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Le temps des poisons

Le temps des poisons

Titel: Le temps des poisons Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: C.L. Grace
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compte de l'exclamation du sergent qui clamait qu'il mourait de faim. J'étais en effet tailleur de pierre, et bon artisan, membre de la guilde de Douvres.
    Il se redressa.
    —
    C'était avant que je comprenne que le Seigneur m'appelait à être un bâtisseur d'une autre sorte, pour ériger son Église d'une façon plus spirituelle. Je me suis rendu à Cantorbéry et l'archevêque Bourchier m'a accepté dans les saints ordres.
    —
    Ah, Bourchier ! releva Kathryn, taquine. Sa Grâce a maintenant quatre-vingts ans passés. Il a l'air d'être vieux depuis si longtemps !
    —
    Eh bien, c'est lui qui m'a ordonné, précisa le père Clement. Il m'a nommé à Hardlestone, puis, depuis seize ans, à Walmer. Pourtant les habitudes ont la vie dure. J'aime le contact de la pierre, j'aime la tailler. Venez, faisons le tour de l'église.
    Il les précéda et s'arrêta près de l'étroite porte des morts. Il signala que la chapelle du côté ouest était une addition plus tardive due à un autre seigneur et qu'il s'était occupé du briquetage. Ils longèrent l'église. Derrière, entouré d'arbres, se dressait le presbytère, maison à un étage flanquée d'ailes qui enserraient une cour dallée. Les bâtiments coiffés d'ardoise noire possédaient des fenêtres rondes, certaines garnies de verre, d'autres de panneaux de toile tendue. Le père Clement expliqua qu'une des ailes servait d'écurie et d'appentis, l'autre d'atelier. Il proposa à ses compagnons de suivre Amabilia dans la maison - offre qu'il n'eut pas à réitérer - pendant qu'il emmenait Kathryn et Colum dans ce qu'il nomma sa demeure de pierre, une longue construction basse aux courtes poutres entrecroisées. Au centre se trouvait un grand établi encombré d'outils, de haches, de ciseaux, de fils à plomb, de compas, et, tout autour, des blocs de pierre, du grès d'excellente qualité, et des auges portant des instructions lisibles peintes sur leur flanc : deux mesures de sable et une de chaux.
    —
    On vous livre les pierres ? interrogea Colum.
    —
    En effet ; les fardiers chargés sont derrière. Lord Henry est un protecteur généreux. Il m'a dit qu'il ferait venir de la pierre de l'Oxfordshire et de Portland, dans le Sud-Ouest, ainsi que les meilleurs moellons proposés sur le marché.
    Il les fit sortir. Kathryn, en trébuchant sur le seuil, bouscula le couvercle d'un bidon à lait. Elle s'arrêta, le ramassa et allait le remettre en place quand elle remarqua l'odeur presque rance. Non seulement le lait avait tourné mais il commençait à sécher. Le père Clement présenta ses excuses et lui prit le couvercle des mains en se justifiant ; à cause des événements, on avait négligé les tâches domestiques. Néanmoins, ajouta-t-il, prolixe, le repas préparé par Amabilia serait sans nul doute délicieux.
    —
    La toilette des corps a été faite, déclara Simon le bedeau en traversant la cour d'un pas décidé. Mais Dieu seul sait où sont les âmes !

    Il serrait une chope. C'était, de toute évidence, un ivrogne, mais pas un écervelé, ce que dénotaient ses yeux bleu acier et ses traits résolus.
    Sur le seuil, Amabilia les appelait à grands signes.
    —
    Venez vite, tout est prêt.
    Kathryn et Colum la rejoignirent tandis que Simon entraînait le prêtre à l'écart pour lui glisser quelques mots à l'oreille.
    —
    Qu'y a-t-il dans ce sac ? s'enquit Murtagh.
    —
    Vous verrez, répondit sa femme avec un clin d'œil. Je crois que nous allons découvrir maints secrets, Colum. Nos bons paroissiens ont beaucoup à cacher.
    Ils entrèrent dans le presbytère. Il était confortable et accueillant : il n'y avait pas de jonchée ; le dallage était récuré et des pots d'herbes aromatiques disposés dans les coins. C'était, à l'origine, une grande pièce qu'on avait divisée. Par une porte entrebâillée, sur sa droite, Kathryn aperçut des chaires et des tabourets garnis de coussins. Le réfectoire, longue salle qui donnait sur la cuisine, se trouvait à gauche. Au fond, la cheminée était à présent dissimulée derrière un écran décoré. Au-dessus des lambris, de part et d'autre de l'âtre, on avait accroché des tableaux, des tapisseries et des tentures. La longue table sur tréteaux avait été frottée. Amabilia y avait disposé des plats, des cuillères en corne et des chopes d'étain. Le dîner qu'elle servit - des morceaux de bœuf épicé accompagnés d'écuelles de légumes - était savoureux et elle annonça avec fierté qu'elle

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