Le Tombeau De Jésus
acrimonie à mon égard culmina quand elle porta plainte contre moi, m’accusant d’avoir pénétré dans un tombeau sans son autorisation et même de l’avoir endommagé. J’étais pourtant en bonne compagnie. Avant que les accusations ne soient rejetées, le Dr Shimon Gibson fut placé en garde à vue dans un commissariat pour interrogatoire. Finalement, les charges contre nous ont été abandonnées 6 .
Dans ce climat de suspicion, la quête des ossuaires liés à la famille de Jésus devint une entreprise particulièrement mal vue. Je m’y suis néanmoins consacré pendant la plus grande partie de l’année 2005, et jusqu’à ce jour en 2006.
L’affaire avait en effet rebondi après un coup de fil de James Tabor au printemps 2004, qui me demanda de but en blanc si je savais ce qu’était devenu le tombeau de Talpiot après sa découverte en 1980. Je supposais que les trois archéologues chargés des fouilles — Yoseph Gat, Amos Kloner et Eliot Braun – avaient laissé le terrain à l’entreprise de bâtiment, après avoir accompli leur travail, et que celle-ci avait détruit le tombeau en édifiant l’immeuble de Talpiot.
— C’est ce que je pensais moi aussi, reprit Tabor. Mais écoute ça. Je me trouvais à Jérusalem en compagnie de mon ami l’archéologue Shimon Gibson. Depuis que nous avons fouillé le tombeau au linceul, il m’interroge sur notre conversation à propos des fragments d’ossements dans l’ossuaire de Jacques, et je lui ai exposé ta théorie selon laquelle ils provenaient de Talpiot, et non du tombeau au linceul. Et devine qui, en 1980, a dessiné la carte du tombeau de Talpiot qui figure sur le rapport interne rédigé par Kloner pour l’AAI en 1996…
— Je suppose que c’est Kloner qui a dessiné la carte.
— Non, c’est Shimon lui-même ! Quelle extraordinaire coïncidence, n’est-ce pas ? Shimon n’avait même pas vingt ans à l’époque, mais c’était déjà un géomètre topographe expérimenté auprès de l’AAI. Kloner lui avait donc demandé de relever le plan du tombeau et d’en faire l’esquisse. Et ce n’est pas tout. J’ai dit à Shimon à quel point il était dommage que le tombeau ait été détruit, et il m’a répondu qu’il n’en était rien !
Le tombeau de famille de Jésus est intact , pensai-je. Je m’efforçai de conserver mon calme pour rester concentré sur la suite du récit de Tabor.
James et Shimon s’étaient rendus à Talpiot. Shimon avait eu du mal à retrouver son chemin – le quartier avait beaucoup changé en vingt-six ans. Finalement, il réussit à reconstituer l’environnement du tombeau en prenant une station-service comme point de repère. Les deux hommes s’étaient alors mis à sonner aux portes pour demander aux gens s’ils avaient un tombeau dans leur cave ! Après plusieurs essais infructueux, un type leur avait dit : « Moi, je n’ai pas de tombeau dans ma maison, mais les Mizrahi à côté en ont un. » Passé le moment de surprise, cette famille sépharade les avait invités à entrer. Dans le patio, il y avait deux nefesh qui dépassaient du sol.
Un nefesh est un puits funéraire. Les autorités rabbiniques insistent pour en aménager lorsqu’un immeuble est construit au-dessus d’un tombeau. Ces puits ont deux fonctions : d’une part, permettre un accès entre le tombeau et le monde extérieur afin que les âmes des défunts puissent aller et venir à leur guise ; d’autre part, assurer un accès à l’espace créé entre le toit d’un tombeau et le sol de l’appartement au-dessus.
Cet espace est lié à la notion de pureté rituelle, centrale dans le judaïsme. Aujourd’hui, certains confondent l’« impureté rituelle » avec la notion de « saleté ». Les féministes juives, par exemple, sont révoltées par le fait que le judaïsme orthodoxe considère que les femmes sont rituellement impures durant leur cycle menstruel. Elles estiment qu’il s’agit d’un vestige du système patriarcal propre au judaïsme traditionnel. Mais elles font fausse foute. Après une éjaculation, les hommes sont également rituellement impurs. Le corps d’un proche est rituellement impur à sa mort. Ce concept n’a rien à voir avec la propreté et la saleté. Il est intrinsèquement lié à la vie, à son absence et au rituel.
Selon le judaïsme, la vie est sacrée. Quand il y a vie ou potentiel de vie, il y a état de sainteté. Quand la vie ou un potentiel de vie disparaît,
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