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Le temps des illusions

Le temps des illusions

Titel: Le temps des illusions Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Evelyne Lever
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abandonna bientôt son carrosse pour s’engouffrer dans un fiacre et en route pour l’Hôtel de Ville comme un simple particulier. On s’étonnera peut-être de savoir le roi d’humeur aussi badine alors qu’il pleurait la mort deMme de Châteauroux il y a deux mois. Peu de gens savent qu’une femme est entrée depuis peu dans sa vie. Il s’agit deMme d’Étiolles queBinet, son valet de chambre, lui a présentée. Le jour du mariage du dauphin,Louis XV l’a fait inviter au bal paré et ce soir, il a rendez-vous avec elle.
    En arrivant à l’Hôtel de Ville, la foule est si bruyante et si dense que le roi préfère aller au bal de l’Opéra. Il y danse longtemps sans être reconnu avant de retourner à l’Hôtel de Ville où l’attend Mme d’Étiolles, laquelle vient de passer quelques moments pénibles. À moitié étouffée par des bandes de masques qui voulaient l’entraîner, elle a demandé secours àM. de Bernage. Il l’a conduite dans un petit salon où s’est réfugié lemarquis de Valfons en galante compagnie. Les dominos et les masques évitent les présentations. Aussi Valfons ignore-t-il la jolie Mme d’Étiolles qui essaie de rajuster ses vêtements froissés par la foule. Le jeune homme se demande quel heureux mortel a rendez-vous avec elle. L’arrivée soudaine de deux dominos masqués satisfait bien vite sa curiosité. Stupéfait, il reconnaît le roi au son de sa voix et leduc d’Ayen à sa haute stature. Ils entraînent aussitôt Mme d’Étiolles avec eux. Valfons vient de découvrir un passionnant secret et se demande où les amants vont se réfugier. Jamais il n’oserait imaginer le projet du roi :Louis XV a décidé de passer la nuit chez sa nouvelle maîtresse, rue Croix-des-Petits-Champs, carM. Le Normant d’Étiolles est fort opportunément parti en voyage. Voici donc le roi, son amante et le duc d’Ayen en fiacre partis de l’Hôtel de Ville pour la rue Croix-des-Petits-Champs, mais le souverain n’a pas la moindre idée de ce que peut être la circulation dans la capitale un soir de liesse. Impossible d’avancer. Louis s’impatiente, veut donner un énorme pourboire au cocher ; le duc d’Ayen l’en empêche. Ce serait éveiller les soupçons, se faire peut-être reconnaître.D’Ayen donne un écu au bonhomme qui fouette ses chevaux, menace les badauds et parvient à se frayer un chemin jusqu’au paradis des amours illégitimes.
    À neuf heures du matin,Louis XV est rentré à Versailles où il a aussitôt assisté à la messe avant de se coucher en demandant qu’on le réveille à cinq heures.

    Les calculs de messieurs les financiers
    Les escapades du roi amusent la Cour qui préfère voir S.M. courir le guilledou plutôt que de se morfondre. Qu’il prenne donc du bon temps avant de choisir une nouvelle maîtresse. Toutes les jolies femmes espèrent succéder aux sœurs Nesle. À l’exception deMme de Flavacourt, Louis les a toutes aimées, même la grosseLauraguais pourtant traitée en favorite subalterne. Qui sera la prochaine élue ? La plupart des grandes familles du royaume espèrent que S.M. désignera l’une des leurs : partager la couche royale est un privilège aristocratique. Et les courtisans se gaussent en apprenant que des bourgeoises et des épouses de financiers comme laprésidente Portail ouMme de La Poplinière briguent cet honneur qui s’apparente à une charge aulique.
    Personne ne se doute que la dame du bal de l’Hôtel de Ville a conquis le roi. Personne exceptéBinet, pourvoyeur et protecteur des amours royales. Le valet de chambre a peut-être fait un heureux choix pour le monarque, mais sûrement pas pour la Cour. Tout dévoué à son maître et fier de sa noblesse récente – il estbaron de Marchais –, Binet conserve des liens étroits avec son milieu d’origine, le monde de la finance, à l’intérieur duquel existent de puissants réseaux soudés par des intérêts communs, des alliances matrimoniales et des protections princières ou ministérielles. Depuis 1726, une compagnie de soixante financiers constituant la Ferme générale avance des fonds au roi, perçoit en son nom les impôts indirects et reçoit ensuite l’intérêt de ses avances. La Ferme, dont le siège administratif se situe à Paris, rue de Grenelle-Saint-Honoré, est devenue une institution permanente. Présente partout dans le royaume avec son personnel de contrôleurs, de gabelous à la recherche des fraudeurs, elle dispose de privilèges

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