Le tombeau d'Alexandre

combien il avait sur lui.
    — Dis-lui qu’on veut des preuves. Dis-lui d’envoyer des photos. Si c’est la jeep de Knox, ils auront sept cent cinquante dollars chacun.
    — Le gosse refuse d’y retourner. Il pense qu’Abdallah le fera suivre et qu’il ne touchera rien du tout.
    Nessim éclata de rire. Il avait lui-même rencontré Abdallah deux fois et, à chaque fois, il avait instinctivement vérifié ses poches pour s’assurer qu’il avait toujours son portefeuille.
    — Demande-lui de décrire exactement ce qu’il a vu.
    Ratib s’exécuta.
    — Il dit que la voiture se trouvait sous une bâche verte. Il a jeté un coup d’œil à l’intérieur. Il dit qu’il a vu un carton rempli de CD et de livres.
    Nessim arracha le téléphone des mains de Ratib.
    — Quel genre de livres ? demanda-t-il.
    — Je ne sais pas, répondit le gosse, qui avait l’air terrifié et dépassé par les événements. Ils étaient écrits dans une langue étrangère.
    Nessim se rappela les ouvrages d’archéologie qu’il avait pris dans la chambre d’hôtel de Knox.
    — Il y avait des images ?
    — Oui.
    — Quel genre ?
    — Des ruines et des hommes, comme ceux qui creusent dans le désert.
    Nessim serra les poings.
    — Ne bouge surtout pas. On arrive !
     
    II
    — La pierre de Rosette ? demanda Rick en prenant quelques photos de la peinture avec son appareil numérique avant de s’enfoncer davantage dans la galerie. Je sais ce que tout le monde en sait, pourquoi ?
    — C’est-à-dire ?
    — C’est un gros morceau de basalte noir, je crois, provenant d’une stèle monumentale.
    — Une roche qui contient du quartz. Des amas gris scintillants veinés de rose, avec un peu trop de poussière londonienne.
    — Elle porte des inscriptions en trois langues différentes : hiéroglyphes, démotique et grec, c’est ça ?
    — Exact.
    Ils découvrirent une deuxième peinture, semblable à la première. Rick prit deux photos. Le flash étincela dans l’obscurité.
    — Les archéologues ont compris que cette pierre leur permettrait peut-être de déchiffrer les hiéroglyphes, poursuivit Rick, et ils en ont cherché d’autres fragments. Qui valaient leur poids en diamants, comme on a dit à l’époque.
    Il se tourna vers Knox.
    — Est-ce que c’est ça qu’on cherche ? demanda-t-il. Le reste de la pierre de Rosette ?
    — Non.
    — En tout cas, ils n’ont rien trouvé. En fait, à l’origine, la pierre ne provenait pas de Rosette. Elle avait été amenée là comme simple matériau de construction. Quoi qu’il en soit, les Français se sont fait avoir et elle a atterri au British Muséum.
    Les parois de la galerie étaient devenues noires comme du charbon et striées de longues cicatrices.
    — Il a dû y avoir un sacré incendie ici, murmura Rick en prenant des photos.
    — Tu me parlais de la pierre de Rosette, insista Knox.
    — Oui. On en a fait des copies. Et il y a eu une véritable course au déchiffrement, menée essentiellement par Thomas Young et Jean-François Champollion. C’est Champollion qui est arrivé en tête. Il a envoyé une lettre annonçant ses résultats. C’était dans les années 1820, c’est ça ?
    — En 1822. Le vendredi 27 septembre, pour être exact, date de la naissance de l’égyptologie moderne. Mais tu sembles oublier quelque chose.
    — Quoi ?
    — L’inscription. Que dit-elle ?
    Rick rit de bon cœur.
    — Tu as raison. Je n’y avais pas pensé !
    — Tu n’es pas le seul. La pierre de Rosette est un véritable monument, une icône, et personne ne sait de quoi parle le texte !
    — Vas-y, raconte.
    Knox orienta sa torche droit devant lui et le marbre blanc d’un portail brilla légèrement entre deux loups fantomatiques.
    — Il s’agit du décret de Memphis, destiné à commémorer l’avènement de Ptolémée V en 196 avant Jésus-Christ. L’âge d’or des Ptolémées était déjà révolu à cette époque, en raison de la politique menée par Ptolémée IV Philopatôr.
    — Le fêtard ? demanda Rick, accroupi pour photographier les loups.
    — Oui. Philopatôr ne pensait qu’à son propre plaisir et il n’a pas hésité à imposer les paysans pour financer ses frasques. Un roi séleucide, Antioche III, en a conclu que c’était le moment de s’attaquer à l’Empire ptolémaïque. Il s’est emparé de Tyr, de Ptolémaïs et d’une bonne partie de la flotte égyptienne.
    — Épargne-moi les détails. Je te