Le templier déchu
devrait suffire pour commencer.
— En effet.
Avait-il surpris l’ombre d’un sourire sur ses lèvres ?
— Je pourrais ajouter, reprit-il, un brin provocateur, « adorable sous l’empire de la colère », pour en avoir moi-même fait les frais hier soir.
— C’était entièrement mérité ! Mais... je ne suis plus vraiment fâchée contre vous.
Désarçonné, il la dévisagea. Plaisantait-elle ? Ou allait-il se réveiller pour découvrir que tout cela n’était qu’un rêve délicieux ?
— Qu’avez-vous dit ? lâcha-t-il, se rendant compte trop tard qu’il venait de répéter la question qu’elle lui avait adressée quelques secondes plus tôt.
— Que je n’étais plus vraiment fâchée contre vous.
— Et que signifie ce plus vraiment ?
— J’ai réfléchi à ce que vous m’avez dit lors de votre confession... et je suis prête à admettre que je comprends un peu pourquoi vous avez agi comme vous l’avez fait.
— Vous... comprenez ? fit-il en essayant de ne pas montrer trop d’espoir.
— J’ai dit un peu .
— Alors vous m’avez pardonné ?
— Certainement pas, rétorqua-t-elle, le sourcil arqué. En fait, j’espère que vous avez souffert mille morts, cette nuit, alors que vous songiez au sort qui vous attendait.
Il avait connu pire, mais il répondit néanmoins.
— J’avoue que cela n’a guère été plaisant.
— Tant mieux.
Il se retint de rire. Par tous les saints, elle était délicieuse ! Il ne connaissait aucune autre femme qui aurait été capable d’avoir ce genre de joute verbale avec lui après les événements de la veille.
Le plus sérieusement possible, il reprit :
— Puis-je au moins considérer que vous ne voyez plus en moi une menace physique ? Et que vous ne brandirez plus d’arme contre moi ?
Son regard dévia vers la cheminée. Le tisonnier lui avait été confisqué la veille par les gardes, ainsi que tous les objets présents dans la chambre qui auraient pu servir d’arme potentielle, mais Elizabeth comprit l’allusion.
— Je me passerai de tisonnier à l’avenir, mais vous seriez avisé de vous rappeler que je manie aussi très bien la dague, rétorqua-t-elle. D’ailleurs, il est fort possible qu’en ce moment même, j’en dissimule une dans ma manche.
— Je serai sur mes gardes, soyez-en sûre.
Le silence retomba, et avec lui un certain embarras, aucun d’eux ne sachant trop quoi faire pour le dissiper.
Alexandre finit par désigner la chaise qui lui faisait face, de l’autre côté de la table de jeu, dans l’espoir de combler un tant soit peu la distance entre eux.
— Comme vous semblez admettre que je suis inoffensif, accepteriez-vous de vous asseoir un instant ?
Elle lui lança un regard acéré. Voyant qu’elle hésitait, il leva les bras dans un geste gentiment moqueur.
— Si cela vous rassure, vous pouvez m’attacher les mains dans le dos !
Elle laissa échapper un soupir excédé.
— Vous le mériteriez, canaille !
— Je me plierai à tous vos caprices, madame.
Cette fois, il ne plaisantait qu’à demi. Il s’exhortait à la patience, alors qu’il mourait d’envie de l’enlacer et de la convaincre d’une façon qui n’avait rien à voir avec les mots...
Sa beauté l’éblouissait. La contempler suffisait à nourrir son âme, et cela ne venait pas seulement de la perfection de ses traits, mais de quelque chose de bien plus profond qui émanait d’elle.
Dans son regard expressif et lumineux, il lisait toute la grandeur d’âme et la noblesse qui l’avaient inexorablement attiré vers elle depuis le tout début. Il brûlait de la prendre dans ses bras, mais savait qu’il n’en avait pas le droit. Il faudrait donc qu’elle vienne à lui d’elle-même.
Mais le ferait-elle ?
Il priait de toute son âme pour qu’elle lui offre une seconde chance.
Elle secoua doucement la tête. Elle ne portait pas de guimpe et à la lueur des flammes, sa longue chevelure de miel apparaissait presque rousse. Les sourcils froncés, elle semblait encore en proie au doute.
— Je devrais partir, messire, murmura-t-elle. Après ce qui s’est passé... il vaudrait mieux que je me tienne le plus possible à distance de vous...
Alexandre sentait son cœur cogner sourdement dans sa poitrine. Il retenait son souffle et mit du temps avant de respirer de nouveau normalement. Puis quelque chose se dénoua en lui lorsqu’il croisa le regard d’Elizabeth. Par tous les saints, ce qu’il lisait là
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