Le Testament Des Templiers
la vitrine pour la placer du côté « Fermé ».
Il entendit une chaise glisser sur le parquet.
Il sentait des regards perçants dans son dos.
Le tenancier se mit à ranger des verres bruyamment sur une étagère.
Luc, agacé, était sur le point de se retourner pour affronter les regards hostiles lorsqu’il entendit un crissement de freins.
Un véhicule de gendarmerie bleu et blanc s’était arrêté pile derrière sa Land Rover. Luc se leva aussitôt, soulagé.
« Je les ai appelés pour ma voiture, dit-il à Hugo. Sors dès que tu es prêt. »
Il foudroya du regard les hommes dans le coin mais ceux-ci se contentèrent de détourner les yeux.
Le cafetier fit le tour du comptoir et flanqua leur addition sur la table.
« Faut que je ferme. »
Luc regarda l’addition avec mépris, jeta quelques euros sur la table et dit à Hugo :
« Ne change pas trop vite d’opinion sur la campagne. »
8
L uc fixa longuement le téléphone avant de décrocher et de composer le numéro qu’il avait trouvé sur le site de Sara. Cet appel lui coûtait ; ce n’était pas du tout dans ses habitudes, mais les circonstances étaient exceptionnelles.
Il avait besoin de réunir les meilleurs éléments, et personne n’était plus compétent qu’elle dans sa spécialité. Il se refusait simplement à faire des compromis.
De son bureau sur le campus de Bordeaux, il regardait une tempête venue de l’Atlantique déferler sur les bâtiments. La tonalité familière insistante de la Grande-Bretagne résonna dans son oreille, puis, comme par enchantement, il entendit sa voix douce et mélodieuse.
« Allô, Sara ?
– Luc ?
– Oui, c’est moi. »
La ligne devint silencieuse, et il demanda si elle était encore là.
« Je suis là. Je réfléchis pour savoir si je dois ou non te raccrocher au nez. »
Leur première rencontre remontait à deux ans.
Elle avait passé l’été à Paris pour travailler sur son livre, Un éclairage palynologique du passage du magdalénien au mésolithique. Elle n’avait pas l’ambition de le faire figurer sur les listes de best-sellers, mais il aurait ajouté encore davantage à ses références déjà importantes.
Lui se trouvait aux Eyzies pour faire des relevés et entamer la première tranche de ce qui devait être une campagne de plusieurs années.
Ils étaient restés « ensemble » – selon son expression à elle – pendant deux ans. Il l’avait entendue faire un exposé dans son mauvais français lors d’une conférence sur le pléistocène à l’université de Paris, et s’était arrangé pour l’aborder au cours du cocktail qui avait suivi. Plus tard, elle dirait à ses amies l’avoir remarqué pendant qu’il manœuvrait habilement à travers l’assistance, espérant que ce beau brun aux manières de voyou viendrait vers elle. Il l’avait désarmée par ses éloges enthousiastes sur son travail, formulés dans un parfait anglais américain. Ce soir-là, ils avaient dîné ensemble. Le lendemain soir aussi.
Elle avait avoué à ses amies, et même à sa mère en Californie, qu’elle avait cédé. Elle avait bu le philtre d’amour et en redemandait encore. Le fait qu’ils parlaient le même langage professionnel était plaisant, mais pas suffisant pour expliquer son attirance. Elle connaissait sa réputation, mais il avait en plus quelque chose de sauvage et d’indomptable qui lui donnait envie de relever le défi. Et comme il avait presque dix ans de plus qu’elle, elle espérait qu’il aurait amplement profité de sa jeunesse pour aspirer maintenant à une forme de monogamie. Elle mena leur relation tambour battant, semblable au conducteur de locomotive qui n’arrête pas de pelleter du charbon pour faire avancer sa machine. Elle n’en pouvait plus de l’entendre répéter que jamais il n’avait eu une aussi longue liaison avec une femme. Pour gommer la distance entre son poste à Paris et le sien à Bordeaux, elle passait presque tout son temps dans le train. Alors qu’elle supposait qu’il allait lui proposer de le rejoindre sur le site de ses fouilles, l’invitation ne s’était jamais matérialisée, et la rumeur avait fait état d’une amitié très spéciale qu’il entretenait avec une jolie géologue hongroise de son équipe.
De plus en plus inquiète de son silence, elle avait loué une voiture et débarqué chez lui un vendredi après-midi, sans prévenir. Devant son air faussement ravi en la voyant et les
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