Le tombeau d'Alexandre

était en jeu. Il lui suffisait de regarder Nessim et ses hommes pour savoir que ceux-ci n’hésiteraient pas à passer leur colère sur lui.
    Ils arrivèrent au chemin de terre et poursuivirent leur route jusqu’à la cour. Puis ils descendirent de voiture, pataugèrent dans la boue et ouvrirent la porte en acier du vieux bâtiment en raines. L’espace d’un instant, Karim ne vit rien. Son cœur s’emballa comme un cheval au galop. Puis il finit par discerner la jeep et avala sa salive avec soulagement.
    Un des hommes souleva la bâche pour voir la plaque d’immatriculation.
    — C’est bien la sienne, confirma-t-il.
    — Bien, dit Nessim en ouvrant à nouveau son portefeuille.
    Il tendit à Karim la récompense promise.
    — Maintenant, tire-toi d’ici et ne reviens pas, lui lança-t-il.
    Karim prit les billets et marcha à grandes enjambées vers le chemin de terre, comme s’il était poursuivi par le diable. Il se retourna timidement et vit Nessim distribuer des torches et des pistolets à ses hommes, qui se déployèrent pour se tenir en embuscade. Il était clair que le propriétaire de la jeep était en danger de mort, mais Karim s’en moquait totalement. Sa vie allait enfin commencer.
     
    III
    La pluie s’engouffrait en rafales à travers les vitres brisées de la Subaru, tandis que Knox et Rick arrivaient à Tanta.
    — Tu veux qu’on attende que ça se calme ? demanda Knox.
    — Non, répondit Rick, les yeux plissés. Ça ne va pas durer.
    De toute évidence, il connaissait bien le climat, car l’averse passa rapidement. Ils mirent le chauffage à fond pour faire sécher leurs vêtements trempés. Puis Rick quitta la route principale et se dirigea vers le sud.
    — Où est-elle, cette foutue ferme ? grommela-t-il.
    — Droit devant, répondit Knox en s’efforçant de paraître sûr de lui.
    Un jeune homme jaillit de l’obscurité et les fixa la bouche et les yeux grands ouverts. Le ciel était couvert et il faisait si sombre que Rick et Knox dépassèrent le chemin de terre et durent faire marche arrière. La pluie avait rempli les ornières. La voiture bringuebala violemment, les suspensions crissèrent et les phares dansèrent sur les arbres et les granges. Rick, penché en avant au-dessus du volant, regardait attentivement devant lui et avançait au pas.
    — Qu’est-ce qui se passe, vieux ? lui demanda Knox.
    — Le gosse qu’on vient de voir. Il m’a donné un mauvais pressentiment.
    — Tu veux faire demi-tour ?
    — Une fois qu’on aura repris la route principale, on ne pourra pas faire plus de dix kilomètres avec le pare-brise dans cet état.
    — Vas-y doucement, alors.
    — Qu’est-ce que tu crois que je fais, nom de Dieu !
    Les nerfs à vif, à l’affût du moindre signe, ils roulèrent le plus lentement possible jusqu’à la cour. Les phares se reflétaient dans l’eau de pluie qui s’était accumulée sur le béton. Dans une flaque de boue, Rick et Knox repérèrent tous deux de fraîches empreintes de pas.
    — Merde ! s’écria Rick.
    Il appuya à fond sur l’accélérateur et fit crisser les pneus dans un brusque demi-tour qui propulsa Knox contre sa portière.
    Le Freelander blanc de Nessim surgit pleins phares à travers les arbres et les éblouit. Rick donna un coup de volant pour l’éviter, mais la Subaru dérapa et vint se fracasser contre son capot. Dans une explosion de verre brisé, les airbags se déployèrent et les clouèrent dans leur siège. A peine Knox eut-il le temps de recouvrer ses esprits qu’il reçut un coup sur la tempe. Il fut hissé hors de la voiture par le col et traîné sans ménagement sur le béton jusqu’au vieux bâtiment, ainsi que Rick. Les oreilles bourdonnantes, il était trop abasourdi pour résister. La porte en acier se referma comme un piège. Nessim l’obligea d’un coup de pied à se tourner sur le dos.
    — C’est qui, ton pote ? lui demanda-t-il.
    Rick gémit et se frotta le front, une traînée de sang dans les cheveux, puis tenta de se mettre à genoux mais s’effondra en vomissant. Les Égyptiens éclatèrent de rire.
    — Ce n’est pas un ami, marmonna Knox, encore totalement désorienté. C’est mon chauffeur. Il n’a rien à voir là-dedans. Laisse-le partir.
    — C’est ça !
    — Je te jure qu’il n’a rien à voir dans tout ça.
    — Alors ce n’est pas son jour de chance.
    Knox se redressa sur un coude et retrouva l’usage de ses sens.
    — Ça rapporte gros de