Le Testament Des Templiers
profiter de sa première nuit tranquille depuis la découverte. La possibilité de fuites, de vandalisme et de pillage l’avait rendu malade d’inquiétude. Tout ça était maintenant derrière lui.
Le travail pouvait commencer.
Malheureusement, il fallait attendre le milieu de l’automne pour voir le début effectif de la campagne. On ne pouvait pas se contenter de claquer des doigts. Il devrait réunir une équipe, dresser des emplois du temps, définir le matériel, établir une comptabilité et trouver des logements.
Cette dernière tâche, apparemment simple, se révéla finalement difficile. Luc était bien décidé à loger tout le monde à proximité, de préférence à Ruac. Rien ne l’énervait plus que de perdre un temps précieux en transport vers le site de fouilles. On lui conseilla de se mettre en rapport avec le maire de Ruac, un certain M. Bonnet, pour voir s’il y avait des maisons à louer. Sinon, il devrait se contenter d’une autorisation pour installer des caravanes et des tentes dans un champ, à condition d’avoir un point d’eau accessible. La vie à la dure ne lui déplaisait pas. En fait, camper renforçait le sentiment de camaraderie dans ce genre d’entreprise. Le manque de confort matériel contribuait généralement à créer des liens étroits.
Mais il n’apprécia pas du tout d’apprendre au tout dernier moment que le maire et le propriétaire du café étaient une seule et même personne.
Bonnet fit asseoir Luc à la même table recouverte de plastique qu’avant et, sans dire un mot, écouta ses requêtes, ses gros bras bien serrés comme s’il voulait empêcher ses tripes de se répandre.
Luc déploya tous les arguments qu’il avait à sa disposition : le maire contribuerait à la prospérité de son café, de sa ville, de son pays. Ses collaborateurs se conduiraient en bons voisins respectueux. Il organiserait une visite privée de cette merveilleuse nouvelle grotte ; s’il y avait une Mme Bonnet, elle serait aussi la bienvenue. Le maire devait sans doute être curieux de toute cette agitation ? Certainement. Pendant que Luc insistait et s’enferrait dans sa conversation unilatérale, le menton mal rasé du maire ne bougea pas d’un iota.
Luc regrettait déjà son clin d’œil.
Quand il eut terminé, Bonnet secoua la tête et cracha :
« Nous tenons à notre paix et à notre silence à Ruac. Personne ici ne s’intéresse à votre précieuse grotte. Nous ne sommes pas intéressés par vos études. Nous ne voulons pas de touristes. Vous n’avez nulle part où loger, monsieur. »
Sur ces mots, il se leva et regagna sa cuisine.
« Un franc succès », marmonna Luc dans sa barbe en sortant.
Un couple de jeunes refusa de le laisser passer sur le trottoir, obligeant Luc à descendre sur la chaussée. Ils ricanèrent de l’avoir forcé à faire ce détour.
Il se sentait d’humeur combative et envisagea un instant de leur infliger une bonne correction. Mais il préféra ne rien dire et remonta, furieux, dans sa Land Rover. Au moins sa vitre était restée intacte, pensa-t-il avec amertume en voyant le village disparaître dans son rétroviseur.
Heureusement, l’abbé Menaud vint à sa rescousse. Un champ bien plat et au sec faisant partie du domaine de l’abbaye s’étendait derrière les anciennes étables, suffisamment éloigné pour que les moines et les archéologues ne puissent pas se gêner. Il ne demandait aucune compensation, sinon la possibilité de visiter la grotte à un moment qui ne serait pas inopportun.
Un dimanche d’octobre, par grand vent, les membres de l’équipe de la grotte de Ruac arrivèrent un par un au campement de l’abbaye. Luc était là depuis une semaine avec deux de ses doctorants, Pierre, un Parisien originaire de Sierra Leone, et Jeremy, un Britannique avec un fort accent de Manchester. Ils formaient un drôle de couple, Pierre, noir comme de l’onyx, grand et athlétique, et Jeremy, incolore et maigrichon, mais ils avaient en commun un humour de potache, et étaient ravis de participer à une entreprise historique. Ils travaillèrent d’arrache-pied à installer le campement pour réserver le meilleur accueil à l’équipe.
Des caravanes étaient disposées en cercle, comme les chariots autrefois dans l’Ouest américain pour se protéger des attaques. Chaque doctorant aurait droit à sa caravane personnelle, les deuxièmes cycles logeraient à deux, et les étudiants logeraient à trois en
Weitere Kostenlose Bücher