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Le tresor de l'indomptable

Le tresor de l'indomptable

Titel: Le tresor de l'indomptable Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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avec un peu de plaisir. Corbett lui fit l’aumône et continua son chemin. Parvenu à un carrefour, il aperçut les Joyeux qui paradaient dans Cantorbéry pour annoncer leur prochaine représentation. Vive-la-joie avait organisé une cavalcade de diables, tous accoutrés de peaux de loup, de veau et de bélier, ornées et garnies de têtes de mouton et de plumes. Y étaient appendues des cloches de vache ou de cheval qui faisaient un épouvantable vacarme. Ils brandissaient de leurs mains gantées des tisons ardents qui crachaient des bouffées de fumée et des étincelles pétillantes. Ils étaient fort entourés. Vive-la-joie s’arrêtait parfois et précisait que les mimes se retrouveraient ici ou là pour narrer l’histoire du Sauveur et de Son incarnation dans le monde des hommes.
    Le magistrat, assourdi par les cris de la multitude, les rires enroués, le cliquetis de l’acier, le carillon des cloches, le crin-crin grinçant des violoneux, les glapissements des catins et des gueuses cherchant le client, talonna son cheval. Les marchands vantaient leurs produits et le sermon sonore et retentissant d’un dominicain voûté en bure noire résonnait dans les rues. Le prêcheur tendait le doigt vers le ciel, les yeux brillants dans son maigre visage, le nez fendant l’air. On entendait, par la porte d’une taverne, une bruyante querelle qui mettait aux prises deux joueurs de dés. Un jongleur criait des insultes en poussant une brouette où se trouvait son ours apprivoisé et cherchait un espace où l’animal pourrait danser. Les baillis du marché circulaient, repoussant la foule de leurs gourdins à bout ferré. Corbett avait l’impression de participer à quelque étrange spectacle. Il avait la nausée et l’esprit troublé. Il jura quand un pèlerin lui coupa la route pour se mêler à la dispute qui venait d’éclater entre le tenancier d’un bordel et un autre pèlerin qui prétendait s’être fait escroquer. Mal assuré sur sa selle, il s’arrêta et mit en hâte pied à terre. Il en avait assez, il lui fallait se reposer. Abandonnant la rue, il conduisit son cheval dans la calme cour d’écurie de la taverne La Porte du Paradis. Des palefreniers se précipitèrent à leur rencontre. Le magistrat leur confia les chevaux et entra dans la pénombre de la grand-salle où flottait une odeur douce de moisi. Il ignora les yeux scintillants et méprisants d’une courtisane qui, sur le seuil, tenait un petit bouquet de feuillage d’hiver dans sa main gantée. Près de la porte, une enseigne désignait la direction du Cellier peint où régnait le Père du rire. Deux hommes, en haut de l’escalier, tenaient dans leurs bras un furet apprivoisé ; ils crièrent à la ribaude de les rejoindre.
    Corbett avait encore l’impression d’être dans un rêve. Le tavernier accourut, tout empressé, avec un pichet de vin en signe de bienvenue. Le clerc montra son mandat et demanda une chambre privée. L’hôte s’inclina, lui fit traverser la salle et monter un large et solide escalier de bois pour l’introduire dans une longue pièce bien meublée. Des tentures de couleur pendaient aux murs et un feu crépitait joyeusement dans la cheminée en forme de porche. Au-dessus du manteau ornementé des panneaux peints célébraient les saints populaires : Christophe qui protégeait de la malemort ; Laurent, patron des cuisiniers ; Julien, celui des hôteliers. L’hôte invita d’un geste Corbett et ses compagnons à s’installer devant le feu pendant qu’il énumérait les mets disponibles : chapons et volailles cuits au beurre ; tourtes à la croûte dorée agrémentées de sauces noires relevées ; perdrix rôties ; porc craquant servi avec des champignons et des oignons ; soupe aux oeufs et au lait, le tout arrosé des meilleurs vins du Béarn. Corbett, affalé dans une chaire à haut dossier, n’écoutait que d’une oreille ; il murmura qu’il voulait du vin. Ranulf, assis à ses côtés, était fort inquiet. Ces traits tirés, cet air hagard qu’avait son maître quand, ainsi qu’il l’avait reconnu lors de précédentes occasions, son esprit fourmillait d’idées pressées et drues comme des flocons pendant une tempête de neige, le préoccupaient. Néanmoins, il se tint coi. Quelques instants plus tard, une souillon leur servit du vin. Corbett but une longue rasade et se détendit.
    — Qu’est-ce qui ne va pas, Messire ? finit par s’enquérir Ranulf.
    Le magistrat serra sa coupe

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