Le Tombeau De Jésus

l’« ossuaire de Jacques » faisait la une du New York Times, puis de toute la presse internationale, et trente secondes des images que j’avais prises dans l’appartement de Golan firent le tour de la planète grâce à CNN.
    Le 31 octobre 2002, l’ossuaire fit à nouveau les gros titres des journaux. Cette fois parce qu’il avait subi des dommages durant son transport vers Toronto, où il devait être exposé au musée royal de l’Ontario. Là encore, je fus au centre de l’action, en filmant l’ossuaire cassé, le processus de restauration et sa première présentation au public.
    Cent mille personnes défilèrent devant l’ossuaire au cours de cette exposition. L’une d’elles était le professeur James Tabor, expert en archéologie biblique à l’université de Caroline du Nord. J’ai filmé Tabor sans le savoir alors qu’il examinait l’ossuaire dans sa vitrine. Il faisait partie des nombreux d’universitaires qui se trouvaient à Toronto par le plus grand des hasards. En effet, la Society of Biblical Literature (SBL), l’American Academy of Religion (AAR), l’American School of Oriental Research (ASOR) et la Biblical Archaeology Society (BAS) avaient toutes décidé de tenir leur congrès annuel dans le même hôtel de la métropole canadienne. Étrange coïncidence.
    Je ne connaissais pas Tabor à cette époque. Je ne devais lui parler pour la première fois que quelques mois plus tard, après que l’ossuaire eut été ramené à Jérusalem, où, après enquête, l’AAI déclara qu’il s’agissait d’un faux. Il me téléphona à mon domicile un dimanche soir.
    Après les présentations d’usage, Tabor m’apprit que l’année précédente, avec son ami l’archéologue Shimon Gibson, il avait fouillé un tombeau pillé par des voleurs. Ils y avaient trouvé des résidus humains en très mauvais état, mélangés à ce qui, sous le microscope, s’avéra être des fragments du plus ancien linceul découvert en Israël. Il remontait à l’époque de Jésus et, comme le révélèrent les tests, avait jadis enveloppé un homme mort de la lèpre – le plus ancien cas diagnostiqué dans le monde. Cette découverte prouvait que les contemporains de Jésus pouvaient être affectés par cette maladie. Récemment, des scientifiques avaient avancé l’idée que le terme « lèpre » présent dans les Évangiles désignait en réalité des éruptions cutanées. La découverte de Tabor et de Gibson mit un point final à ces spéculations.
    À l’époque, Tabor mettait la dernière main à son ouvrage, La Dynastie de Jésus.
    —  Je vais vous faire une confidence, me dit-il. Je pense que l’ossuaire de Jacques d’Oded Golan provient du tombeau où nous avons trouvé le suaire. Je ne crois pas qu’il le détienne depuis les années 1970 comme il l’affirme. Je pense qu’il est en sa possession depuis un an. Et je crois que l’inscription de l’ossuaire est authentique.
    — Pourquoi aurait-il menti sur la date d’achat de l’ossuaire ? lui demandai-je.
    — En 1978, Israël a modifié sa législation sur les antiquités. En conséquence, si vous avez trouvé ou acheté un objet avant 1978, il est légalement à vous, mais si c’est après cette date, et s’il s’agit d’une découverte importante, l’objet appartient à l’État.
    — Pourquoi pensez-vous que l’ossuaire provient de votre tombeau ?
    — Plusieurs ossuaires y ont été volés et il a pu l’acheter à ceux qui ont pillé la sépulture. Il y avait une Marie dans le tombeau, l’une des deux seules inscriptions « Marie » jamais trouvées sur un ossuaire. Si celui de Jacques provient du même site, il se peut qu’il s’agisse du tombeau de famille de Jésus.
    Je n’adhérai pas à la thèse de Tabor. La chronologie ne cadrait pas. Golan ne pouvait pas avoir acheté l’ossuaire seulement un an auparavant. Il n’aurait pas eu le temps de le faire examiner par Lemaire. Même si Golan ne l’avait pas acheté avant la modification de la réglementation, je crois qu’il détenait l’ossuaire, peut-être depuis le début des années 1980. Tabor se trompait, l’ossuaire de Jacques ne provenait pas de son tombeau au linceul.
    — Et qu’est-ce que je viens faire dans cette histoire ?
    — Eh bien, répondit-il aussitôt, nous avons réussi à extraire l’ADN de la plupart des ossuaires découverts dans ce tombeau. Si nous pouvions obtenir quelques fragments de celui de Jacques, nous pourrions