Le Tombeau De Jésus
rapide sur l’origine de cette chronologie démontre qu’elle a été établie au début du XIX e siècle, ou peu avant, et qu’elle ne repose sur aucune preuve solide. Elle aboutit en conséquence à une tautologie absurde : si l’on trouve une croix sur un artefact, cela signifie que l’inscription est postérieure à l’an 325 ; si l’on prouve que l’artefact (comme dans le cas de l’ossuaire de Jésus) date d’environ 70, alors la marque n’est pas une croix…
On considère en fait que les premiers chrétiens n’auraient jamais adopté un instrument de torture comme symbole religieux. Comme le dit un jour le père Jérôme Murphy-O’Connor, professeur à l’École biblique de Jérusalem : « Pour les premiers chrétiens, se promener avec une croix autour du cou, c’est un peu comme si des gens, aujourd’hui, portaient une chaise électrique en guise de pendentif. »
Des fouilles archéologiques ont en réalité révélé qu’une multitude de sectes utilisaient déjà le symbole de la croix à l’époque de l’éruption du Vésuve, quelque quarante années après la crucifixion de Jésus. Vers l’an 80, en Égypte, les gnostiques rendaient un culte à Isis et Osiris, à Seth et à Jésus, et ornaient les chapitres de leurs Évangiles évoquant la crucifixion et la résurrection de Jésus avec une croix – synthèse du crucifix et de l’ankh, le symbole égyptien de la vie. Ainsi, à l’ouest de Jérusalem, sur les bords du Nil, plus de deux siècles avant Constantin, une secte chrétienne avait adopté la croix comme symbole.
A Herculanum, la ville voisine de Pompéi, les cendres du Vésuve ont enveloppé une demeure jusqu’au premier étage, préservant ainsi pendant deux millénaires la moindre planche de bois. À l’étage de la « maison du Bicentenaire », une petite pièce, une sorte de chapelle, est peinte en blanc – la seule de la demeure qui ne soit pas ornée de magnifiques fresques. Dans un coin se trouve un autel en bois parfaitement préservé. Il ressemble aux laraires païens ornementés découverts dans les maisons voisines, à ceci près que cet autel, comme la pièce elle-même, est petit et dépouillé, et comporte un prie-Dieu. Au-dessus, au niveau des yeux pour la personne agenouillée, se trouve une simple coupe, remplie d’encens. Et un peu au-dessus de cette coupe, on peut voir les contours d’une croix gravée dans le crépi.
Si, vers 80, il y a pu y avoir des croix dans deux lieux séparés par la Méditerranée – en Égypte et en Italie –, qu’y aurait-il de si étonnant à en trouver une en Israël dans le Tombeau aux dix ossuaires ? Toutefois, je décidai de n’intégrer aucune de ces marques dans « l’équation Jésus ». Elles étaient en effet insuffisamment répertoriés dans les collections publiques ou privées.
Camille Fuchs, professeur de statistiques à l’université de Tel-Aviv, souligna qu’il fallait garder à l’esprit que seule une élite avait les moyens d’être inhumée dans une grotte funéraire, et que les ossuaires inscrits étaient réservés aux personnes cultivées, qui ne représentaient qu’une fraction de la population de Jérusalem à l’époque. Si je n’avais pris en compte que la fraction aisée de la population de Jérusalem dans mes calculs, les chiffres auraient penché beaucoup trop en notre faveur. Je décidai donc d’éliminer les variables « richesse » et « culture ».
À ce stade de mes analyses statistiques, il y avait donc une chance sur 2,5 millions que le tombeau de Talpiot ne soit pas le tombeau de Jésus de Nazareth.
En 130, l’empereur Hadrien pleurait la mort de son jeune favori Antinous quand il remarqua soudain qu’une étoile brillait d’un éclat plus grand que les autres. Il nomma ce soleil mourant Antinous, croyant qu’il abritait l’âme du jeune homme. Ce nom ne survivrait que de peu au rêve d’Hadrien : construire un éternel temple de Jupiter sur les ruines du mont du Temple à Jérusalem. Le rêve d’Hadrien, comme c’était prévisible, déclencha une seconde révolte juive, en un temps où les Juifs, quelque soixante ans après la première révolte et l’incendie de Jérusalem, estimaient qu’ils pouvaient de nouveau sans danger revenir dans la ville pour la reconstruire.
En 180 de notre ère, la reconstruction de Jérusalem était achevée et la nébuleuse du Crabe brillait d’un rouge écarlate quand l’évêque de Lyon, Irénée,
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