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Le Troisième Reich, T1

Le Troisième Reich, T1

Titel: Le Troisième Reich, T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: William Shirer
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ferait en sorte que le corps des officiers
prît lui-même l'affaire en main et avertirait également son chef du danger qui
le menaçait. Mais Keitel, arrogant et ambitieux, bien que peu intelligent et de
faible caractère, n'avait aucune intention de mettre sa carrière en jeu en se
créant des difficultés avec le parti et les S.S. Au lieu de transmettre les
papiers au chef de l'armée, le général von Fritsch, il les rendit à Helldorf en
lui conseillant de les montrer à Gœring.
    Nul plus que Gœring ne pouvait se réjouir de les posséder, car
il était bien évident que Blomberg allait devoir quitter l'armée et,
logiquement, estimait Gœring, lui-même prendrait sa succession comme commandant
en chef de la Wehrmacht, but qu'il poursuivait depuis longtemps. Blomberg
interrompit sa lune de miel en Italie pour revenir en Allemagne assister aux
obsèques de sa mère et, le 20 janvier, ignorant toujours ce qui se préparait,
il parut à son bureau de ministre de la Guerre pour y reprendre ses fonctions.
    Il n'y demeura pas longtemps. Le 25 janvier, Gœring apporta le
redoutable document à Hitler, qui venait de quitter Berchtesgaden, et le Führer
entra dans une violente colère. Ainsi son feld-maréchal l'avait trompé, et
lui-même, qui avait été témoin au mariage, faisait figure d'imbécile! Gœring
s'empressa d'abonder dans son sens et, à midi, il alla en personne trouver
Blomberg pour le mettre au courant. Il semble que le feld-maréchal fut atterré
par ces révélations sur sa jeune épouse et il offrit de la répudier aussitôt.
    Cela ne suffirait pas, expliqua poliment Gœring, le commandement
de l'armée exigeait sa démission. Ainsi que nous l'a révélé un passage du
journal de Jodl, écrit deux jours plus tard, le chef d'état-major général, le
général Beck, avait informé Keitel « qu'on ne pouvait tolérer que le plus haut
dignitaire de l'armée eût épousé une catin ». Le 25 janvier, Jodl apprit par
Keitel qu'Hitler avait congédié son feld-maréchal. Deux jours plus tard,
l'officier déchu, alors âgé de soixante ans, quittait Berlin pour Capri, afin
d'y poursuivre sa lune de miel.
    Il fut poursuivi jusque dans ce décor d'idylle par son attaché
naval, qui apportait un élément grotesque au dernier acte de cette singulière
tragi-comédie. L'amiral Raeder avait en effet dépêché à Capri son second, le
lieutenant von Wangenheim, chargé d'exiger de Blomberg qu'il répudiât sa femme,
pour l'honneur du corps des officiers. Le jeune officier de marine était un
personnage arrogant et plein de zèle et, quand il se trouva en présence du
feld-maréchal en voyage de noces, il outrepassa ses instructions. Au lieu de
réclamer un divorce, il laissa entendre à son ancien chef qu'il lui restait
maintenant à faire ce que l'honneur commandait, sur quoi il tenta de lui mettre
un revolver entre les mains. Il semble cependant que, malgré la catastrophe qui
le frappait, le feld-maréchal avait gardé le goût de la vie — visiblement il
était toujours amoureux de sa femme, en dépit de ce qui s'était passé. Il
refusa de prendre l'arme qui lui était offerte, déclarant, comme il l'écrivit
aussitôt à Keitel, que le jeune officier de marine et lui « avaient apparemment
sur la vie des idées et des principes très différents (7) ».
    D'ailleurs, le Führer lui avait fait entrevoir la perspective
d'occuper un nouveau poste de premier plan dès que l'orage serait calmé.
D'après le journal de Jodl, Hitler avait dit à Blomberg, au cours de l'entrevue
où il lui avait signifié son congé : « Dès que sonnera l'heure de l'Allemagne,
vous serez à nouveau à mes côtés et tout le passé sera oublié (8). » En effet,
Blomberg a écrit dans ses mémoires, demeurés inédits, qu'Hitler, lors de leur
dernière rencontre, lui avait promis, dans les termes les plus formels, qu'en
cas de guerre le commandement suprême des forces armées lui serait attribué
(9).
    Comme tant d'autres promesses d'Hitler, celle-ci ne fut pas
tenue. Le nom du feld-maréchal von Blomberg fut à jamais rayé des rôles de
l'armée. Quand la guerre éclata, il offrit ses services, mais il ne fut pas
réintégré et n'exerça aucune fonction. Revenus en Allemagne, Blomberg et sa
femme s'installèrent dans un village bavarois, à Wiessee, où ils vécurent dans
l'obscurité la plus complète jusqu'à la fin de la guerre. A l'exemple d'un
ex-roi d'Angleterre, son contemporain, il demeura jusqu'au bout fidèle

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