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Le train de la mort

Le train de la mort

Titel: Le train de la mort Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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entre eux, pour tenter de survivre… et parfois même s’entretuaient.
    Fismes fut bien la véritable entrée dans l’enfer.
    De notre wagon, nous tentions de les calmer ; mais rien n’y fit, ils avaient atteint le « point de non-retour ». Pour eux, la fin allait commencer.
    11 heures  – Jonchéry-sur-Veste (wagon Guérin-Canac).
    À l’approche cii de la petite gare de Jonchéry, entre Fismes et Reims, je réussis avec l’aide d’un camarade à retirer du talon de ma chaussure le papier destiné à ma famille. Je le place, avec le caillou ramassé à Compiègne, dans mon mouchoir et après avoir écarté légèrement les barbelés, je parviens à envoyer à quelques mètres mon message. Un agent de la gare l’a vu et le ramasse. Je suis rassuré. Les miens sauront que je pars. Ils seront rassurés sur mon sort.
    11 h 5  – Saint-Brice.
    Marcel Chenet range bêche et râteau, dans le cabanon de son jardin. Il fait trop chaud pour émotter. Peut-être en fin d’après-midi… après l’orage. Car, c’est sûr, obligatoire… Cette lourdeur, cette moiteur, cet air brûlant soutiennent l’orage. Sur le tard, il crèvera.
    Marcel Chenet longe la voie. C’est le chemin le plus direct pour gagner sa maison. Marcel Chenet a quarante ans. Il est responsable de l’entretien des bureaux de la firme de construction aéronautique « Junker » installée à Courcy. Marcel Chenet, qui possède un laissez-passer lui permettant de pénétrer sur les terrains militaires a, plusieurs fois, fourni des plans à des réseaux de renseignements.
    Soudain, à moins de deux cents mètres de lui, un éclair, une très forte explosion, un nuage de poussière. Il se place entre les rails. L’explosion vient bien de la voie et non de la verrerie, comme il l’avait d’abord cru.
    — Ils ont fait sauter la voie. Je vais voir.
    Rail tordu, arraché. Au moins deux traverses soulevées… une tranchée ouverte.
    — Spectaculaire ! Mais sans gravité.
    Il en est là de ses réflexions quant au loin, dans son dos, il aperçoit des uniformes qui courent et agitent des bras prolongés de mitraillettes.
    — Bon sang !
    Et Marcel Chenet qui n’a que trois cents mètres à couvrir pour se retrouver chez lui, au frais, au bord de la voie, prend ses jambes à son cou…
    11 h 15  – Saint-Brice .
    — Ouvrez ! Police allemande.
    Marcel Chenet tire la porte.
    — Papiers.
    C’est un adjudant qui prend la « carte d’accès » aux terrains militaires allemands. Déjà quatre gendarmes fouillent la maison.
    — Ah ! Bon ! Bon ! fait l’adjudant. Pardonnez-nous ; monsieur.
    — Vous cherchez quoi ?
    — Nous cherchons qui… qui a saboté la voie !
    L’adjudant et les soldats sortent. La voie est à quinze mètres. Le 7909 avance au pas. La locomotive stoppe ; au passage à niveau Saint-Charles de la route Champigny-Saint-Brice.
    L’adjudant fixe le train.
    — Je peux aller voir ? demande Chenet.
    — Bien sûr !
    — Je peux donner un peu d’eau ?… Il fait si chaud !
    L’adjudant fixe à nouveau le train, les lucarnes.
    Bien sûr, mais faites vite.
    Et Marcel Chenet tenant trois bouteilles de bière et : trois bouteilles d’eau se dirige vers le train. L’escorte saute des marchepieds. L’adjudant et Marcel Chenet s’arrêtent devant le dernier wagon.
    — Où sommes-nous ?
    Le déporté tend la main vers les bouteilles.
    — À Saint-Brice. Près de Reims.
    — Allons ! dit l’adjudant. Maintenant au revoir monsieur.
    — Merci ! Merci de m’avoir permis… enfin merci pour eux.
    Les deux hommes se serrent la main.
    Marcel Chenet rentre chez lui par la rue du Bois-d’Amour, parallèle à la voie.
    11 h 15  – Sainte-Brice (wagon de 80).
    — Avec ciii l’accord de notre sentinelle, juchée dans la cabine du serre-frein, un homme nous passe une bouteille, avec difficulté car il y a des planchettes et du barbelé qui barrent la lucarne. Nous buvons tous une cuillère d’eau…
    — Mon wagon civ se trouvait arrêté en face du jardin de mon père qui était employé comme chef de transport de la maison Goulet-Turpin. De nombreux déportés jetaient sur le ballast des petits morceaux de papier griffonnés en hâte. Parmi nous quelqu’un avait réussi à soustraire à la fouille un petit crayon et du papier. J’écrivis en hâte quelques lignes à l’adresse de mon père. Malheureusement ce mot ne lui parvint jamais et mon père me crut disparu jusqu’en juin

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