques d’été.
    Il passa les contrôles rapidement et arriva aux portes de sortie. En face de lui, une petite foule attendait l’arrivée des passagers. Trois hommes brandissaient des panneaux avec des noms mais aucun avec le sien. Il s’avança, essayant d’intercepter un regard. Peut-être que l’ambassade voulait faire preuve de discrétion. Son portable vibra. Un nouveau SMS était arrivé, pas de Gabrielle mais du frère obèse :
     
    J’ai appris que tôt ce matin, l’ambassadeur de France à Londres a été réveillé par le cabinet du Premier ministre. À propos de ton enquête. Fais très attention .
    1 - Fraternelle de la police qui se réunit pour s’exercer dans un club de tir, avenue Foch.

    2 - Ancienne gare d’arrivée de l’Eurostar.

30
    Hôpital du Temple
Novembre 1232
    Le long du couloir s’entassaient les malades et les blessés. Jetés à même le sol, se mêlaient des pèlerins rongés par la dysenterie, des chevaliers à l’agonie, des mutilés qui hurlaient leur douleur. Entre les murs rouillés de salpêtre, retentissait un chaos incessant de cris de malédictions et de prières désespérées dans des langues parfois inconnues. Une tour de Babel de la détresse humaine. L’escorte du Grand Maître avait du mal à se frayer un passage dans cette forêt de mains levées, de supplications qui résonnaient jusqu’au plafond. Parvenu sous une fenêtre, Armand s’arrêta. Recroquevillé contre elle, un homme gémissait. Sous les bandages rougis, on devinait un moignon encore à vif. Le médecin vénitien qui accompagnait le chef du Temple murmura en italien :
    — C’est un pèlerin arrivé hier, il a eu la cuisse sectionnée par un câble en descendant du navire. Il ne passera pas le jour.
    Périgord se pencha. L’homme ouvrit les yeux.
    — D’où viens-tu, mon frère ?
    — Du Valois… près de Chaalis… Je veux rentrer…
    La voix cherchait sa respiration. Le Grand Maître lui prit la main.
    — Dieu a voulu éprouver ta foi avant de comparaître devant Lui.
    — Je vais… mourir ?
    — Aie confiance dans la grâce du Christ.
    — Ma famille…
    — Tu la reverras au paradis.
    Le mourant étouffa un sanglot avant d’implorer le Ciel :
    — Seigneur Dieu, aie pitié de moi… Seigneur Dieu, aie pitié de moi…
    La porte au bout du couloir s’ouvrit. Un chevalier surgit.
    — On vous attend, Seigneur.
    Avant de se relever, Armand se pencha vers le moribond et murmura :
    — Quand tu seras près de Dieu, prie pour le salut de mon âme…
    Le Grand Maître fit un signe de croix.
    — … Je vais en avoir besoin.

    Le palais du Légat
    Le Renard remontait de la chapelle. Il essuya machinalement une tache de sang sur le revers de sa tunique et continua sa marche. Dans la cour, il leva la tête pour observer le ciel sans nuages. La lumière crue qui tombait entre les murs du palais le remplit de certitude. La pureté de l’azur était la preuve la plus évidente de Dieu. Il laissa le soleil baigner un instant la pâleur de son visage puis emprunta la tour d’escalier pour rejoindre ses appartements. Arrivé dans sa chambre, il ouvrit la porte de son oratoire, dissimulée derrière une tapisserie représentant le sacrifice d’Abraham. Une serrure complexe à crochet en protégeait l’accès. Seul son serviteur, venu avec lui de France, avait un double de la clé. Le Légat s’était fait aménager cette pièce pour pouvoir méditer en secret. Trois murs de pierre apparente, une fine meurtrière, une austérité volontaire qui apaisait son âme.

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