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Le trésor

Le trésor

Titel: Le trésor Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Juliette Benzoni
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l’un des siens en poussant un cri sauvage qui terrorisa le second. Rompant brusquement le combat, au moment précis d’ailleurs où il allait toucher Tournemine, il s’enfuit à toutes jambes, immédiatement suivi par le dernier ennemi de Pongo qui, de toute évidence, ne se souciait aucunement de rester seul avec ces deux furieux.
    L’Indien allait s’élancer sur leurs traces mais Gilles le retint.
    — Qu’ils aillent rejoindre le Diable leur maître si cela leur chante ! J’estime que, pour ce soir, le tableau de chasse est suffisant, fit-il en désignant les sept cadavres qui jonchaient sa bibliothèque.
    Sept parce que l’homme dont Pongo s’était débarrassé d’un coup de poing était allé se fendre le crâne sur le marbre de la cheminée…
    — Beaucoup de sang ! dit Pongo en se grattant la tête. Tapis et fauteuils perdus. Pas possible nettoyer…
    — Quelle bonne ménagère tu es devenu ! s’écria Gilles en riant. De toute façon, cela n’a pas d’importance : nous n’en avons plus besoin… ni d’ailleurs de ces défroques ! ajouta-t-il en faisant voler, de la pointe de son épée qu’il venait d’essuyer, le turban neigeux de Pongo.
    Le visage de celui-ci s’illumina.
    — Fini déguisement ? Vrai ?
    — Très vrai ! On va redevenir nous-mêmes et, ensuite, filer d’ici au plus vite. Les gens qui nous ont attaqués ont essuyé une défaite mais ils n’ont pas perdu leur guerre. Ils ne renonceront, pas à leur vengeance et reviendront en force aussitôt que possible. Il n’y a pas de temps à perdre car, cette fois, ils nous auraient…
    — On fait quoi ?
    — On déménage… cette nuit même ! Va d’abord rechercher Merlin que j’ai laissé sous l’auvent du marché Boulainvilliers. Après tu reviendras emballer ce qu’on a de plus précieux. Pendant ce temps, je vais écrire au propriétaire, lui payer un mois d’avance et le prier de vendre les meubles qui m’appartiennent et que nous ne pouvons emporter. Il n’aura qu’à remettre l’argent à mon ami Beaumarchais. Mais avant va nous chercher une ou deux bouteilles de bourgogne. On en a grand besoin…
    Les yeux de Pongo brillaient comme des chandelles tandis que sa grande bouche s’étirait en un sourire qui lui faisait le tour de la tête exposant orgueilleusement ses grandes incisives de lapin.
    — Moi aller tout de suite…
    Il revint un instant plus tard avec une bouteille sous chaque bras, fit sauter les bouchons, tendit l’une à Gilles qui, assis devant un petit bureau, était déjà en train d’écrire sa lettre, et se mit en devoir de vider l’autre à la régalade.
    — Hum ! fit-il avec un claquement de langue significatif. C’est Grand Esprit qui descend dans intérieur Pongo ! À présent moi aller chercher frère cheval…
    Enjambant les cadavres avec un parfait naturel, il se dirigea vers le salon mais, arrivé à la porte, se ravisa, se retourna vers Gilles qui s’était remis à écrire après avoir vidé, lui aussi, sa bouteille.
    — Et… on va où ?
    — Cette nuit ? À Versailles. On retourne, sous notre ancien aspect dans notre ancien logis, chez cette bonne Mlle Marjon. Ce ne sera peut-être pas pour longtemps d’ailleurs… Je te raconterai…
    — Pas la peine. C’est déjà très grande joie retrouver grand chef « Ours Rouge », vieille squaw « Aimable cigogne », vieux jardinier cacochyme et chatte Pétunia. Moi la marier avec Nanabozo…
    Et, plein d’enthousiasme à l’idée d’unir prochainement en légitime mariage l’aristocratique minette de Mlle Marjon et son enfant adoptif né sur quelque gouttière dans les dernières classes de la société féline, il s’en alla exécuter les ordres de son maître.
    Celui-ci acheva sa lettre, la sabla, la cacheta et la mit dans sa poche. Puis il alla chercher un sac de cuir et vida dedans le contenu des tiroirs de son secrétaire, mettant à part les papiers concernant John Vaughan qu’il tenait de Jefferson. Il en fit un rouleau qu’il cacheta après avoir glissé quelques mots à l’intérieur.
    Ceci fait, il demeura un moment debout, bras croisés, au milieu de la bibliothèque, contemplant, perplexe, ses lugubres occupants qui avaient teint en rouge la plus grande partie de son tapis, hésitant sur le parti qu’il convenait de prendre.
    La bonne règle des choses voulait qu’il alertât l’inspecteur de police le plus proche, autrement dit le sieur Lescaze qui habitait rue du Bac,

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