Le Testament Des Templiers
autochtones sympathiques, dit Hugo avec mépris. Veux-tu que nous remettions les cannettes de bière en place ?
– Je ne vais pas laisser tout ça gâcher ma bonne humeur », affirma Luc, les mâchoires serrées.
Il se mit à ramasser les morceaux de verre avec le carton déchiré.
« Rien ne pourrait gâcher ma bonne humeur. »
Sur le point de démarrer, il fouilla dans la boîte à gants et poussa un juron.
« Je croyais que rien n’allait gâcher ta bonne humeur, dit Hugo.
– Ma carte grise a disparu. Pourquoi diable m’avoir volé mes papiers ? »
Il rabattit brusquement le volet et démarra en maugréant.
Dans le centre de Ruac, ils s’arrêtèrent au petit café anonyme, dont l’enseigne indiquait : CAFÉ-TABAC . Lorsque Hugo voulut fermer la voiture, Luc lui montra la vitre brisée et se moqua de lui ; mais avant d’entrer, il le mit en garde.
« Fais très attention à ce que tu dis. Nous avons un secret important à protéger. »
Le café n’était pas très éclairé. Il y avait là six tables recouvertes de nappes en plastique, dont une seule était occupée. Le propriétaire trônait derrière le comptoir. Il avait une peau parcheminée, des cheveux gris abondants, une moustache poivre et sel, et un ventre proéminent. Les deux clients, un jeune homme et une femme plus âgée, s’étaient arrêtés de parler et les dévisageaient comme s’ils arrivaient d’une autre planète.
« On peut manger ? » demanda Hugo.
Le propriétaire désigna une des tables et, d’un geste brusque, y posa deux menus avant de se retirer en direction de sa cuisine en traînant ses jambes lourdes sur le parquet.
Luc le rappela et lui demanda où se trouvait la gendarmerie la plus proche. Le tenancier fit lentement demi-tour.
« Pourquoi ?
– Quelqu’un a cassé la vitre de ma voiture.
– Pendant que vous rouliez ?
– Non, j’étais garé.
– Où ça ? »
Devant cet interrogatoire, Luc regarda Hugo d’un air incrédule.
« Ça n’a aucune importance, dit-il pour en finir.
– Probablement dans un endroit interdit », marmonna le vieil homme dans sa barbe, mais suffisamment fort pour qu’ils l’entendent. Puis il haussa la voix :
« À Sarlat. Il y a un commissariat à Sarlat. »
Hugo renifla l’air ambiant. Il connaissait bien cette odeur. L’arôme de son gagne-pain.
« Il y a eu un incendie dans les parages ? demanda-t-il au vieux.
– Un incendie ? Vous sentez quelque chose ?
– Oui.
– C’est probablement mes vêtements. Je suis le chef de la brigade locale de pompiers. C’est ça que vous sentez. »
Hugo haussa les épaules et se mit à regarder la belle femme brune assise à la table dans le coin. Elle ne devait pas avoir plus de quarante ans. Sa chevelure était souple et naturellement bouclée, ses lèvres pleines, et elle exhibait de jolies jambes nues et bronzées sous une robe moulante. Son compagnon, la carrure massive et le teint rougeâtre d’un fermier, était de dix ans plus jeune au moins. Et comme il était peu probable qu’il soit son petit ami ou son mari, Luc pensa qu’Hugo n’allait pas rater cette occasion de se manifester.
Fidèle à lui-même, Hugo adressa un sourire à la femme en même temps qu’un signe de tête :
« Belle journée. »
Elle esquissa une mimique qui, s’il s’agissait d’un sourire, dura à peine une seconde. Pour mettre fin au manège, son compagnon prit un air renfrogné, lui administra une petite tape sur l’avant-bras, et ils poursuivirent leur conversation.
« L’endroit est plaisant, dit Hugo à Luc. Ils ont pris des omelettes. Je vais en faire autant. Il faut toujours imiter les autochtones. »
Luc s’excusa et revint quelques instants plus tard pour s’apercevoir qu’Hugo avait commandé des bières.
« C’était propre ? demanda Hugo.
– Pas vraiment. »
Il posa son téléphone mobile sur la table.
« À nous », dit Luc en trinquant avec la bière qu’Hugo avait commandée.
Ils parlèrent à voix basse pendant qu’ils dévoraient leur omelette de trois œufs au fromage accompagnée de frites.
« Tu sais qu’il va falloir que j’abandonne tout, dit Luc d’un air rêveur. Tous mes projets devront s’arrêter. Aucun ne sera jamais terminé.
– Ça me semble évident, répondit Hugo, mais ça ne te pose pas trop de problèmes, non ?
– Bien sûr que non ! Mais je me sens accablé tout d’un coup. On n’est jamais préparé à
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